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La situation sociale préoccupante au sein de l’Agence wallonne du Patrimoine (AWaP)

  • Session : 2021-2022
  • Année : 2022
  • N° : 511 (2021-2022) 1

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  • Question écrite du 02/09/2022
    • de LEPINE Jean-Pierre
    • à DE BUE Valérie, Ministre de la Fonction publique, de l'Informatique, de la Simplification administrative, en charge des allocations familiales, du Tourisme, du Patrimoine et de la Sécurité routière
    Au mois d'avril de cette année, en front commun syndical, 300 agents de l'AWaP ont voulu dénoncer une situation interne qu'ils jugent insupportable relativement à leur bien-être au travail. Une action réitérée, devant le cabinet de Madame la Ministre, au mois de juin 2022.

    Ceux-ci évoquent une situation « insupportable ». En cause, le non-remplacement des départs a généré une charge de travail à croissance exponentielle et les absences pour maladies et burn-out y sont en hausse constante.

    À titre d'exemple, pour la Direction de Mons, qui couvre le Hainaut, le cadre des architectes doit comporter six agents. Or, l'équipe a perdu deux unités pour cause d'épuisement tandis qu'une troisième personne a obtenu un mi-temps médical. Le service est dès lors privé de 50 % de ses effectifs, alors qu'il joue un rôle fondamental dans les procédures de permis d'urbanisme, de plus en plus strictes. Avec les exigences de la nouvelle législation, la charge de travail a, en effet, grimpé à 190 %.

    Selon ses propres chiffres, parmi les 120 personnes affectées à l'archéologie au sein de l'AWaP, près de deux tiers ont dépassé l'âge de 50 ans, ce qui induit des conséquences sur les chantiers. Madame la Ministre reconnait elle-même que « plus d'un quart de ces agents ne peut plus exercer son activité ou doit la restreindre pour raisons médicales ».

    Un aspect également problématique concerne les travaux qui nécessitent la visite préalable de scientifiques, des sondages, des réunions, des évaluations et des fouilles et qui prennent du retard au vu du manque de moyens en personnel.

    Peut-elle faire le point, à ce jour, sur la situation sociale au sein de l'AWaP ?

    Des réunions avec les représentants du personnel ont-elles eu lieu en vue d'identifier les besoins et d'y répondre ? Qu'en ressort-il ? Qu'est-il concrètement mis sur la table pour pallier la situation sociale problématique de l'agence ?

    Quelles sont les revendications qu'elle souhaite faire siennes et voir se concrétiser promptement ?

    Quels engagements concrets peut-elle aujourd'hui prendre de manière à répondre à celles-ci ?

    Eu égard à la charge de travail qui s'est considérablement accrue en raison des exigences de la nouvelle législation, les besoins en personnel seront-ils assurés ?

    La situation entraînera-t-elle une restriction des missions de fouilles préalables aux chantiers, au risque de perdre des indices constitutifs de notre patrimoine ?
  • Réponse du 23/09/2022
    • de DE BUE Valérie
    Comme j’ai eu l’occasion de l’expliciter en détail lors de la commission du 19 septembre dernier, la situation de l’AWaP est complexe. Chacun s’accorde à reconnaître que le malaise est ancien et dépasse le contexte difficile de la fusion, toujours indigeste pour certains agents. Les problèmes sont multiples et remontent à de nombreuses années. Je confirme qu’ils sont discutés avec les organisations syndicales. En ce qui concerne les aspects liés au personnel, des réunions de Comité de concertation de base ont lieu au sein du TLPE. En outre, des échanges sont régulièrement organisés entre les organisations syndicales, la Directrice générale du TLPE et le Manager de transition de l’AWaP, avec ou sans les membres de mon cabinet ou moi-même, pour faire le point sur l’avancement des actions menées.

