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Le développement de l’écosystème "Columbus" à Charleroi

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 199 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 05/12/2022
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Un projet industriel, « Columbus », va prochainement voir le jour grâce à la collaboration entre les entreprises Carmeuse, John Cockerill et Engie, à Charleroi.

    Il s'agit d'un projet basé sur la décarbonation de la production de la chaux et la fabrication en bout de ligne d'un e-méthane. Il s'agirait de capter les émissions polluantes au lieu de libérer du CO2 dans l'air, ce qui pourrait alors faire baisser l'empreinte de Carmeuse vis-à-vis de son activité, notamment dans les carrières situées dans la région de Couvin ou à Aisemont.

    Le projet devrait être capable de capter 100 % du CO2 rejeté. Il deviendrait la pièce maîtresse pour fabriquer de l'e-méthane dont les propriétés sont équivalentes à celles du gaz. Capturé, le CO2 sera combiné à de l'hydrogène vert qui sera produit par les électrolyseurs installés sur place par John Cockerill. La combinaison des deux donnera naissance à de l'e-méthane.

    Le projet devrait être opérationnel pour 2026, et réplicable sur d'autres sites. D'ailleurs, une lettre d'intention a d'ailleurs déjà été signée avec Aperam, Thy-Marcinelle, Industeel et également avec le transporteur maritime CMA CGM, pour une collaboration au sein du projet.

    Un tel projet en Belgique est une pièce importante pour nos efforts de décarbonation et doit être scruté avec attention par nos responsables politiques !

    Néanmoins, il reste la question du financement. Les sociétés Carmeuse, Cockerill et Engie l'ont rappelé aux autorités publiques. Évalué à 300 millions, le business plan compte sur 50 % de financement public.

    Monsieur le Ministre est-il au courant de ce projet industriel d'ampleur ?

    Peut-il nous en dire plus sur l'agenda de ce projet ?

    Qu'en est-il de collaborations entre industriels ?

    A-t-il pris connaissance des revendications financières exprimées par lesdites sociétés ?

    La Région wallonne compte-t-elle proposer un quelconque soutien financier ?

    Quelles seraient les retombées économiques, environnementales et climatiques pour la Région ?
  • Réponse du 22/12/2022
    • de BORSUS Willy
    La Wallonie est impliquée dans l’IPCEI (Important Project of Common European Interest) hydrogène depuis l’appel à manifestation d’intérêt émis par le fédéral en février 2020. Après une analyse des dossiers remis par les bénéficiaires potentiels et un avis d’opportunité, 4 projets ont reçu le soutien de l’administration afin de mettre en œuvre une procédure d’aide d’état dans le cadre de l’IPCEI auprès de la DG concurrence de la Commission.

    Après une année entière de discussion avec les services de la DG concurrence, la Commission européenne a autorisé la Wallonie à soutenir 2 projets, dont le projet « Columbus ».

    Une aide de 78.9 millions d’euros est prévue pour le projet Columbus dans son ensemble. Le coût total du projet avoisine le demi-milliard d’euros, impliquant de facto un investissement privé de l’ordre de 400 millions d’euros.

    Columbus, comme l’honorable membre le mentionne dans sa question, est un projet innovant de captage et d'utilisation du carbone (CCU : Carbon Capture and Utilisation) en Wallonie. Ce projet concentrera le CO₂ provenant d'un type innovant de four à chaux, et le combinera avec de l'hydrogène vert pour produire du méthane synthétique, un gaz renouvelable qui sera injecté dans le réseau de gaz ou utilisé dans les secteurs du transport ou de l'industrie. Le méthane synthétique ou e-méthane est produit en capturant le carbone et en le faisant réagir avec de l'hydrogène vert (hydrogène produit de manière décarbonée). L'hydrogène vert sera produit par une unité d'électrolyse de 100 MW, alimentée par de l'électricité renouvelable. Ce projet est l'un des plus importants de ce type dans le monde. Il ouvre la voie à une réduction significative des émissions de carbone en Europe.

    Le projet vise à réduire les émissions de dioxyde de carbone en utilisant le CO₂ libéré lors du processus de production de la chaux en e-méthane (méthanisation). Ce projet fera la démonstration, à l'échelle industrielle, d'un processus intégré unique en son genre, en améliorant et en combinant les technologies disponibles et les prototypes, tels qu'un nouveau type de four à chaux, un électrolyseur de grande puissance (100 MW) produisant de l'hydrogène vert et un système de méthanisation.

    Il est estimé que Columbus permettra de produire localement 330 GWh d'e-méthane par an. Cet e-méthane est un gaz renouvelable qui sera injecté dans le réseau de gaz Fluxys pour utilisation par le secteur des transports ou l'industrie. La mise en œuvre de ce projet permettrait d'éviter jusqu'à 162 000 tonnes d'émissions de CO₂ par an, en tenant compte des économies d'émissions par l'exploitation de la chaleur excédentaire pour alimenter un réseau de chauffage urbain local, la valorisation de l'oxygène et la contribution à l'équilibrage du réseau. En outre, il permettra de réaliser des projets futurs plus vastes dans le secteur de la chaux et de les reproduire dans d'autres secteurs industriels à forte intensité de CO₂. Il pourrait faire de la Wallonie et de la Belgique un leader mondial dans les technologies d'énergie renouvelable basées sur le CCU.

    Pour y parvenir, deux acteurs industriels ont uni leurs forces pour développer le projet :
    • Engie sera responsable de la construction et de l'exploitation des installations d'électrolyse et de méthanation qui produiront de l'H2 vert et du gaz de synthèse renouvelable, l’e-methane ;
    • Carmeuse (via la société TECforLime) sera responsable de la construction, de la mise en service et de l'exploitation d'un nouveau type de four à chaux, qui permet d'obtenir un flux de CO₂ concentré combinant à la fois le CO₂ lié à la combustion, le CO₂ de procédé qui est libéré lors de la transformation du calcaire en chaux et de l’unité de purification du CO2.

    Le projet Columbus concentre les caractéristiques d’une grande innovation à l’échelle industrielle. Il vise d’une part à lancer une filière de production locale de gaz renouvelable en substitution au gaz fossile et, d’autre part, tend à pérenniser l’activité de filières fortement implantées dans la Région (chaux, ciment, sidérurgie, et cetera) en utilisant le CO2 inhérent aux processus de fabrication comme ressource plutôt que comme déchet.

    L’utilisation de l’e-méthane renouvelable permettra de décarboner des processus de l’industrie lourde (par exemple, jusqu’à 30 % des objectifs de réduction des GES de l’acier à horizon 2030) et contribuera à l’atteinte des objectifs ambitieux que s’est fixés la Région en termes de réduction de gaz à effet de serre.

    L’objectif est de valider le projet dès les premiers mois de l’année 2023 afin de permettre son financement. Le projet devrait aboutir, conformément à l’agenda de la procédure IPCEI, au deuxième quadrimestre 2026.

    Il est précisé que les retombées économiques sont incertaines à ce stade étant donné que les dossiers IPCEI présentent un niveau de risque très élevé (d’où l’autorisation d’octroi d’aides d’État).