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La lutte contre les pesticides en Wallonie

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 66 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 04/10/2022
    • de AHALLOUCH Fatima
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    À l'occasion du 60e anniversaire de Printemps silencieux, l'ONG Pesticide Action Network (Pan) Europe a publié un nouveau rapport. Selon les données gouvernementales analysées par l'association, les fruits d'automne sont fortement contaminés par la catégorie de pesticides la plus dangereuse. Les substances en question sont liées « à un risque accru de cancers, de malformations congénitales, de maladies cardiaques et d'autres maladies graves ».

    Au total, plus de 40 000 échantillons ont été analysés. Selon le rapport, le problème se serait aggravé entre 2011 et 2020 : un tiers de tous les fruits échantillonnés étaient contaminés en 2020, contre un cinquième en 2011. La Belgique n'est pas épargnée, 71 % des poires les plus contaminées sont belges. Le rapport du Pan pointe l'échec des réglementations européennes adoptées en 2009 qui visaient, entre autres, à éliminer progressivement cette catégorie de pesticides. « L'élimination progressive des pesticides a échoué parce que les gouvernements suivent des directives rédigées en étroite collaboration avec les géants de la chimie BASF, DuPont (maintenant Corteva) et Syngenta », estime l'organisation. Pan Europe dénonce également l'adoption de lignes directrices par l'administration européenne « responsables du rejet des alternatives non chimiques et de chacune des autorisations de pesticides les plus toxiques. ».

    Les Régions sont compétentes pour réglementer l'usage de ces produits pesticides, Madame la Ministre confirme-t-elle les dires du rapport du Pan concernant la contamination des fruits d'automne en Belgique ?

    Que prévoit le Programme wallon de réduction des pesticides (PWRP) à ce sujet ?

    Que dit la feuille de route synthétique de la Région pour les cinq prochaines années (2023-2027), le PWRP III, en termes de réduction des quantités utilisées et des risques liés aux pesticides ?

    A-t-elle été modifiée dans ce sens ?

    Comment analyse-t-elle l'affirmation de Pan selon laquelle « l'élimination progressive des pesticides a échoué parce que « les gouvernements suivent des directives rédigées en collaboration avec les géants de la chimie » ?

    Comment contribue-t-elle à maintenir la confiance des citoyens concernant l'utilisation de pesticides dangereux sur les fruits ? La santé du consommateur reste-t-elle garantie ?
  • Réponse du 13/03/2023
    • de TELLIER Céline
    Je suis très sensible à la question de la lutte contre l’utilisation des pesticides et j’agis concrètement dans les compétences qui sont les miennes. Je rappelle toutefois que l’utilisation des pesticides est largement liée aux compétences agricoles. En effet, plus de 95 % des quantités vendues sont utilisées en agriculture. Il est donc nécessaire de questionner le modèle agricole actuel. Je ne doute pas que l’honorable membre interrogera le Ministre compétent à cet égard.

    Le Programme wallon de réduction des pesticides 2023-2027 (PWRP 3) prévoit un ensemble de mesures cohérent visant à compléter ce qui existe ailleurs et qui a un impact direct sur la réduction des quantités et des risques liés à l’utilisation des pesticides. Il fait aussi la synthèse de ces mesures prises dans les autres Plans et Programmes wallons.

    La réduction des quantités passe nécessairement par le développement d’alternatives, à commencer par alternatives et les modes de production ne nécessitant pas de produits. En ce qui concerne la sensibilisation à ces alternatives en cultures, la campagne « Vers une Wallonie sans pesticides… » de l’ASBL Nature & Progrès, lancée en 2017, est toujours en cours et fait le point successivement sur différentes cultures. Les résultats de la dernière campagne, portant cette fois sur les pommes de terre, sont attendus très prochainement. Le prochain volet de cette campagne (qui commencera a priori en juillet) portera justement sur les fruits.

    Par ailleurs, l’ASBL GAWI (Groupement des arboriculteurs wallons pratiquant les techniques Intégrées et Biologiques), qui fait partie du Centre pilote fruitier CePiFRUIT, propose :
    - d’étendre davantage les actions de sensibilisation et de conseil vers le secteur de l’arboriculture fruitière, de manière à couvrir 100 % de la profession et des superficies ;
    - d’organiser des séances de sensibilisation et d’informations plus théoriques (dans le cadre de la phytolicence, où seront à la fois présentés les aspects législatifs, mais aussi et surtout les solutions et les stratégies alternatives dans la pratique ainsi que leurs risques inhérents).

    Au-delà de la sensibilisation aux alternatives, le futur écorégime « Réduction des intrants chimiques » permettra très concrètement aux agriculteurs volontaires d’abandonner les pesticides « candidats à la substitution » (CfS) qui sont mentionnés dans le rapport de PAN Europe, tout en bénéficiant d’une compensation financière pour les pertes éventuelles.

    Il ne m’appartient pas de me prononcer sur les pratiques de gouvernance des niveaux fédéral et européen, remises en question par PAN Europe, mais la question est évidemment pertinente et mériterait d’être posée aux bons niveaux de pouvoir.

    En conclusion, ce que l’on peut dire à l’heure actuelle est que d’un point de vue strictement sanitaire, tout est à de rares exceptions, conforme aux normes en vigueur. Ceci ne remet en revanche pas en question la nécessité de se passer de pesticides le plus rapidement possible, étant donné les nombreux impacts sur l’environnement, la biodiversité et la santé humaine, qui ne sont pas le fruit d’un usage inapproprié des pesticides, mais bien d’un usage ordinaire.