    En juin dernier, lors de la réunion avec les organisations syndicales, j’ai demandé au manager de transition de recentrer ses actions sur les principaux griefs restants et de les présenter à la rentrée aux syndicats. Ce qui a été fait. Actuellement, le manager de transition décline ses actions autour des cinq grandes lignes suivantes, qui répondent aux constats relayés par les représentants des travailleurs :

    1. en réponse à la surcharge et à la perte de sens : réflexion sur les missions en fonction des ressources disponibles. Des groupes de travail par métier se réunissent actuellement. Au sein de ceux-ci, dans une démarche de construction collective, les agents vont lister, caractériser, chiffrer et ensuite améliorer leurs tâches avec pour objectif d’optimiser l’utilisation des ressources disponibles en utilisant au mieux les compétences. La réflexion porte également sur les pistes de simplification administrative et organisationnelle. Le nouveau CoPaT et de ses arrêtés sont l’opportunité de simplifier les tâches et les procédures. La digitalisation et l’automatisation qui font partie des pistes explorées devraient également permettre de gagner en efficience.

    2. en réponse à « Tout est compliqué à l’AWaP et non standardisé » : parachèvement des processus et déploiement d’une culture processus. Des formations, à tous les échelons de l’AWaP, démarrent en octobre prochain pour permettre un déploiement début 2023.

    3. en réponse à « Qui fait quoi à l’AWaP ? Qui est responsable de quoi ? » : clarification de la chaîne de décision et des interactions entre les 9 directions, réflexion encadrée par un consultant externe. Les entretiens individuels avec les directeurs ont commencé avec une mise en commun à partir d’octobre et un aboutissement fin d’année. Il est essentiel que la plate-forme de coordination fonctionne comme un réel comité de direction, en travaillant de façon collégiale et responsable.

    4. en réponse à « Il reste un gros décalage entre les directeurs et les agents » : amélioration de la communication interne. Des communications globales à l’ensemble du personnel par le manager de transition sont – enfin – planifiées, et ce trois fois par an. Les premières séances sont en cours sur les différentes implantations avec pour ordre du jour un point sur le plan d’actions, les actions prévues sur les prochains mois, la situation financière et le personnel. Quelques vidéos de réalisations de l’AWaP sont également projetées. Par ailleurs, les réunions de services seront systématisées.

    5. en réponse à « Quid de l’évolution de l’informatique ? » : plan de transformation digitale, avec détermination de différentes priorités comme l’accès à l’application de gestion des permis d’urbanisme avec une expérience pilote dans une direction à partir d’octobre, la rationalisation des sites internet de l’AWaP ou encore l’indispensable prise en main des migrations d’applications informatiques.

    En ce qui concerne plus spécifiquement la situation en termes de ressources humaines, je peux préciser que l’AWaP comptabilise actuellement 332 postes et garde ses effectifs, voire les augmente :
    - dans le cadre du plan de personnel, l’AWaP bénéficie, comme tout le reste du SPW, d’une enveloppe alimentée par les départs. Je rappelle que ce Gouvernement remplace 5 fois plus que le précédent, l’alimentation du plan de personnel s’effectuant à 100 et non à 20 %. L’AWaP utilise l’entièreté de son enveloppe. Actuellement, 9 postes ont été déclarés vacants via le plan de personnel 2022, 3 ont été pourvus et 6 sont en cours de recrutement. Les choix sont posés par l’agence elle-même et conduisent tantôt à remplacer poste pour poste, tantôt à pourvoir un besoin plus ancien et considéré comme prioritaire. En effet, le passif lié à la norme de remplacement sous la précédente législature ne peut être ignoré, tout comme l’impact de la création d’un service à comptabilité autonome sans nouvel engagement, ce qui a imposé de renforcer le service support au détriment de besoins existants dans les autres directions. Ces décisions anciennes ont encore des conséquences aujourd’hui ;
    - divers postes émanent directement de décisions du Gouvernement en fonction des besoins : recrutements de contrats à durée déterminée dans le cadre du plan de reconstruction de 2021 suite aux inondations (2 archéologues, 2 architectes, 1 gestionnaire en sauvegarde du patrimoine, 1 assistant administratif), dans le cadre du plan de relance (2 architectes) ou encore, en juillet dernier, 3 architectes et 1 assistant administratif pour renforcer le traitement des autorisations patrimoniales et des subventions. Ces derniers postes sont en cours de recrutement ;
    - enfin, dans le cadre du BBZ, 2 postes CDI (1 céramologue et 1 restaurateur) vont être créés par internalisation.

