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L'accroissement de la divergence économique entre la Flandre et la Wallonie

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 408 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 10/02/2023
    • de SCHYNS Marie-Martine
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    À en croire Bart Van Craeynest, Économiste en Chef au Voka, la Flandre et la Wallonie continuent de s'éloigner l'une de l'autre sur le plan économique. Sur le plan des finances publiques, seule la Flandre est sur la voie d'un retour à l'équilibre budgétaire dans un délai raisonnable. Bruxelles et la Wallonie sont confrontées à des déficits budgétaires insoutenables et rien n'indique que la situation va s'améliorer de sitôt. Cette situation budgétaire est la conséquence de choix politiques et partiellement dus à la divergence économique entre les régions.

    De nouveaux chiffres font apparaître de nouvelles divergences entre les régions tout au long de la crise sanitaire. En 2021, l'activité économique en Flandre a déjà dépassé de 1,5 % son niveau de 2019. En Wallonie, elle serait passée 1,5 % en dessous du niveau de 2019. Cela correspond à la tendance à long terme, la Flandre ayant connu une croissance plus forte que les autres régions deux années sur trois. Cette tendance est évidente depuis les années 1950. Au cours de la période 2000-2010, la Wallonie a brièvement suivi le rythme de la Flandre, mais entre-temps, la tendance divergente est déjà revenue. Au cours de la période 2010-2021, la croissance moyenne en Flandre s'est élevée à 1,6 % par an, ce qui est nettement plus rapide que le 1,1 % en Wallonie.

    Cette divergence se reflète également sur le marché du travail. En Flandre, 76,8 % des personnes âgées de 20 à 64 ans travaillent aujourd'hui. En Wallonie, ce taux est de 65,9 %, à Bruxelles de 65,8 %. Et cet écart se creuse aussi. Il y a 20 ans, le taux d'emploi en Flandre était un peu plus de 7 points de pourcentage plus élevé qu'en Wallonie ; aujourd'hui, cette différence est de près de 11 points de pourcentage.

    Que pense Monsieur le Ministre de ces propos ? Les partage-t-il ?

    Quelles conclusions fonctionnelles et politiques en tire-t-il ?

    Quelles réponses peut-il apporter à la Flandre quant à sa gestion économique ?
  • Réponse du 10/03/2023
    • de BORSUS Willy
    Ce n’est un secret pour personne, la Wallonie est en retard sur la Flandre dans de plusieurs domaines essentiels au dynamisme de l’économie. Mon action au Gouvernement wallon a toujours eu pour objectif d’amplifier le développement économique de la Wallonie. Cependant, tout au long de cette législature la Wallonie, comme bien d’autres, a été frappée de crises sans précédent. Malgré la succession de ces crises successives ayant nécessité un soutien financier puissant de la Région vers les plus vulnérables, j’ai continué à poursuivre l’objectif de développement économique.

    C’est ainsi que de nombreuses réformes structurelles visant à rationaliser, objectiver et mieux utiliser les fonds publics régionaux à destination de nos entreprises ont vu le jour et que d’autres seront menées d’ici la fin de la législature.

    En matière de finances publiques, 400 millions d’euros d’économies structurelles ont été réalisées au niveau du Gouvernement wallon depuis 2021 pour diminuer la croissance de la dette : 150 millions d’euros en 2022 et 250 millions d’euros en 2023.

    Nous menons une série de réformes, de restructurations, de rationalisations. Jusqu’ici, la Wallonie a souffert de trop de structures. Nous avons par exemple décidé de fusionner des entités afin que les entreprises n’aient plus qu’un seul interlocuteur. C’est le cas pour le nouvel outil financier régional WE. Nous voulons mieux accompagner les entreprises dans leur croissance.

    En ce qui concerne la relance économique sensu stricto, il faut la voir à travers deux séquences distinctes : d’une part, la tendance que nous avons observée ces derniers mois et, d’autre part, l’impact de la crise de l’énergie depuis le début de la guerre que la Russie livre en Ukraine. La séquence antérieure, c’est-à-dire post-Covid, est marquée par une relance, une reprise de l’économie, plus forte que ce qui avait été annoncé et même escompté. Cette relance se traduit notamment par un chiffre record sur les six premiers mois de l’année 2022 : la Wallonie a exporté pour pas moins de 30,7 milliards d’euros. C’est beaucoup, un accroissement de 20,4 %, le meilleur résultat depuis 2010. Pour l’essentiel, la Wallonie vend aux pays de l’Union européenne, mais pas seulement. La moitié de ces 30 milliards sont dus à nos exportations en France, en Allemagne et aux Pays-Bas. L’accroissement hors Union européenne est d’un peu plus de 7 %. Évidemment, c’était avant l’impact de la crise énergétique. Le deuxième semestre a été fortement affecté par celle-ci comme par les difficultés que rencontrent beaucoup de nos entreprises. Mais je pense qu’il faut prendre conscience de la place centrale de la Wallonie comme force exportatrice.

