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La réduction du temps de transport des animaux et les recommandations de l’Autorité européenne de la sécurité des aliment (EFSA)

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 159 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 17/11/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Un avis émis, le 25 octobre, par l'Autorité européenne de la sécurité des aliments (EFSA) préconise de réduire la durée des transports des animaux afin de limiter le risque de propagation de la résistance aux antimicrobiens (RAM).

    Outre que cette réduction des délais de transport ne peut qu'améliorer le bien-être des animaux, des temps de transport plus longs permettent une plus grande prolifération des bactéries et leur transmission entre animaux !

    Le rapport recommande aussi le nettoyage complet des véhicules, des équipements et des espaces où les animaux sont chargés et déchargés pendant le transport. Il recommande aussi l'utilisation des abattoirs mobiles pour limiter la durée du transport et le stress lié à celui-ci, ainsi que le délai entre la prise de l'animal et l'abattage, si les exigences en matière d'hygiène alimentaire et d'autorisation peuvent être respectées.

    Il est à noter que des études scientifiques sur la question de la propagation de la RAM parmi les animaux pendant le transport font défaut, notamment des lacunes au niveau des données et des recommandations pour de futures recherches.

    Ce rapport intervient au moment où la Commission européenne prépare une législation tertiaire visant à améliorer les contrôles officiels des navires de transport du bétail, en envisageant son adoption à la fin de cette année.

    Madame la Ministre est-elle au courant de ces développements européens ?

    La Région peut-elle jouer un rôle concernant les lacunes mentionnées ci-dessus ?

    Quelle est la politique suivie en la matière sur le territoire wallon et où se situe le siège de celle-ci dans l'arsenal législatif ?

    Les pratiques wallonnes sont-elles conformes aux recommandations de l'avis de l'EFSA suscité ou devront-elles faire l'objet d'adaptations ? Lesquelles ? Quid des abattoirs mobiles ?

    Quelle est l'autorité chargée du respect et de la surveillance des règles ?

    Des verbalisations sont-elles intervenues par le passé ?

    Avec quelle fréquence, quel volume et quelles suites ?
  • Réponse du 15/12/2022
    • de TELLIER Céline
    Le rapport de l’EFSA porte effectivement sur la question de la propagation de la résistance aux antimicrobiens pendant le transport des animaux de production agricole.

    Les conclusions indiquent que le stress subi par les animaux pendant le transport joue un rôle évident et qu’une réduction de la durée du transport constitue une mesure efficace pour réduire la transmission de ces bactéries résistantes. Cette étude reste centrée sur l’aspect sanitaire, bien que les impacts sur le bien-être animal sont évidents.

    Les conclusions de cet avis viennent ainsi compléter l'avis scientifique récemment publié par l'EFSA concernant les recommandations pour améliorer le bien-être des animaux pendant le transport, même s’il n’a pas pour objectif direct d’améliorer le bien-être animal. Dans cet avis centré sur le bien-être des animaux, Monsieur Guilhem de Seze, responsable de l'évaluation des risques à l'EFSA a déclaré ceci : « Les bonnes pratiques en matière de bien-être animal permettent non seulement de réduire les souffrances inutiles, mais elles contribuent également à renforcer la santé des animaux. Il s'agit donc d'un élément clé pour la sécurité de la chaîne alimentaire, compte tenu des liens étroits qui existent entre le bien-être et la santé animale et les maladies d'origine alimentaire, selon le principe « une seule santé (One health) » auquel l'EFSA est attachée ».

    Pour ce qui concerne la compétence régionale en matière de bien-être animal, le 13 octobre dernier, le Gouvernement wallon a adopté en première lecture un avant-projet d’arrêté relatif à la protection des animaux pendant le transport commercial, dans les postes de contrôle et dans les centres de rassemblement.

    Ce texte propose notamment des conditions de maitrise de la température lors des périodes climatiques exceptionnelles que nous connaissons de plus en plus régulièrement.

    La durée du transport est encadrée par le Règlement européen. Notre territoire ne permet pas d’effectuer des trajets de longue durée sans franchir des frontières. Il est à souligner que la Commission européenne s’est engagée à réviser la règlementation en matière de transport des animaux en 2023. La Wallonie s’en est réjouie et a soutenu cette initiative, que je suivrai de près.

