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L’utilisation d’huiles usagées comme carburant

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 678 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 14/02/2023
    • de FONTAINE Eddy
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    En juillet 2022, la France a officiellement autorisé l'utilisation d'huiles alimentaires usagées comme carburant. En Belgique, cette mesure a déjà été prise et il est possible d'alimenter son moteur diesel avec de l'huile recyclée. Le diesel bleu, le HVO, est une alternative au diesel traditionnel créé à partir d'huiles végétales, animales, de vidange ou de friteuse. Il convient à tous les véhicules diesel modernes.

    L'avantage écologique de ce carburant est non négligeable. Selon la Fédération des négociants en combustibles et carburants (Brafco), son utilisation diminue de plus de 60 % les émissions de CO2, de plus de 85 % celles de particules fines et il n'y a plus de production de NOx.

    On le sait, la mobilité électrique a ses limites, notamment pour les poids lourds. L'utilisation de ce type de carburant est donc une bonne alternative écologique au diesel classique.

    Il y a cependant des inconvénients. Une installation de fabrication de HVO (ou de carburant XTL en général) a besoin de gros investissements. De plus, le prix du diesel bleu est plus élevé accises que le carburant pétrolier fossile. De même, il existe assez peu de pompes proposant ce diesel. Il est donc difficile de se tourner vers cette alternative du fossile.

    Étant donné le manque d'informations qu'ont les utilisateurs de moteurs diesel, Monsieur le Ministre compte-t-il mettre en place des mesures de sensibilisation quant aux bienfaits écologiques de ce carburant ?

    Dans quelle mesure un déploiement en Wallonie de pompes proposant du diesel bleu est-il possible ?
  • Réponse du 30/03/2023
    • de HENRY Philippe
    « Le diesel bleu » XTL dont font partie les HVO est un carburant qui peut effectivement se substituer au diesel fossile sans contrepartie technique. Ils répondent à la même norme ISO que le diesel, à savoir la norme EN 15940.

    Ils sont produits à partir d’huiles ou de déchets organiques, mais également à partir de CO₂ et d’eau. À la combustion les moteurs émettent (par rapport au diesel classique) entre 20 et 90 % de moins de CO₂, de 65 % à 85 % de moins en particules fines ou ultrafines et entre 5 et 8 % d’oxydes d’azote en moins.

    Cependant, ce diesel bleu possède également des désavantages :
    - un réseau de pompe spécifique est nécessaire (comme d’autres carburants alternatifs) ;
    - sa fabrication comporte un prix plus élevé ;
    - ce carburant résiste moins bien aux basses températures selon les intrants utilisés ;
    - la consommation en l/100km est souvent plus élevée (jusqu’à des surconsommations estimées de 6 %, mais cela fluctue également en fonction des intrants utilisés).

    Concernant les aspects de distribution, le taux d’incorporation et le niveau d’accises dépendent de mes collègues du fédéral. Le réseau de distribution, comme pour le CNG, est dans les mains du secteur, où chaque enseigne peut modifier l’incorporation de ce diesel bleu dans ses stations. Comme il n’existe pas de mécanismes spécifiques à ce secteur, je ne peux utiliser ce levier pour promouvoir cette filière. Le secteur semble déjà réagir puisqu’il y a déjà 10 pompes en Belgique, dont 3 en Wallonie et 1 en région bruxelloise.

    En termes de collecte : aujourd’hui environ 40 % des huiles alimentaires sont collectées par Valorfrit. Il existe donc une marge de progression. Cela relève de la politique de la gestion des déchets chez ma collègue Tellier.

    Quant au bilan environnemental global, tenant compte de la transformation des huiles en carburant pour véhicules, il dépend de nombreux facteurs comme le type d’huile, la localisation, les besoins de transports et la méthode utilisée. La plupart des filières s’attachent à produire du HVO et plus largement le XTL avec une mobilisation des ressources peu émettrices de CO₂. L’Europe a d’ailleurs mis en place une certification pour que, dès janvier 2021, les nouvelles unités réduisent de plus de 60 % les émissions par rapport à la « référence fossile ». Seule la directive RED2 de compétence wallonne peut permettre de jouer sur les critères de durabilité afin de s’assurer que le carburant ne s’appuie pas sur des filières agricoles comme matière première.

    Au bilan, ses avantages dépassent ses inconvénients. Maintenant, est-ce qu’il faut pour autant lancer une campagne de sensibilisation à son sujet ? Il faut noter que les quantités des huiles usagées restent marginales en comparaison à la demande totale en carburant. De plus, il est nécessaire de comparer ce carburant aux autres carburant alternatifs. Ce « diesel bleu » a moins de potentiel que l’électricité, l’hydrogène et le bio-LNG. De plus, ce serait assez paradoxal de lancer une campagne pour le développement de « diesel bleue » alors que l’interdiction des nouveaux moteurs thermiques pour véhicules légers en Europe est prévue en 2035.