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L’accaparement des terres agricoles par Colruyt

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 40 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 04/10/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Ce mardi, le 20 septembre, la FUGEA a déployé plusieurs tracteurs sur le parking du magasin Colruyt à Ath. Les agriculteurs protestaient contre la stratégie d'acquisition de terres par le groupe actif dans la grande distribution.

    D'après le syndicat agricole, le groupe s'est emparé de 175 hectares de terres ces dernières années via sa société immobilière.

    Quand un agriculteur doit faire face au géant du commerce lors d'une procédure d'achat d'un terrain, Colruyt surenchérit jusqu'à mettre parfois quatre fois le prix initial.

    Derrière, le groupe signe des contrats d'exploitation à l'année avec les fermiers. Le groupe applique des baux trop courts pour pérenniser les exploitations.

    De manière générale, cette manière de faire dope le prix de toutes les terres agricoles, pas seulement celles convoitées par Colruyt.

    Monsieur le Ministre a-t-il eu écho de ces difficultés vécues par le monde agricole wallon ?

    Connaît-il l'étendue du problème ?

    A-t-il rencontré les syndicats agricoles sur le sujet ? Quels sont les résultats de ces entretiens ? D'autres réunions sont-elles prévues ?

    La Wallonie peut-elle s'engager à soutenir le secteur, à contenir la hausse du prix des terres ? Quels sont les leviers à sa disposition ?
  • Réponse du 25/10/2022
    • de BORSUS Willy
    Je suis bien entendu au courant de la situation liée au groupe Colruyt en termes d’achat de terrains agricoles.

    Mon équipe a eu très récemment, à ma demande, un contact avec une représentante du groupe Colruyt. Le groupe m’indique n’avoir pas acquis de terres agricoles en Wallonie depuis 2020.

    Lors de cet entretien, nous avons rappelé au groupe Colruyt, notre attachement au bail à ferme et au principe de liberté de culture. Le bail à ferme permet en effet d’assurer à l’agriculteur de se projeter dans une période suffisamment longue, ce qui lui évite d’être mis sous pression, contraint à devoir subir une situation dans laquelle des contrats d’année en année doivent être renouvelés.

    Même si le groupe Colruyt veut s’inscrire dans une démarche de durabilité et augmenter la part des produits locaux dans ses magasins, ce qui est positif pour nos producteurs, il est clair que le schéma d’acquisition des terres n’est pas un schéma où la liberté culturale et cette durée existent.

    Dans le format souhaité par Colruyt, les agriculteurs ne seraient pas liés à un bail à ferme, mais seraient engagés dans des contrats à l’année. Ils seraient dès lors dans une situation que je considère comme précaire, déséquilibrée. Ils devraient produire ce que le groupe souhaite, même si j’insiste sur la volonté de valorisation de produits de chez nous dans les enseignes. Nonobstant cela, cette liberté de cultiver n’existe pas. Par ailleurs, il y a des éléments de tension probable entre les choix que l’agriculteur souhaiterait poser et les choix du propriétaire. Il faut également s’assurer que les prix payés aux agriculteurs soient corrects et permettent de rémunérer dignement son travail et ses investissements. Je n’ignore évidemment pas la pression subie par le groupe sur la consommation, sur le prix de vente et donc sur le prix d’achat du consommateur. Il est évident que l’on doit trouver un équilibre dans le cadre de l’accès à la terre par rapport à ces éléments, qu’ils soient de valorisation dans la chaîne alimentaire, mais aussi d’exercice du métier d’agriculteur.

    L’achat de terres par un certain nombre de grands groupes impacte le prix des terrains. Tout le monde sait à quel point le prix du foncier augmente fortement. J’organise les Assises de la Terre afin de pouvoir avoir des échanges constructifs avec le secteur et de pouvoir, le cas échéant, mettre en place des outils qui permettent d’aider nos agriculteurs dans leurs démarches d’accès au foncier. Celles-ci se dérouleront en trois demi-journées, les 16, 21 et 29 novembre prochains.

    Nous allons y aborder différents aspects :
    - la gestion des terres : les différents systèmes fonciers qui existent ;
    - la transmission : le faire-valoir direct et le faire-valoir indirect ;
    - la préservation du foncier en quantité.