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L’explosion de la population des ratons laveurs en Wallonie

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 742 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 14/07/2022
    • de EVRARD Yves
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    En 2007 déjà, des spécialistes de la biodiversité s'inquiétaient du nombre de ratons laveurs présents sur notre territoire. Depuis, leur population n'a fait que s'accroitre pour atteindre aujourd'hui un seuil critique au regard des dégâts causés en termes de biodiversité (attaques de nids et d'oisillons, attaques du milieu aquatique, incursions dans les poulaillers et dans les habitations, etc.).

    Le raton laveur n'a pas de prédateur naturel et se reproduit à grande vitesse.

    Aujourd'hui, c'est un véritable cri d'alarme lancé par le DNF qui n'entrevoit pas de solution pour tenter de contenir la population de ratons laveurs. À l'heure actuelle, faute de temps et d'effectifs, leur action se limite à protéger tant que faire se peut les autres espèces animales menacées par le raton laveur.

    Interrogée en 2020 sur les différentes mesures à prendre pour limiter l'augmentation de population de ratons laveurs, Madame la Ministre privilégiait deux niveaux d'action :
    - des mesures de prévention ou des actions de lutte ciblées sur des situations potentiellement conflictuelles (présence du raton laveur dans une zone de reproduction d'une espèce proie sensible) ;
    - un renforcement de la sensibilisation envers les particuliers par de l'information adaptée. En effet, une densité élevée de ratons laveurs est favorisée par du nourrissage dans les zones anthropisées, intentionnelles ou non, qu'il y a lieu de minimiser.

    Au regard de la situation actuelle, comment évalue-t-elle l'efficacité des mesures prises à l'époque ?

    Compte-t-elle prendre des dispositions plus radicales afin de réduire sensiblement la population de ratons laveurs ?
    Dans l'affirmative, quelles sont ces mesures ?

    Envisage-t-elle de travailler en synergie avec le DNF ce qui impliquerait un renforcement de ses moyens et effectifs ?

    Craint-elle une situation similaire en ce qui concerne les populations de castors et comment compte-t-elle agir à ce niveau ?
  • Réponse du 28/09/2022
    • de TELLIER Céline
    Le raton laveur est un carnivore opportuniste qui s’adapte à de très nombreux habitats naturels, mais également aux milieux urbanisés où il peut atteindre des densités très élevées. Ses capacités cognitives et reproductives font de ce mammifère une espèce exotique envahissante particulièrement difficile à gérer.

    Avant que les dégâts qu’il cause ne soient connus par la société, son apparence mignonne largement véhiculée par les médias l’a rendu sympathique auprès de la population, rendant difficile la prise de mesures visant la destruction d’individus par les pouvoirs publics. Ainsi, aucun pays européen ne dispose à ce jour d’une stratégie de gestion ambitieuse de cette espèce, et ce, malgré les messages d’alarme des personnes sur le terrain, dont certains agents du DNF.

    Observé pour la première fois en 1986, le raton laveur s’est propagé à partir de la frontière allemande et luxembourgeoise. Son expansion s’est fortement accélérée depuis les années 2010, avec aujourd’hui des densités d’observation particulièrement élevées au sud de la Wallonie (notamment dans le massif ardennais et en Gaume). Les densités en zone atlantique semblent pour l’heure beaucoup plus faibles, mais devraient augmenter dans un futur proche. Ainsi, l’éradication du raton laveur à l’échelle de la Wallonie ne peut plus être raisonnablement envisagée au vu des fortes densités observées sur le terrain, en ce compris au niveau des zones frontalières qui agissent comme autant de populations sources.

    Puisque l’éradication n’est plus un objectif réaliste, il y a lieu de réguler l’espèce afin de limiter ses dégâts. Ainsi et au vu de la situation actuelle alarmante, j’ai demandé à mes services de réaliser une identification des zones prioritaires d’intervention, tenant compte de la présence d’espèces sensibles, ainsi que la réalisation d’un plan de lutte détaillé. Ce plan pourra s’appuyer sur le test de lutte pilote qui a été mené en zone de peste porcine africaine durant les années passées.

    Le raton laveur étant une espèce de la liste des espèces exotiques envahissantes (EEE) préoccupantes pour l’Union européenne au sens du règlement européen 1143/2014, sa détention, son transport et son commerce sont déjà actuellement interdits. De plus, un arrêté du Gouvernement wallon sur les EEE en passe d’être adopté va permettre l’opérationnalisation d’un plan de lutte et la délivrance d’agréments pour permettre à des opérateurs d’intervenir chez les particuliers en cas de nuisance.

    La situation est totalement différente pour le castor. Il ne s’agit pas d’une espèce exotique envahissante, mais d’une espèce indigène, qui a recolonisé la Wallonie, après avoir été décimée.

    Étant donné son impact sur la renaturation des milieux profitant aux espèces associées et appuyant souvent une amélioration de certains services écosystémiques, le castor est considéré comme une espèce-ingénieur « clé de voûte ».

    Globalement, les spécialistes s’accordent pour attribuer au castor un rôle bénéfique pour la biodiversité, même si certaines espèces plus vulnérables n’y trouvent pas leur compte.

    Il est évident que cette réoccupation de l’espace peut causer des difficultés de cohabitation.

    Dans certains cas de dommages importants ou de risques pour la sécurité publique qui ne peuvent pas être solutionnés par des mesures préventives, et moyennant le respect de plusieurs conditions, des dérogations peuvent être accordées pour la destruction de barrages, voire en dernier ressort, pour le tir d’individus. Aucune réponse générale ne peut être apportée et il importe d’analyser la situation au cas par cas, en commençant par vérifier la nature du problème et la possibilité d’y apporter une solution par des mesures de prévention.

    Le comportement très territorial du castor et les traits de vie liés à sa structure sociale (comme un taux de reproduction plutôt bas, l’éducation de longue durée de la progéniture) régulent le niveau maximum des populations et empêchent une surpopulation.