/

L’impact du certificat de performance énergétique des bâtiments (PEB) dans l’accès au logement

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 693 (2022-2023) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 16/02/2023
    • de DISPA Benoît
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    Les ambitions en matière climatique nous conduisent à augmenter nos exigences dans l'isolation et la performance énergétique de nos logements.

    Vu le contexte de crise énergétique, la recherche de logements peu énergivores devient essentielle pour nombre de nos concitoyens, mais le parc de logements reste malheureusement très en deçà des attentes. Et les travaux d'amélioration du bâti sont extrêmement lents, faute notamment de main-d'œuvre disponible. Cela démontre à quel point la mise en œuvre d'une filière performante doit être prioritaire pour le Gouvernement.

    Fort logiquement, la référence « PEB » est désormais omniprésente, que ce soit au moment de l'acquisition d'un bien, de sa mise en location, ou encore pour déterminer les subsides pour la rénovation.

    La performance énergétique de base (PEB) conditionne désormais l'indexation des loyers et influence aussi les conditions d'octroi des prêts hypothécaires.

    Les banques estiment que si la PEB est mauvaise, c'est qu'il faudra, tôt ou tard, faire des travaux de rénovation. Alors, pour elles, autant ajouter tout de suite le coût de ces rénovations au prix d'achat du bâtiment. Le prix total étant retenu pour évaluer la solidité d'un projet immobilier avant de décider si oui ou non la banque accepte d'octroyer le crédit hypothécaire.

    Cela peut représenter un surplus important pour le candidat acquéreur :
    - pour une PEB inférieure à C, il n'y aura pas de surplus ;
    - pour une PEB équivalente à un D, la banque impose des travaux pour un montant de 20 000 euros,
    - pour une PEB E, cela peut atteindre 40 000 euros
    - pour une PEB F ou G, l'équivalent de ce qu'on appelle désormais une passoire énergétique, la banque oblige à réaliser des travaux d'un montant de 60 000 euros.

    Un constat s'impose : on donne de plus en plus de valeur à la certification PEB alors qu'elle n'est pas exempte de certaines critiques. Les certificateurs eux-mêmes le reconnaissent. On déplore le manque de cohérence entre régions, l'impossibilité technique ou économique à progresser de catégorie. Il faut aussi dénoncer un système où le simple fait de ne pas pouvoir produire certaines factures équivaut à une présomption d'absence d'isolation et donc à une classification comme passoire énergétique.

    Bref, une réforme semble devoir s'imposer pour ne pas rendre plus difficile qu'il ne l'est déjà l'accès au logement.

    Monsieur le Ministre a-t-il des contacts avec ses homologues des autres Régions pour garder une cohérence dans la certification délivrée d'une région à l'autre ?

    Quelles démarches a-t-il entreprises avec son collègue en charge de l'énergie pour faire évoluer la certification PEB en Wallonie et la faire mieux correspondre à la réalité ?

    Quelle est sa réaction par rapport aux initiatives prises par les banques qui durcissent l'accès aux prêts hypothécaires ?
  • Réponse du 16/03/2023
    • de HENRY Philippe
    Il est actuellement fréquemment question de l’importance du PEB et je suis heureux de voir que l’efficacité énergétique dans les logements prend le devant de la scène. Si, il est vrai, on le critique beaucoup, c’est aussi que l’on reconnait son importance, on s’y intéresse, on le prend au sérieux et on aimerait le voir évoluer. Je ne puis qu’être en accord avec tout cela.

    Il est tout d’abord utile de rappeler que le protocole de collecte des données et la méthode de calcul de la certification PEB ont été mis en place en Wallonie en 2010 pour répondre à une obligation de la Directive PEB 2002/91/CE. La Directive impose notamment les postes de consommation à considérer, la nécessiter de standardiser les consommations et l’expression des résultats en énergie primaire. La certification PEB mise en place en Wallonie répond à ces contraintes et est qualitative.

