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L’incessibilité et insaisissabilité de l’aide sociale versée par les CPAS

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2022
  • N° : 167 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 16/12/2022
    • de DELPORTE Valérie
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Il me revient que Monsieur le Ministre a été récemment interpellé par la Fédération des CPAS au sujet de l'incessibilité et l'insaisissabilité de l'aide sociale versée par les CPAS. Ainsi comme l'indique la Fédération, certains acteurs pointent la cession volontaire ou l'autorisation de versement comme étant « la » solution aux problèmes d'impayés de la part des bénéficiaires de l'aide ou de l'intégration sociale. En d'autres termes, certains créanciers se verraient bien directement se faire rembourser en allant puiser dans l'aide sociale des bénéficiaires.

    Or, selon le Code judiciaire, le revenu d'intégration ainsi que les aides sociales versées par les CPAS sont incessibles et insaisissables. Même volontairement, un bénéficiaire de l'aide sociale ne peut légalement procéder à la cession de celle-ci. Or récemment, ce principe semble avoir été mis à mal dans deux situations.

    D'une part dans le cadre de l'accueil des réfugiés ukrainiens ou la cession pour le paiement d'un loyer/participation a été faite par certains CPAS, ce qui rassurait les hébergeurs et facilitait grandement les démarches tes hébergés et hébergeurs. D'autre part, dans la gestion des dossiers de prêts à taux 0 % par la SWCS en vue de financer la garantie locative.

    Dans son courrier, la Fédération insiste sur le fait, je cite, « qu'il n'est légalement pas autorisé, quand bien même la personne y consentirait, au CPAS de prélever des sommes, dues à quelque titre que ce soit, sur l'aide et de procéder au versement à une tierce personne, privée ou publique »

    Le risque d'ouvrir la boite de pandore existe et la Fédération demande des éclaircissements.

    Quelle est la position de Monsieur le Ministre sur cette question ?

    Qu'a-t-il répondu au courrier de la Fédération des CPAS ?

    Peut-il garantir le principe d'incessibilité et d'insaisissabilité de l'aide sociale versée par les CPAS ?
  • Réponse du 27/01/2023
    • de COLLIGNON Christophe
    Dans le cadre de l’accueil des réfugiés ukrainiens en Wallonie, il n’a jamais été recommandé aux CPAS de prélever le montant de l’indemnité d’occupation sur l’aide sociale équivalente au revenu d’intégration pour le reverser au propriétaire, que le réfugié soit hébergé par un citoyen ou en centre conventionné.

    Pour l’hébergement-citoyen, il a toujours été recommandé aux hébergeurs de fixer une indemnité d’occupation qui s’élève par exemple à 20 % des revenus/aides perçus par le ou les occupants. Un modèle de convention d’occupation précaire a d’ailleurs été mis à disposition des citoyens afin d’offrir un encadrement légal à l'accueil temporaire de réfugiés à leur domicile.

    Concernant l’hébergement au sein des infrastructures conventionnées, en aucun cas il n’est prévu de prélèvement automatique et systématique du montant de l’indemnité d’occupation sur les revenus, quels qu’ils soient, des personnes hébergées. À l’heure actuelle, les CPAS et le Fonds du logement de Wallonie travaillent sur la mise en place d’un système de domiciliation. Ce système sera accessible sur base volontaire et il sera possible d’y renoncer à tout moment.

    En ce qui concerne le prêt à taux zéro et plus particulièrement la question du consentement du bénéficiaire, il n’est pas « forcé » dès lors que l’octroi du prêt n’est en aucun cas conditionné à la signature du document de cession volontaire. En outre, si le bénéficiaire souhaite, par la suite, annuler cette cession et honorer ses échéances autrement, rien ne l’en empêche et il peut mettre un terme à cette cession à tout moment. La révocation de la cession n’aura aucune conséquence sur le contrat de prêt en cours et l’emprunteur retrouvera sa liberté de paiement.

    L’argument principal de la Fédération des CPAS consiste à considérer le mécanisme de la cession volontaire comme étant illégal au regard de l’article 1410 du Code judiciaire.

    L’article 1410 du Code judiciaire fait partie des dispositions contenues dans la cinquième partie du code judiciaire intitulée « saisies conservatoires, voies d’exécution et règlement collectif de dettes ».

    Au sens strict du terme, la notion de « voies d’exécution » se définit comme un « moyen par lequel une personne peut, avec le concours de l’autorité publique, obtenir l’exécution forcée des engagements pris envers lui, spécialement contraindre celui qui a été condamné ou s’est engagé dans certaines formes à satisfaire à ses obligations ».

    Or, il apparait que la cession volontaire ne rentre pas dans le cadre de la définition de la notion de « voie d’exécution » eu égard à son caractère volontaire.

    Puisque la cession volontaire ne constitue pas une voie d’exécution, il n’y a dès lors pas lieu de soumettre celle-ci aux règles du Code judiciaire et partant de là, à son article 1410, paragraphe 2 qui prévoit que « Ne sont ni cessibles ni saisissables à charge du bénéficiaire : [notamment les sommes suivantes] […] 7° les sommes payées à titre de minimum de moyens d'existence. 8° les sommes payées à titre d'aide sociale par les centres publics d'aide sociale. […]».

    Au vu de ce qui précède, il ne me parait dès lors pas nécessaire en l’état d’intervenir en la matière.