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La demande de Test Achats de créer un outil pour contrôler le montant des acomptes des factures d'énergie

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 268 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 18/11/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    Depuis l'avènement de la crise ukrainienne, on constate que les prix de l'énergie ont drastiquement augmenté en Europe bien que les derniers jours nous permettent de voir quelques lueurs d'espoir avec la diminution des prix du gaz après l'accord européen.

    Au mois d'août, le prix de l'énergie était de 345 euros par MWatt/heure alors que maintenant le prix est en dessous des 100 euros à la bourse de Rotterdam.

    Cependant, la répercussion de cette baisse sur les factures des consommateurs ne se fera ressentir que dans plusieurs mois selon la condition qu'elle se poursuit dans le temps.

    Cette baisse pourrait se faire ressentir promptement si le contrat était indexé. Si le contrat est indexé sur la base d'une période trimestrielle, les prix sont déterminés via les prix élèves de cet été. On constatera la différence qu'à partir de l'année prochaine.

    En revanche, si le contrat est indexé tous les mois, la différence va se faire ressentir plus rapidement sur les factures.

    Test Achats, a alors suggéré qu'on mette à disposition des consommateurs un outil qui permettrait de contrôler le montant de l'acompte réclamé par les fournisseurs d'énergie. L'organisation demande à tous les fournisseurs de mettre en ligne, un outil qui permet aux consommateurs de saisir les relevés de leur compteur pour suivre leur consommation.

    Cet outil semble nécessaire en vue de la situation déplorable où certains fournisseurs se sont empressés de multiplier les montants d'acompte de certains consommateurs, du fait de l'augmentation des prix.

    Quelle est la position de Monsieur le Ministre ?

    La Région wallonne et la CWaPE peuvent-elles réfléchir voire collaborer sur la création d'un tel outil ? Quels sont les obstacles ?

    La Région wallonne se concerte-t-elle avec les fournisseurs d'énergie qui n'ont pas proposé d'adaptation des acomptes malgré la baisse des tarifs ?

  • Réponse du 17/01/2023 | Annexe [PDF]
    • de HENRY Philippe
    Le consommateur règle en une fois, à son fournisseur, les montants qui composent sa facture d’énergie, selon le principe de la cascade tarifaire : coût de l’énergie proprement dite avec éventuellement coûts des certificats verts en électricité, coûts de réseau (coûts de distribution et de transport) et les taxes et redevances.

    La facturation de ces coûts est encadrée par les textes légaux et règlementaires, tant au niveau fédéral que régional. La facture de régularisation doit être émise au minimum une fois par an. Les factures d’acompte font en sorte que la facture de décompte (de régularisation) que le consommateur devra payer pour l’énergie consommée jusqu’au relevé de compteur soit répartie uniformément sur une période de 12 mois : les factures d’acompte ont également pour but d’atténuer autant que possible le choc d’une facture de décompte élevée pour les consommateurs.

    La législation fédérale encadre le principe des acomptes (article 18, § 2/1, de la loi Électricité et article 15/5bis, § 11/1, de la loi Gaz). Les acomptes, leur mode de calcul et le contrôle des paramètres d’indexation intervenant dans les formules à prix variables, sont une compétence du régulateur fédéral, la CREG.

    L’accord du consommateur (« Accord- Le consommateur dans le marché libre de l’électricité et du gaz », non signé par certains fournisseurs, notamment Octa+, Cociter, Bolt) entré en vigueur en 2005 et révisé en 2018, réaffirme ce qui est mentionné dans les lois Électricité et Gaz :

    « Le fournisseur d’énergie convient avec le consommateur des modalités relatives à ses acomptes, il s’agit donc bien d’un élément qui relève de la relation commerciale entre le fournisseur et son client. »

    En pratique, après chaque relevé d’index, la facture de régularisation permet de facturer et clôturer la période de consommation, de rectifier les montants dus, à la hausse ou à la baisse, et de déterminer la consommation de référence qui servira de base au calcul de l’acompte de la période suivante.