    Pour ce qui concerne les abattoirs mobiles, j’ai lancé, avec mon collègue Willy Borsus, une étude sur les possibilités de développement de l'abattage à la ferme. Cette étude a été réalisée durant l’année 2021 par l’Université de Liège et le rapport final est disponible sur le portail du bien-être animal. Les résultats ont fait l’objet d’une restitution en avril dernier, à travers l’organisation d’un moment d’échange avec le secteur agricole et le monde académique.

    Les résultats de cette étude peuvent être résumés comme suit :
    - techniquement, l’abattage à la ferme est réalisable sous de nombreuses formes. La tendance laisse penser que des technologies vont encore se développer dans un avenir proche ;
    - socialement, l’idée d’abattre les animaux dans leur lieu de vie fait quasiment l’unanimité en Wallonie. Beaucoup d’éleveurs ont démontré leur intérêt pour une telle pratique, pour des raisons de bien-être animal. Au niveau des abattoirs wallons, certains ont marqué clairement leur intérêt, sans qu’il n’y ait d’opposition ou de crainte. Il s’agit ici d’un signal positif, contrairement à l’opposition qui a pu être observée dans d’autres pays. Cet aspect est particulièrement important, étant donné que les abattoirs constituent des partenaires importants pour la mise en place de cette pratique ;
    - d’un point de vue environnemental, certaines exigences régionales peuvent être contraignantes, mais ne sont pas insurmontables ;
    - d’un point de vue sanitaire, il a pu être prouvé dans les expériences passées qu’un animal abattu à la ferme pouvait produire une viande de qualité organoleptique et sanitaire au moins semblable à celle d’un animal abattu classiquement. Néanmoins, il semble que certains doutes persistent à cause d’un manque de données officielles sur les délais entre la saignée et l’éviscération, et leur conséquence sur la contamination microbiologique de la viande. Pour mieux aborder les aspects sanitaires en général, des discussions avec l’ASFCA sont nécessaires ;
    - d’un point de vue économique, toute forme d’abattage à la ferme engendre un surcoût par rapport au prix d’un abattage classique, qui se répercute donc au moins en partie sur le coût de la viande.

    De manière globale, il ressort que c’est l’abattage à la ferme d’ongulés domestiques via une unité mobile d’abattage couplée à un transport de la carcasse vers un abattoir fixe qui rencontre la meilleure faisabilité et répond à une forte demande du terrain.

    Cette étude a également mis en avant la nécessité de procéder à des recherches complémentaires. Notamment, avant toute mise en place concrète d’un projet pilote d’abattoir mobile suivi du transport de la carcasse vers un abattoir fixe, il est nécessaire de résoudre le principal frein sanitaire et de fixer un délai réaliste entre la saignée et l’éviscération. Ce délai, fixé par l’AFSCA, est actuellement de 45 minutes.

    C’est pourquoi, avec mon collègue Willy Borsus, j’ai établi une convention de recherche avec l’Université de Liège pour qu’elle poursuive la recherche dans ce sens. L’objectif étant de faire ensuite valider auprès du Comité scientifique de l’AFSCA la possibilité d’un allongement du délai entre la saignée et l’éviscération, essentiel au développement de l’abattage à la ferme.

    L’autorité chargée du respect et de la surveillance des règles en matière de bien-être des animaux durant le transport est le Service public de Wallonie, via l’Unité du Bien-être animal. Le SPW a également signé un protocole avec l’AFSCA qui prévoit que l’AFSCA effectue les contrôles routiers en première ligne et que les éventuelles mesures jugées nécessaires sont prises par les services compétents.

    Dans les cas d’échanges et d’exportation d’animaux vivants vers l’étranger, il existe un système de certification au départ qui reprend notamment des exigences relatives au bien-être des animaux, comme la vérification du plan de route prévu. Cette certification est réalisée par l’AFSCA ou les vétérinaires qu’elle charge de mission.

    Pour l’année 2021, la Wallonie a enregistré 327 contrôles de transport de bovins, 16 de porcs, 152 de chevaux et 13 d’autres espèces. Ces contrôles sont effectués essentiellement lors de l’arrivée des animaux à l’abattoir et au poste de contrôle frontalier de Bierset. En ont résulté : un cas de refus d’exportation, un cas suivi de procès-verbal et un cas suivi d’un avertissement.