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Les conclusions de la COP27

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 306 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 24/11/2022
    • de KAPOMPOLE Joëlle
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    La COP27 s'est clôturée sous de timides applaudissements qui témoignent de son échec, indique Monsieur Alok Sharma, Président de la COP26 de Glasgow, sur l'absence de la poursuite des engagements pour continuer à atténuer le réchauffement climatique et sortir progressivement de l'utilisation des énergies fossiles.

    Seule, l'idée d'un Fonds d'indemnisation des pays du sud a fait l'unanimité. À ce propos, il convient encore de déterminer les modalités de ce fonds, qui va l'alimenter, comment il va être réparti, sur base de quels critères, etc.

    Monsieur le Ministre peut-il m'expliquer quelle position a-t-il défendue à cette conférence des Parties ?

    De quelle manière la Wallonie va-t-elle participer au Fonds de dédommagement des pays du sud ?

    Comment les moyens mobilisés seront-ils répartis ? Selon quels paramètres ?
  • Réponse du 29/12/2022
    • de HENRY Philippe
    Le financement de l’indemnisation et de la réparation des effets néfastes du dérèglement climatique était comme l’honorable membre le sait l’un des enjeux principaux des négociations lors de la COP27, en équilibre bien entendu avec la nécessité de renforcer les efforts communs pour atténuer le réchauffement climatique et, de manière plus particulière, avec la nécessité pour toutes les parties de réduire drastiquement leurs émissions de gaz à effet de serre.

    Le refus des pays en développement de progresser en matière d’atténuation lors de cette COP est extrêmement dommageable pour l’avenir de la planète telle que nous la connaissons actuellement et cela concourt bien sûr à ce que je considère l’accord de la COP27 comme totalement bancal. J’aurais en effet souhaité voir, à côté de cette belle avancée en matière de pertes et préjudices, plus d’ambition en matière d’atténuation avec notamment une claire inscription dans l’accord, de la nécessité absolue d’une sortie rapide des énergies fossiles. Un des autres points majeurs négatifs lors de cette COP est que ces mêmes pays en développement n’ont pas voulu reconnaître l’importance capitale, ni même discuter, de l’idée que tous les investissements financiers privés et publics soient cohérents avec les objectifs de l’accord de Paris. L’Union européenne devra plaider sans faiblir pour que ce point soit inscrit à l’agenda de la prochaine COP28.

    Cela dit, dès le début de la COP, je me félicitais que les discussions sur comment financer les pertes et préjudices aient enfin été mises à l’agenda officiel de la COP. C’était un prérequis essentiel, car sans agenda officiel, pas d’obligation de négociation. Or l’on sait que certaines Parties, pays développés en particulier, étaient réticentes à parler des pertes et préjudices. Pour alimenter le débat sur cette matière, la Wallonie avait organisé un évènement sur les pertes et préjudices lors de la COP27, au Pavillon Benelux-BEI, le lundi 14 novembre. Finalement, cette COP27 aura permis d’établir un mécanisme de financement structurel spécifique pour répondre aux pertes et dommages. La création de ce fonds pour les pertes et préjudices est en effet une avancée historique pour les pays les plus vulnérables. Elle est le symbole concret de la reconnaissance d’un financement pour les pertes et préjudices, les dégâts du réchauffement auxquels on ne peut plus s’adapter.

    La Wallonie était ouverte à l’établissement d’un fonds de ce type sans pour autant attendre qu’il soit créé pour agir, puisque ce type de fonds ne permet nullement de venir en aide dans l’immédiat aux pays vulnérables et donc de répondre à l’urgence de la crise climatique. Pour la Wallonie, cet accord de principe doit permettre d’avancer au plus vite vers la création et la mise en place de ce fonds tout en mettant d’emblée en œuvre un plan d’action au travers de financements concrets, directs et immédiats. Pour la Wallonie, ces deux types de démarches sont donc complémentaires et à mener en parallèle.