    Le soutien à la recherche et au développement est un des points sur lesquels nous misons considérablement. Le Gouvernement wallon a en effet actualisé sa stratégie de spécialisation intelligente (S3) et défini un cadre de financement prioritaire dans des thématiques où la Wallonie fait preuve d’une expertise et d’un potentiel économique certain. 5 domaines d’innovation stratégique (matériaux circulaires, santé, modes de conception et de production agiles et sûrs, chaînes agroalimentaires, habitat et système d’énergie durable) ont été définis avec l’objectif d’un positionnement plus fort notamment à l’international, le but de la S3 étant de permettre à nos entreprises de s’inscrire dans les chaînes de valeur européennes. À ce propos, nous avons soutenu l’implication des entreprises dans les « Projets importants d’intérêt commun européen » (IPCEI) que ce soit dans les filières « Batterie », « Hydrogène » et « Santé ». Le projet WINGS soutient la relance du secteur aéronautique à la suite des crises que nous connaissons et offrira, sans nul doute, des opportunités pour le déploiement du secteur.

    Nous travaillons actuellement à une réforme du paysage des centres de recherche wallons avec cet objectif aussi d’un positionnement plus fort des centres de recherche dans des domaines concrets répondant aux besoins des entreprises ainsi qu’à une participation accrue des acteurs de la recherche et de l’innovation aux programmes européens, participation qui, au regard de la Flandre, peut paraître faible. Nous repensons les mécanismes de soutien à cette participation notamment par l’octroi de primes d’aide au montage de projets plus conséquentes que ce qui existait jusqu’ici du moins pour les acteurs qui voudront se positionner en tant que coordinateurs de projets. Et je suis loin d’être exhaustif.

    Ensuite, ce n’est pas une surprise, le taux d’emploi en Wallonie reste de 10 points inférieurs à celui de la Flandre ; rattraper le retard est difficile à envisager sur une période de court terme. Cependant, ces dernières années, l’évolution montre une tendance à la hausse qui à plusieurs reprises, a été freinée par des contextes de crises (sanitaires, inondation, énergie, etc.). Une grande partie de la solution est donc de créer de l’emploi privé. Cela améliorera le quotidien des citoyens et relancera la consommation intérieure bénéfique à l’économie wallonne. La réalité chiffrée en Wallonie est la suivante : nous avons, aujourd’hui, 166 878 demandeurs d’emploi indemnisés par l’ONEM et jeunes en stage d’insertion. Plus de 40 % sont au chômage depuis plus de deux ans, de nombreux jeunes sont en décrochage scolaire. Dans le cadre de la mise en œuvre du nouvel accompagnement des demandeurs d’emploi, il est donc essentiel d’adresser aux entreprises les demandeurs d’emploi ayant le profil le plus adapté à l’offre d’embauche proposée. Si des lacunes en termes de compétences des demandeurs d’emploi sont constatées, il faut pouvoir former ceux-ci adéquatement et sans délai.

    Fort heureusement, je constate aussi que beaucoup jeunes et de travailleurs en reconversion sont proactifs et souhaitent s’investir ou se réinvestir dans des études et des formations qui sont porteuses d’emploi et d’avenir. Nous avons beaucoup de talents en Wallonie qu’il faut soutenir. C’est en ce sens qu’avec le SPW, l’IFAPME et les Centres de compétence, j’ai porté plusieurs projets dans le cadre du Plan de Relance visant à soutenir la promotion des métiers porteurs et des filières dans les sciences, les technologies, le numérique (STEM), à déployer la formation en alternance et l’ouverture de nouvelles formations qualifiantes attractives et en phase avec les enjeux sociétaux. C’est au travers de mesures conjointes que nous pourrons soutenir l’emploi.

    C’est en ce sens également que je soutiens le renforcement en cours de l’accompagnement des demandeurs d’emploi vers les filières de formation qui débouchent sur un emploi et j’encourage le Forem à travailler en ce sens pour inverser rapidement la tendance. Chacune des parties a des devoirs et des obligations, chacun doit pouvoir les assumer pleinement pour augmenter le taux d’emploi dans le contexte que nous connaissons.

    Dans le cadre de la mise en œuvre du nouvel accompagnement des demandeurs d’emploi, il est essentiel d’adresser aux entreprises les demandeurs d’emploi ayant le profil le plus adapté à l’offre d’embauche proposée. Si des lacunes en termes de compétences des demandeurs d’emploi sont constatées, il faut pouvoir former ceux-ci adéquatement et sans délai.

    D’autres réformes seront à l’évidence encore nécessaires. Je plaide pour que celles-ci puissent être décidées et mises en œuvre rapidement.