    L’honorable membre soulève une certaine incohérence entre les systèmes en vigueur dans les trois Régions belges. En effet, les réalités que le certificat entend traduire sont différentes. Ce qui ne nous empêche pas de travailler de concert depuis de nombreuses années pour exprimer au plus juste un moyen de comparaison.

    La Commission européenne prépare à ce propos une évolution du dispositif qui devrait mener à une plus grande uniformisation des systèmes à l’œuvre dans toutes les Régions européennes. Un degré d’adaptation sera laissé aux instances nationales et régionales, ce qui ménagera toujours de possibles différences d’interprétation. N’oublions pas qu’entre Régions belges, cette matière est régionalisée, laissant à chacun la possibilité de s’adapter à ses réalités.

    Une seconde préoccupation est l’impossibilité technique ou économique de progresser de label.

    Cette impossibilité peut se manifester lorsque le logement considéré est déjà d’une efficacité élevée. Pour faire passer un label B vers un label A, il faut en effet proportionnellement plus d’efforts et certains blocages peuvent apparaitre. Mais en Wallonie, un logement sur deux est en label F ou G, c’est-à-dire avec peu ou pas d’isolation. La marge de progression est donc grande.

    Ensuite, il parle de faire évoluer le certificat afin de coller à la réalité. Ici, il faut rappeler l’objectif du certificat. Le but est de disposer d’un outil permettant de comparer deux logements en gommant les biais comportementaux de manière à comparer des pommes avec des pommes. On sait qu’une part importante des consommations sont dues aux habitudes des occupants et ne sont pas imputables à l’efficacité du logement. Le calcul est donc théorique et doit le rester.

    Dans le calcul PEB, ne pas être en mesure d’apporter la preuve de travaux est jugé négativement. Toutefois, ceci est en passe de diminuer, car c’est principalement dans le cas d’anciennes maisons que les éventuels travaux précédents ne sont pas suffisamment documentés. Aujourd’hui, et pour les années qui viennent, non seulement les matériaux de rénovation utilisés sont précisément caractérisés, mais aussi, les propriétaires qui entreprennent des travaux chez eux ont pris le pli de garder des traces, des photos, des documents de tout ce qui est fait.

    Le dernier point concerne les organismes financiers qui resserrent les possibilités de crédits.

    Tout d’abord, j’apprécie le fait que les banques aient pris conscience de l’importance des consommations énergétiques dans la valeur d’un bien immobilier. Ce que j’aimerais également, c’est que l’on considère maintenant que la sobriété énergétique des habitations, certes n’est pas un revenu supplémentaire pour le ménage qui l’occupe, mais permet néanmoins une plus grande aptitude à faire face aux charges. Nous en discutons activement.

    L’ACER est une plateforme au sein de laquelle le secteur de la construction, les organismes financiers et le politique abordent ces questions. Ces travaux sont en cours.

    Maintenant, si j’en crois le site de FEBELFIN (Crédits hypothécaires en 2022 : montant record octroyé, malgré une diminution au deuxième semestre | Febelfin), qui rassemble les statistiques des établissements financiers en Belgique, au total, ce sont près de 255 000 crédits hypothécaires qui ont été octroyés en 2022 (hors refinancements et prêts à tempérament) pour un montant total de presque 43 milliards d’euros. Ces crédits sont utilisés pour construire, acheter ou rénover des logements. Il n’y a pas dans ces chiffres une distribution régionale, que l’on peut cependant estimer à 40 % pour la Wallonie, soit près de 100 000 crédits pour 17 milliards d’euros sur la seule année 2022. Ces chiffres sont légèrement inférieurs à ceux de 2021 mais supérieurs à ceux de l’année d’avant. Sur ces bases, je dirais que le marché se comporte correctement actuellement et je remarque aussi que si on considère qu’un million de logements en Wallonie a besoin de travaux, le rythme actuel permet de rencontrer la demande ainsi que les objectifs de renouvellement à 2050.