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Le label "zéro carbone" et le risque de "greenwashing"

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 73 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 30/09/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    La transition vers une économie à faibles émissions doit évidemment impliquer toutes les entreprises, et celles de la Wallonie sont tout autant concernées.

    Pourtant, c'est une évidence qui est loin d'être soutenue pleinement par tous les acteurs. Selon une enquête réalisée par l'organisme certificateur South Pole auprès de 60 000 sociétés dans le monde, seulement 2 % ont pris des engagements pour parvenir à la neutralité carbone d'ici l'échéance de 2050 fixée par l'Union européenne.

    Qu'en est-il des sociétés wallonnes ?

    Quelles sont les politiques que la Région a mises en place pour aider les sociétés concernées et engagées à parvenir à cette neutralité ?

    Récemment, une société belge du nom de CO2logic, qui accompagne les entreprises dans leurs efforts de réduction des émissions de CO2, a mis à jour son label dans un souci de transparence. Ce nouveau label offrira une crédibilité renforcée, une nouvelle visibilité, et permettra ainsi de lutter contre le « greenwashing ».

    L'initiative a été accueillie positivement par plusieurs entreprises telles que bpost, Eaglestone, et VO Group. Ce mardi 20 septembre, CO2logic a d'ailleurs présenté sa nouvelle version du label à Bruxelles en présence de la Ministre fédérale du Climat, Mme Zakia Khattabi.

    Qu'en est-il de la réception du label en Wallonie ?

    Comment est-ce que cette idée de label est accueillie dans le Cabinet de Monsieur le Ministre ?

    Y a-t-il des pistes de réflexion quant à la nécessité de motiver et pousser les entreprises à s'adapter aux objectifs de réduction de CO2 et d'éviter tout risque de « greenwashing » ?
  • Réponse du 08/11/2022
    • de HENRY Philippe
    Consciente des enjeux climatiques, la Wallonie s’inscrit résolument dans la dynamique européenne avec sa déclaration de politique régionale qui se fixait déjà, dès 2019, pareils objectifs de neutralité carbone en 2050 et de réduction de 55 % des émissions de GES en 2030.

    Atteindre ces objectifs nécessite la mobilisation de tous les acteurs wallons, car tous les secteurs devront y contribuer, solidairement et équitablement. Pour y arriver, le Gouvernement souhaite impliquer les acteurs économiques, sociaux et environnementaux et veillera à leur assurer une visibilité à moyen et long terme.

    Selon les inventaires d’émissions, l’industrie wallonne a émis 10,9 MtCO2 en 2019. Ces émissions ne concernent en fait que sa consommation de combustibles fossiles et ses émissions process. Il faut y ajouter les émissions liées à sa consommation d’électricité. Selon le bilan énergétique 2018, l’industrie absorbe 10 TWh sur les 23 TWh d’électricité consommée en Wallonie. Or les émissions du secteur de production électrique sont de 3,5 MtCO2 dans les inventaires 2019.

    On peut donc considérer que l’industrie wallonne a en réalité émise en 2019 l’équivalent de quelques 12,4 MtCO2, soit un tiers des 37 MtCO2 émises en Wallonie en 2019. Ce poids démontre que les entreprises wallonnes resteront des acteurs cruciaux dans les efforts à venir, au-delà des réductions déjà engrangées par le passé.

    Bien conscient de cet enjeu, le Gouvernement a donc notamment prévu dans sa Déclaration de politique régionale de 2019 d’adopter des accords volontaires de nouvelle génération, en tenant compte des spécificités des différents secteurs. Le Gouvernement vient d’ailleurs d’approuver ce 22 septembre 2022 le concept sur lequel sera construite cette prochaine génération, et de charger mon équipe de le finaliser pour que la nouvelle génération d’accords puisse entrer en vigueur au 1er janvier 2024.

    Face à l’ampleur de l’enjeu, il convient d’adopter une vision holistique pour pouvoir maximiser l’impact du futur mécanisme. Il doit venir complémenter le cadre européen pour protéger les positions de nos entreprises, tant à l’import qu’à l’export, aussi bien à court qu’à long terme. Mais il doit en contrepartie assurer une démarche ambitieuse et efficiente en matière de gestion de l’énergie et de réduction de l’empreinte carbone des participants, basée sur des plans d’action long terme visant la décarbonation individuelle et collective (au-delà du « business as usual » et des obligations européennes) à l’horizon 2050.

    L’administration poursuit son travail, afin que les informations (audit et plan d’action) des entreprises candidates puissent être préparées en 2023 et permettre la signature des accords individuels pour une entrée en vigueur dès le 1er janvier 2024.

    Le retour d’expérience sur les accords actuels a entre autres fait ressortir le manque de communication et de visibilité autour de l’engagement de nos entreprises dans ces accords de branche. L’implication du management de ces entreprises doit aller au-delà des investissements réalisés. Nous réfléchissons donc nous aussi à la mise en place d’un label qui mettrait en avant les entreprises qui entreront dans les prochains accords volontaires.

    Parmi les candidats possibles pour ce faire, on cite le label CO2Neutral, développé par CO2Logic en collaboration avec l’organisme certificateur Vinçotte. Je n‘ai pas encore eu l’occasion d’approfondir leurs spécificités, mais je ne doute cependant pas du sérieux de cette entreprise qui jouit d’une expertise reconnue. Je me réjouis donc vivement de l’apparition de ce label basé sur des standards internationaux.

    Tout ce qui peut contribuer sérieusement à aider les entreprises à s’inscrire sur une trajectoire de neutralité climatique doit être salué.

    Ce label CO2Neutral est une initiative privée parmi d’autres que je ne peux citer ici, à laquelle nos entreprises commencent effectivement à adhérer, en recherche de validation du sérieux de leurs efforts, qui va devenir de plus en plus un argument commercial vis-à-vis de leurs clients et de leurs actionnaires et financiers, mais également un argument d’engagement de talents dans leur équipe.

    Accompagner nos entreprises dans la réduction de leur empreinte carbone et énergétique et factualiser cette réduction est depuis des années une priorité de notre gouvernement, matérialisée par les accords de branche. L’action y est priorisée sur la réduction de l’empreinte dans le périmètre de l’entreprise, bien avant la compensation carbone.

    Nous sommes donc, dans le cadre de la préparation de la prochaine génération en train d’investiguer comment fusionner ces visions managériales sur bases de labels commerciaux porteurs avec le concept des futurs accords. Ce concept repose sur la mise en place d’un système de management de l’énergie et du CO2, compatible avec l’ISO 50 001, et dont les audits phasés successifs sont l’outil pratique de mise en œuvre et de suivi factuel de ces visions.