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Les neuf plaintes déposées contre les régions en raison de la qualité de l’air

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 163 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 17/11/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Neuf citoyens ont déposé plainte contre les trois régions du pays pour dénoncer la mauvaise qualité de l'air qu'ils respirent en Belgique. D'après eux, les autorités régionales manquent à leur responsabilité de protéger la santé de la population contre les niveaux dangereux de polluants atmosphériques, tant en Wallonie qu'en Flandre et à Bruxelles. Selon leurs arguments, les seuils en vigueur chez nous seraient le reflet d'une science dépassée avec des niveaux jusqu'à quatre fois supérieures à ceux recommandés par l'OMS.

    Deux semaines avant le dépôt de cette plainte à Bruxelles, le Conseil d'État français a publié un jugement demandant au gouvernement de payer deux amendes de 10 millions d'euros pour avoir enfreint les limites de pollution atmosphérique. Notons aussi une affaire similaire en Allemagne récemment.

    Entretemps, la Commission européenne a dévoilé sa proposition de révision de la principale législation communautaire régissant la qualité de l'air, celle qui fixe les seuils de qualité pour les 27. Son application n'est pas pour demain tant le processus de finalisation, de transposition et de mise en œuvre prendra du temps, certainement plusieurs années.

    Selon les dernières statistiques annuelles disponibles, en 2021, les concentrations de particules fines mesurées dans les trois régions étaient régulièrement entre deux et trois fois supérieures aux recommandations de l'OMS, plus de quatre fois supérieures pour ce qui concerne le dioxyde d'azote dans les grandes villes. C'est effrayant !

    Je n'attends pas de Madame la Ministre qu'elle donne tort ou raison aux plaignants. Toutefois, doit-on réellement attendre une nouvelle législation européenne pour imposer des seuils plus adéquats pour préserver la santé de nos concitoyens ?

    Ne peut-on pas être proactif en la matière en Wallonie ?

    En Région de Bruxelles-Capitale, une étude associant 3000 citoyens nommée « Curieuzenair » a permis de cartographier rue par rue la concentration de dioxyde d'azote sur plusieurs mois. Les résultats sont édifiants pour ne pas dire catastrophiques. Une telle étude pourrait-elle être menée en Wallonie ou, tout du moins, dans les centres urbains plus sujets au trafic automobile ?

    Outre la cellule interrégionale Celine, quels organismes surveillent la qualité de l'air en Wallonie ?

    Quel est leur pouvoir en cas d'alerte ou de dépassement ?
  • Réponse du 21/02/2023
    • de TELLIER Céline
    Pour ce qui concerne les questions relatives aux plaintes, des réponses ont été apportées en Commission environnement le 8 novembre ainsi qu’en réponse écrite aux questions similaires et récentes.

    Concernant la décision du Conseil d’État français, ce jugement est intervenu parce que la France, comme d’autres États membres, ne parvient toujours pas à respecter les valeurs limites fixées par la directive européenne de 2008. Ce qui n’est pas le cas de la Région wallonne.

    Les nouveaux seuils recommandés par l’OMS sont beaucoup plus stricts que les seuils européens actuels. Il est exact qu’en 2021, les concentrations enregistrées par les 24 stations du réseau télémétrique dépassent les nouveaux seuils recommandés par l’OMS. Ces seuils sont très ambitieux, en particulier en ce qui concerne le NO2 et les PM2.5. En 2021, seules 9 des 21 stations ayant mesuré le dioxyde d’azote respectent le seuil de 10 µg/m³, le maximum enregistré atteint 23 µg/m³ annuels. Quant aux particules fines PM2.5, seules 3 des 25 stations wallonnes respectent le seuil des 5 µg/m³, le maximum enregistré atteint 14 µg/m³ annuels.

    Il ne peut être ignoré que le respect ou l’approche des recommandations de valeurs limites proposées par l’OMS pour les PM2.5 et des NOx nécessiteront la mise en place de mesures particulièrement strictes en matière de transport, d’agriculture et de chauffage, dont l’enjeu est d’autant plus critique à l’heure de la crise énergétique.

    En ce qui concerne les PM2.5, il est important de préciser que les concentrations mesurées en Wallonie proviennent pour 60 à 80 % de particules importées. Il est donc essentiel que les mesures soient prises à l’échelle européenne et pas uniquement régionale.

    Considérant ces arguments, ma volonté est donc d’atteindre les seuils OMS en 2050, et nous étudions la faisabilité de les atteindre en 2040. Mon administration et moi-même travaillons d’ores et déjà à la proposition et l’adoption de mesures ambitieuses dans le cadre du Plan Air Climat Énergie afin de s’approcher un maximum des recommandations de l’OMS.

    Mes services sont bien au fait de l’étude Curieuzenair. Cette campagne a été réalisée avec les citoyens pour mieux cartographier les concentrations de dioxyde d’azote pendant un mois grâce à l’utilisation de tubes passifs. Cette étude a également pour but de valider les cartographies à fine échelle de la qualité de l’air.

    En Wallonie, plusieurs campagnes de mesures du NO2 par tubes passifs ont lieu régulièrement dans les agglomérations les plus polluées. Ces campagnes sont réalisées par l’ISSeP en coordination avec l’AwAC, sur une longue période pour s’assurer de la représentativité des mesures et évaluer l’évolution des concentrations. Une cinquantaine de tubes passifs NO2 sont ainsi déployés en continu depuis 2014 dans la ville de Namur. Pendant toute l’année 2021, deux campagnes ont également eu lieu à Liège (50 tubes) et Charleroi (75 tubes). D’autres campagnes plus courtes sont également réalisées, toutes ces mesures sont utilisées pour améliorer et valider les cartographies à fine échelle de la pollution. Ces cartographies annuelles sont réalisées chaque année, à l’échelle de 10m, et permettent d’identifier les hotspots de pollution.

    En Wallonie, outre la cellule interrégionale CELINE, l’ISSeP (Institut scientifique de service public) et l’AwAC (Agence wallonne de l’Air et du Climat) sont des acteurs importants de surveillance de la qualité de l’air. En cas de pic de pollution prévu par la cellule CELINE, l’AwAC est responsable de la coordination régionale de la mise en œuvre de mesures à court terme, en partenariat avec le centre régional de crise.

    En cas de dépassement mesuré des seuils annuels de pollution, l’AwAC est également responsable de la mise en œuvre d’un plan AIR spécifique visant la réduction à long terme des émissions dans la zone concernée.