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Le métier de fossoyeur dans les communes wallonnes

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 307 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 02/03/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    De l'enterrement jusqu'à une éventuelle exhumation, il gère tout dans un cimetière. Je parle évidemment du fossoyeur. Selon Xavier Deflorenne de la cellule du patrimoine funéraire qui s'exprimait dans la presse, il en faut un pour deux cimetières dans l'idéal. Pourtant, on est bien loin du compte et le constat semble consternant.

    La déprofessionnalisation du métier remonterait à la fusion des communes. La situation parait désormais critique. Dans certains cas, il n'y a même plus un fossoyeur attitré dans chaque entité. Selon l'adage, si on ne respecte pas les morts, ça veut dire que l'on se moque de la vie ! Il faut donc agir.

    Depuis 2001, Xavier Deflorenne a relancé l'organisation de formations, reconnues par la Région depuis 2013, à destination des candidats fossoyeurs. Ces formations se sont largement étoffées abordant l'exhumation, la gestion, la législation, etc. Elles tentent en tout cas de redonner ses lettres de noblesse à une profession qui fait face à de nouveaux défis (notamment en termes de protection de l'environnement), souvent mal connue et pourtant essentielle.

    Peut-on quantifier le manque de fossoyeurs en Wallonie ?

    La Région impose-t-elle un cadre dans les effectifs communaux ? Comment est-ce organisable et vérifiable ?

    Concernant les formations organisées, comment sont-elles concrètement organisées ? Sont-elles suffisamment suivies ? Sont-elles suffisamment promotionnées auprès des autorités communales ?

    Que compte faire Monsieur le Ministre pour pallier à la pénurie de professionnels dans un métier qui concerne tôt ou tard chaque citoyen wallon ?
  • Réponse du 31/03/2023 | Annexe [PDF]
    • de COLLIGNON Christophe
    Je suis particulièrement attentif à cette profession, en témoigne l’exposition présentée par le SPW « Par-delà ces regards Portraits de fossoyeurs » à laquelle l’ensemble des pouvoirs locaux furent invités en novembre 2022.

    Pour rappel, depuis 2013, et en partenariat notamment avec des experts de terrain et le Conseil Régional de la Formation, le métier de fossoyeur a valablement été reconnu. Je confirme par ailleurs que les formations au Centre des Métiers du patrimoine qui sont dispensées au personnel gestionnaire des cimetières — cela concerne prioritairement les fossoyeurs, mais aussi, plus largement, le personnel technique et administratif — s’étoffent progressivement, de façon à coller au plus près de la réalité de cette matière. Vient désormais s’ajouter aux modules existants une formation sur l’aménagement général des cimetières dans le cadre de la végétalisation et un module sur la révision de notions juridiques plus précises.

    En ce qui concerne les formations des fossoyeurs, je peux rappeler un cursus qui a été mis en place, passant d’une part par les 7 modules de formations (CMP/Ifapme) et la validation de compétence.

    La validation des compétences organisée par le Conseil Régional de la Formation et qui consiste à reconnaître officiellement des compétences professionnelles sur base de la pratique d’un métier via des épreuves reconstituées a été mise en place pour valoriser des agents déjà en fonction. Encore faut-il que les pouvoirs locaux reconnaissent, localement, la validité de ce diplôme.

    En matière d’ailleurs de statistiques, le Conseil Régional de la Formation a certifié un nombre de fossoyeurs comme repris en annexe : tableau 1.

    Dans le cadre des formations organisées au Centre des Métiers du patrimoine, une session relative à la théorie et à la pratique des exhumations peut être suivie à l’issue d’un premier module relatif à la gestion des cimetières et du patrimoine funéraire. Ces formations sont sanctionnées par un certificat permettant une évolution de carrière des agents communaux. Les formations complémentaires dispensées par l’IFAPME s’inscrivent dans cette logique puisqu’elles nécessitent que les candidats aient suivi, en prérequis, le module 1 « Gestion des cimetières » dispensé au CMP d’Amay.

    En matière de statistiques, le Centre des Métiers du patrimoine a attesté un nombre de fossoyeurs comme repris en annexe : tableau 2.