    L’objectif des factures d’acomptes (qui n’est décrit cependant dans aucun texte), et la bonne pratique attendue des fournisseurs sont donc de limiter l’impact de la facture de régularisation sur le consommateur, en visant une facture de régularisation la plus proche de zéro possible.

    Comme indiqué dans les décrets électricité et gaz, on parle donc d’adaptation d’acompte (notamment au moment de la régularisation), avec un lissage de la consommation sur 12 mois. Cela implique donc que le montant du prix de l’énergie utilisé pour calculer l’acompte doit viser une période équivalente à la période couverte par la consommation.

    Pour déterminer le montant de l’acompte, les fournisseurs calculent le montant global de la facture annuelle estimée, et divisent ce montant global par la périodicité des acomptes (généralement 12 mois). Dans cet exercice, les fournisseurs sont cependant confrontés à deux données inconnues, qu’ils doivent alors estimer : la consommation, et le prix (en l’absence de prix fixes) à appliquer à cette consommation.

    En effet, le calcul de l’acompte se base sur plusieurs éléments :
    - l’évolution de la consommation du client, impactée par la répartition de la consommation au fil des mois sur la base d’un profil type (matérialisé par les coefficients RLP publiés par Synergrid). Le fournisseur estimera la consommation annuelle sur la base du dernier relevé de compteur du GRD, sauf s’il reçoit des prévisions de consommation annuelle par le client ;
    - l’évolution du prix de l’électricité et du gaz naturel sur les marchés de gros ;
    - l’évolution attendue des tarifs de réseau et les taxes et prélèvements éventuels.

    Le mode de calcul de l’acompte doit être repris dans le contrat (article 18, § 2/1, alinéa 2, 1°, de la loi Électricité et article 15/5bis, § 11/1, alinéa 2, 1°, de la loi Gaz). Cependant le choix de la valeur du paramètre d’indexation utilisé dans la formule de prix variables (valeur historique ou valeur prévisionnelle), choix déterminant pour le résultat final du calcul, n’est actuellement précisé nulle part.

    Un travail sur les paramètres d’indexation est intervenu il y a quelques années pour décorréler le prix du gaz des paramètres pétroliers. Aujourd’hui, la CREG est chargée du contrôle de la bonne application des paramètres d’indexation conformément aux articles 20bis de la loi Électricité et 15/10bis de la loi Gaz.

    Cela implique que le fournisseur peut utiliser la liberté qui lui est accordée, dans les limites qui sont prévues par le législateur, pour choisir la valeur du paramètre d’indexation qu’il fait intervenir dans sa formule de prix. Un rapide sondage effectué sur les sites internet des fournisseurs nous montre qu’il n’y a pas d’uniformité pour le choix du paramètre d’indexation entre les fournisseurs. Ce point rejoint la très récente adaptation du comparateur, l’adoption d’un paramètre commun de référence, pour les prix sur les marchés « spot » et sur les marchés « forward ».

    Exemple en annexe de paramètres différents pour le marché du gaz :

    Les deux bâtonnets de droite sont les indices « prévisionnels » utilisés dans le comparateur, le bâtonnet de gauche est la valeur de l’indice ZTP pour le mois d’octobre 2022.

    Un consommateur qui voit son acompte estimé pour les douze mois suivants sur la base d’une valeur aussi basse du paramètre d’indexation ZTP aura certes un acompte moins élevé, mais risque de devoir compléter largement ses paiements au moment de la régularisation.

    En cas de forte augmentation des cotations de prix pour la période de consommation, le montant de l’acompte peut actuellement être revu à la hausse afin d’éviter une mauvaise surprise pour le consommateur au moment de la facture de décompte. À l’inverse, en cas de forte baisse des cotations de prix pour la période de consommation, le montant de l’acompte peut être revu à la baisse.