    Pour la Direction opérationnelle en Zone Ouest (Province de Hainaut) à laquelle l’honorable membre fait référence dans sa question, ce n’est pas moins de 7 postes supplémentaires qui ont été créés ou sont en cours de recrutement. Plus précisément, sur les 5 postes (et non 6) constituant le cadre des architectes de cette direction, il y a actuellement 1,5 ETP non pourvu, soit un mi-temps médical renouvelable par tranche de 6 mois et une maladie de longue durée renouvelable par tranches de 3 mois. Ce dernier poste est en outre soumis à clause résolutoire, ce qui a obligé à la consultation de la réserve en août 2022 et n’a abouti à aucune désignation de statutaire pour l’instant faute de candidats disponibles. À la suite de la notification début septembre de ce non-pourvoiement, une procédure de recrutement d’un contractuel a directement été lancée.

    La situation des agents affectés à l’archéologie, et notamment la pyramide des âges défavorable, est bien connue au sein de l’AWaP. Il faut néanmoins distinguer deux situations différentes vécues par les agents en fin de carrière :
    - pour les archéologues, techniciens et dessinateurs, les missions peuvent se concentrer sur des tâches moins contraignantes comme les post-fouilles et publications, ainsi que la coordination administrative des opérations de fouilles.
    - pour les opérateurs de fouilles, la problématique est plus complexe, car il faut pouvoir leur proposer du travail moins contraignant physiquement et correspondant à leurs qualifications. Si certains ont pu être réaffectés à d’autres tâches, une solution en interne à l’AWaP n’a pu être apportée à tous à ce stade.

    Dans les deux cas, pour l’opérationnel sur terrain, le système ne prévoit le remplacement des agents qu’au terme de leur carrière professionnelle. Étant donné les statuts de l’AWaP et sa gestion du personnel en enveloppe fermée, les missions sur chantier sont renforcées via une sous-traitance extérieure en fonction des budgets annuels, en hausse significative depuis 2020. L’AWaP programme ses opérations archéologiques via la PSM (planification stratégique managériale), outil de gestion visant à optimiser les moyens dévolus à l’archéologie en prenant en compte l’ensemble du processus, jusqu’au post-fouilles.

    Pour conclure, je dirai que le chantier de l’AWaP est un chantier de longue haleine, pour lequel il faut se montrer à la fois ambitieux et pragmatique. La situation de la Wallonie impose des lignes de conduite qui s’appliquent à toutes les administrations. Être un agent du service public de Wallonie implique également de ne pas travailler dans une tour d’ivoire, mais bien au service des citoyens, en tenant compte du contexte global, de l’évolution de la société et des enjeux territoriaux, économiques et énergétiques. J’ai veillé à ce que des priorités soient définies et un planning établi. J’ai demandé au manager de transition de veiller à son avancement et y prêterai une attention marquée. Toutefois, la mise en œuvre ne dépend pas uniquement du bon vouloir d’une Ministre ou d’un Gouvernement. Il faut que l’organisme lui-même prenne les choses en main, que la hiérarchie mette tout en œuvre pour garantir non seulement un fonctionnement cohérent et transversal, mais aussi une communication interne efficace. Il faut que chaque agent devienne un acteur du changement. Je compte sur les agents pour dépasser un passif qui les mine et se tourner vers l’avenir. Je compte également sur les organisations syndicales pour réfléchir ensemble aux actions et potentielles évolutions qui permettraient d’améliorer la situation, dans le respect du cadre imposé.