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L'initiative du CPAS de Liège relative au statut de client protégé conjoncturel

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 222 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 08/11/2022
    • de MATAGNE Julien
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    Le CPAS de Liège vient de prendre une initiative qui suscite des questions tant sur le fond que sur la forme et qui sort par ailleurs du cadre wallon de protection régionale conjoncturelle en énergie.

    En effet, le CPAS propose le tarif social dès que la facture énergétique atteint 10 % (pour un isolé) ou 15 % (pour un ménage) des revenus du foyer.

    Quelle est l’analyse de Monsieur le Ministre de cette situation, des effets d'aubaine qu'elle pourrait engendrer, et des impacts sur le budget de notre Région de telles mesures prises unilatéralement ?

    Sur le fond et l'économiste Defeyt relève ces questions : avec le calcul des 10 et 15 % proposé par le CPAS, quels sont exactement les revenus qui sont pris en compte ? Revenus mobiliers et immobiliers ?

    Comment est-il possible de comparer une famille monoparentale vivant dans un logement très mal isolé et un couple qui produit son énergie, ayant le compteur qui tourne pour chauffer son jacuzzi ? Qu’en est-il des personnes qui se chauffent au mazout ?

    Combien de personnes pourraient bénéficier de ce « tarif social version liégeoise » et quel budget wallon y sera consacré ?

    D'autres villes et communes en Wallonie ont-elles l'intention d'appliquer un tel tarif ?

    Quels sont ses contacts avec l'UVCW et la Fédération des CPAS relativement à ces initiatives ? Quelles sont les intentions de chacun ?

    Une rencontre a eu lieu le 27 octobre avec les CPAS a-t-on pu lire par voie de presse : qu'en est-il ressorti ?

    Enfin, et sur la forme, je rappelle que lors des débats et discussions relatives au statut de client protégé conjoncturel en Wallonie et aux citoyens éligibles à ce statut, mon groupe avait déjà insisté pour qu'une circulaire explicative à l'attention de tous les CPAS en Wallonie pour une application homogène à l'ensemble des citoyens wallons de cette mesure.

    Pourquoi ne pas avoir dès l'adoption du décret rappelé les règles uniformisées à l'ensemble des CPAS ? Cela aurait pu clarifier les choses dès le début et éviter ces situations !
  • Réponse du 09/11/2022
    • de HENRY Philippe
    La protection conjoncturelle distingue deux cas de figure : soit le ménage appartient à une catégorie qui a été impactée professionnellement par la crise du Covid, des prix de l’énergie, les inondations et est en défaut de paiement. Dans ce cas, la protection est octroyée par l’intermédiaire du GRD. Soit le ménage est accompagné par un CPAS, dans le cadre de sa mission d’accompagnement individuel, et ce dernier identifie une difficulté pour faire face à sa facture d’énergie. L’utilisation de seuls critères comme la part de la facture d’énergie dans le revenu du ménage ou un critère de consommation moyenne pour octroyer automatiquement la protection conjoncturelle ne répond pas au prescrit décrétal, car ces deux seuls critères n’induisent pas systématiquement une difficulté à payer sa facture d’énergie. Le revenu global du ménage a son importance, ses autres dépenses, son statut en tant que locataire du parc social ou privé, etc.

    Le dispositif de client protégé conjoncturel se veut évidemment aussi subsidiaire aux mesures adoptées par les autorités fédérales, élargissement du tarif social, aides directes à tous les ménages, ou à d'autres dispositifs de protection régionaux visant des situations particulières comme la médiation de dette, par exemple. C’est important de le signaler parce que, dans certains chiffres que l’honorable membre a cités, notamment repris dans la presse, il y a clairement eu une confusion avec l’octroi du tarif social fédéral et des mesures complémentaires régionales.

    La réunion du 27 octobre a été l’occasion de rappeler ces éléments, de faire le point sur les pratiques des CPAS, et de clarifier la procédure appliquée par le CPAS de Liège qui ne procède en réalité pas à un octroi automatique de la protection, contrairement à ce qui a été dit, sur base des deux critères que je viens de mentionner.

    Il s’agit de critères visant à faciliter l’analyse de la situation par le travailleur social, mais pas de critères d’octroi automatique. La situation globale du ménage est prise en considération, dont le revenu global, l’existence de revenus locatifs, et cetera. Il ne doit pas y avoir d’octroi à deux vitesses au sein des CPAS.

    Les échanges ont eu lieu avec la Fédération des CPAS, mais pas avec l’UVCW. Nos analyses se rejoignent et nous restons évidemment en contact rapproché pour assurer le suivi de ce dossier. Nous n’avons pas établi de circulaire, car la pratique des CPAS est balisée par plusieurs lois fédérales et parce que nous ne voulions pas compliquer la tâche des assistants sociaux en ajoutant une nouvelle série de critères à prendre en compte pour l’analyse de la situation des ménages.

    Nous continuons toutefois nos échanges avec la Fédération des CPAS sur ce point.

    Le critère de 10 % de part de facture d’énergie dans le revenu global du ménage, déduction faite du coût du logement, est utilisé par la Fondation Roi Baudouin pour l’élaboration du baromètre de la précarité énergétique. D’après ce baromètre, en Wallonie, ce sont 23 % des ménages qui remplissaient ce critère en 2020. Les éléments à notre disposition ne permettent pas de savoir quelle part de ces ménages dispose déjà du tarif social ni dans quelle mesure ce chiffre a évolué suite à la crise des prix de l’énergie.

    À l’heure actuelle, environ la moitié du budget prévu pour la mesure a été utilisée. Un monitoring rapproché est mis en place avec les gestionnaires de réseau pour suivre au plus près l’évolution du nombre de bénéficiaires et la consommation budgétaire. Mes services analysent également la possibilité de dégager des moyens complémentaires pour ce dispositif. Sur base du montant actuel de l’intervention forfaitaire, je rappelle que le décret prévoit par contre que l’on agit bien dans la limite des crédits disponibles, la protection conjoncturelle pourrait soutenir 14 000 ménages en électricité et 3 570 ménages s’ils sont également alimentés en gaz.

    Comme l’honorable membre peut le voir, la marge de manœuvre est plus ou moins importante en fonction du type de bénéficiaires. C’est pourquoi il est fondamental, et c’est le message qui a été adressé également au CPAS, que ce dispositif aille vers les personnes les plus en état de besoin.

    J’ai d’ailleurs eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises : les seules mesures régionales ne suffiront pas à soutenir les ménages face à ces circonstances d’augmentation des prix de l’énergie.

    Les principaux leviers se trouvent aux niveaux européen et fédéral. Les travaux sont toujours en cours sur un dispositif de blocage au niveau européen. Ma collègue fédérale est d’ailleurs très active à ce niveau dans les discussions internationales.

    Plusieurs mesures d’aides directes ont également été décidées par les autorités fédérales qui vont venir réduire le montant de la facture d’électricité des ménages dans les prochaines semaines. Les aides directes pour les ménages qui se chauffent au mazout ou aux pellets sont également mises en place.

    Sur ce dossier, la discussion a eu lieu de manière rapprochée avec les CPAS, elle va se poursuivre pour veiller à ce qu’il y ait bien une égalité de traitement à l’échelle de la Wallonie, mais que l’on s’inscrive bien dans le cadre du décret, c’est-à-dire une analyse de la situation de besoins pour faire en sorte que les personnes qui en ont le plus besoin puissent en bénéficier avant que les moyens budgétaires ne permettent plus d’utiliser, le cas échéant, de dispositif.