    Trois options se présentent alors :
    - si le montant résultant du calcul est proche du montant de l’acompte initialement fixé, le fournisseur ne proposera pas d’ajustement, celui-ci n’étant apparemment pas nécessaire ;
    - si le montant résultant du calcul est (significativement) supérieur au montant de l’acompte initialement fixé, le fournisseur pourra augmenter ce dernier en conséquence ;
    - si le montant résultant du calcul est (significativement) inférieur au montant de l’acompte initialement fixé, le fournisseur pourra réduire ce dernier en conséquence. Le cas échéant, le fournisseur devra être en mesure de présenter le calcul de l’ajustement de l’acompte au consommateur qui en ferait la demande (article 18, § 2/1, alinéa 2, 3°, de la loi Électricité et article 15/5bis, § 11/1, alinéa 2, 3°, de la loi Gaz).

    Il est essentiel de noter que les clients peuvent à tout moment adapter leurs acomptes d’initiative et ont la faculté de refuser l’adaptation d’acompte proposée par le fournisseur. (loi Électricité article 18, § 2/1, alinéa 2, 2° et 4° et article 15/5bis, § 11/1, alinéa 2, 2° et 4°, de la loi Gaz).

    Dans son rapport sur l’évolution des prix en octobre 2022((RA)2305/10 , la CREG propose une piste de méthode de calcul alternative pour les acomptes.

    Extrait de ce rapport : « La CREG est favorable, pour des produits variables, à des avances périodiquement (trimestriellement) automatiquement ajustables, sur la base d’un certain nombre de critères et en fonction de l’évolution des marchés de gros. Cela peut contribuer à faire en sorte que les avances payées tiennent mieux compte de la réalité des marchés de l’énergie et peut potentiellement éviter des mauvaises surprises au moment de la facture de régularisation. La CREG rentrera en concertation avec les associations de consommateurs à ce sujet. »

    En ce qui concerne la possibilité de développer un outil visant à contrôler la bonne application des acomptes par les fournisseurs, il y a lieu de relever que le développement d’un tel outil par des instances régionales est peu réaliste en l’état actuel de la législation et eu égard aux règles répartitrices de compétences.

    En effet, si la législation régionale aborde au titre d’obligations de service public, les éléments qui doivent être repris dans l’acompte, et précise certaines obligations tant du fournisseur que du GRD, les modalités de calcul, de modification et d’adaptation de l’acompte sont abordées dans la législation fédérale et relèvent essentiellement de la compétence de la CREG. Une approche fédérale de la matière paraît d’ailleurs la plus praticable pour le secteur.

    La CWaPE peut, à son niveau, relayer les demandes de contrôle accru de l’acompte auprès de ses collègues régulateurs, c’est d’ailleurs l’objet des réunions périodiques du FORBEG, dans un sous-groupe dédié au consommateur et au marché.

    Un des éléments indispensables à un éventuel outil de contrôle est la règle précise à suivre quant au calcul de l’acompte, tant au niveau de la consommation annuelle prise en compte qu’au niveau du choix de la valeur du paramètre d’indexation, et une telle règle devrait être définie au niveau fédéral par la CREG.

    Il est en outre important de s’appuyer sur la proposition récente de la CREG de réviser l’acompte trimestriellement : cette adaptation pourrait s’accompagner de recommandations au niveau de l’évaluation de l’acompte. La récente note de la CREG évoque d’ailleurs la possibilité de mettre en place un plafond à l’adaptation automatique du montant de l’acompte.

    Enfin, il convient d’insister sur le changement récent de la législation fédérale : la Loi du 28 février 2022 portant des dispositions diverses en matière d’énergie prévoit au chapitre 2, article 3 la possibilité pour le fournisseur et le client résidentiel, dans le cadre du mode de calcul convenu, de modifier le montant des acomptes à tout moment

    la CWaPE peut agir à son niveau et communiquer aussi largement que possible sur ces dernières dispositions, tant au niveau du site web qu’à travers les informations régulières organisées avec les acteurs de terrain, notamment la Fédération des CPAS.