    Si les modalités pratiques de mise en place doivent encore être déterminées et si les critères de sélection des bénéficiaires et projets, ainsi que les paramètres de répartition entre les bénéficiaires restent à définir, d’emblée notre position est claire pour que ce nouveau mécanisme de financement structurel (souvent appelé « Fonds ») doive être basé sur le principe de justice ou solidarité climatique et d’équité, mais aussi de responsabilité réciproque et partagée entre les pays développés et les pays en développement par rapport à leurs émissions historiques, actuelles et projetées dans le futur.

    Pour garantir ce principe, nous devons notamment fixer des critères qui désignent uniquement les pays les plus vulnérables en tant que bénéficiaires exclusifs du financement « Pertes et Préjudices ». En effet, l’un des points de tension lors de cette COP27 était de savoir qui pourrait bénéficier des financements. Pour les pays développés, particulièrement l’Union européenne, le fonds devait être érigé pour répondre aux besoins des pays les plus vulnérables. La formulation de compromis rend actuellement éligibles « les pays en développement, particulièrement ceux vulnérables aux effets du réchauffement climatique ». Cette proposition permet de ne pas réduire le champ d’application du fonds aux seuls pays moins avancés (PMA) ou aux petits États insulaires en développement (PEID), mais de l’étendre à tous les pays en développement, tout en reconnaissant que la notion de vulnérabilité restait centrale et qu’elle devait être affinée. D’autre part se posait la question de savoir qui allait contribuer à ce fonds : les pays développés, responsables historiques ? Ces mêmes pays, rejoints par les plus gros émetteurs tels que la Chine ou l’Inde ? La question de l’élargissement de la base des contributeurs n’est pas nouvelle et s’invite régulièrement lors des négociations climatiques. La Chine en particulier, et d’autres pays à économie émergente, ont pollué les débats, avec une certaine confusion entre les pays véritablement victimes des dégâts climatiques et les pays émergents tels qu’ils sont définis depuis 30 ans maintenant. N’oublions pas par exemple que l’Arabie Saoudite va dépenser des centaines de milliards de dollars pour organiser des jeux d’hiver dans son pays, mais qu’elle estime par ailleurs ne pas devoir contribuer au financement climatique internationale, en sa qualité dit-elle de pays pauvre !

    Comme évoqué ci-avant, si rien n’est encore décidé - la majorité des questions contentieuses ayant été transférées à un comité de transition, qui a pour mandat de mettre le fonds sur pied en amont de la COP28 en 2023 -, notre interprétation est que ce financement sera dédié dans tous les cas aux pays les plus vulnérables. Et nous serons attentifs et fort vigilants à ce que ce point soit confirmé par la suite. Ce serait donc au comité de transition de suggérer les modalités de financement pour le futur fonds.

    De la même manière, ces mêmes pays doivent selon moi être exclus des pays bénéficiaires de ce fonds Pertes et préjudices. On pense notamment une fois de plus à la Chine et à l’Inde, en particulier.

    De plus, les projets à financer doivent garantir une cohérence avec les besoins exprimés sur le terrain par les communautés locales. Il est en effet essentiel que les besoins et demandes du pays partenaire soient à la base des projets et des décisions qui en découlent.

    Par ailleurs, un autre élément à prendre en compte dans l’analyse de ces contributions au financement des pertes et préjudices est le fait qu’elles ne sont majoritairement pas additionnelles à l’aide au développement. Cela revient dans les faits à requalifier de l’argent déjà mis sur la table, pour des projets d’adaptation par exemple, en financement pour les pertes et préjudices, sans s’engager à des financements nouveaux.

    Je ne manquerai pas de faire valoir ces points qui sont cruciaux pour moi en les répétant lors de chaque prise de position et, plus particulièrement encore, lors de la préparation de la position belge pour la prochaine conférence des Parties.

    La Wallonie ne participera éventuellement dans le futur à ce fonds que si elle a bien entendu toutes les garanties que ce nouveau mécanisme de financement n’est pas une coquille vide qui fait la part belle à des pays pour lesquels ces moyens financiers ne se justifient pas.