    Il est à noter que les années 2020 et 2021 ne sont pas représentatives dans la mesure où la pandémie a ralenti l’ensemble des activités.

    Concernant l'interrogation sur une quantification du manque d’agents dans les cimetières, au niveau strictement factuel et mathématique, considérant un nombre de 3500 cimetières en Wallonie dont environ 2300 cimetières communaux en activité, considérant par ailleurs, la norme générale qui veut qu’il y ait au moins un fossoyeur à temps plein assigné spécifiquement à la gestion de deux cimetières (impliquant l’entretien général, les inhumations, les travaux d’aménagement et encore, les exhumations), on pourrait estimer le nombre minimal à 1200 agents nécessaires, tout en gardant à l’esprit qu’ils doivent au moins être 4 pour remplir les missions d’inhumation et d’exhumation. Les chiffres statistiques relèvent un peu moins de 800 agents formés, mais il faut reconnaitre que tous n’ont pas reçu le titre de fossoyeur sur leur commune d’origine.

    Le SPW n’impose aucun cadre effectif au sein des communes wallonnes. Pour rappel, le cadre n’est qu’un outil stratégique lequel permet une vision à moyen ou long terme des moyens humains qu’une autorité se donne pour réaliser ses missions et projets politiques. Il permet au directeur général de visualiser le nombre et le type d’emplois nécessaires, la planification des postes à pourvoir ou à supprimer. Il est fixé par le conseil communal, reste un outil de gestion propre à chaque institution et ne contient aucun principe général d’obligation.

    En ce qui concerne la pénurie de candidats elle-même, il faut admettre qu’elle découle de diverses causes, parmi lesquelles il est important de relever tout autant la pénibilité d’un métier essentiel, que la reconnaissance variable que cette fonction rencontre d’une commune à l’autre. Dans la majorité des communes, ces agents sont représentés en sous-nombres non par manque de candidats, mais par sous-estimation communale des tâches qui leurs sont affectées quotidiennement. L’exemple relevé de deux fossoyeurs pour 14 cimetières n’est pas le résultat d’une pénurie de candidats, mais bien la conséquence d’un choix communal. Cette sous-représentation est, en soi, inquiétante, au moins en termes de droit des travailleurs. On comprend donc qu’il m’est impossible de répondre plus précisément à la question.

    Cette analyse oblige à relever un autre problème de fond : les agents fossoyeurs ou affectés à la gestion de terrain des cimetières ne sont pas égaux entre eux selon les communes où ils sont engagés. Il s’agit d’un métier que nous pouvons tous qualifier de pénible nécessitant des connaissances précises. Pour compenser cette pénibilité, les pouvoirs locaux ont la faculté de les valoriser sous un grade de niveau D. Or, en l’état, de nombreuses communes continuent de maintenir ou engager ces agents au niveau E, parfois même sans évolution de carrière. Ceci est pourtant contraire à la philosophie recherchée par la Région wallonne au travers de la revalorisation de certains barèmes dans le cadre de la convention sectorielle 2007-2010 signée le 5 mars 2012 à laquelle je me permets de renvoyer l'honorable membre.

    La promotion de ces formations est pourtant bien assurée d’une part par le CRF pour ce qui le concerne, et d’autre, par la Cellule de gestion du patrimoine funéraire pour ce qui concerne plus particulièrement mon administration.

    Pour complétude, et en conseil aux communes souffrant d’une sous-représentation d’agents fossoyeurs, il existe la possibilité de mutualisation de ces agents dans le cadre des exhumations techniques. Ce mécanisme d’échange d’experts est efficace, et certaines communes l’ont bien compris. Il permet, outre de pratiquer un échange de bons procédés, de réaliser des chantiers de plus grande envergure et permettant ainsi aux communes concernées de libérer de l’espace au sein de leurs cimetières.

    Cela dit, si cette mutualisation se révèle efficace dans le cadre des missions organisées comme les exhumations techniques, cette option ne résout en rien le manque de personnel qualifié affecté à la gestion de terrain quotidienne des cimetières.

    Comme déjà signalé dans le cadre d’autres questions analogues, je confirme que mon administration et moi-même œuvrons donc quotidiennement pour valoriser ces fonctions, et de nouvelles pistes sont explorées pour ce métier.