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Le rapport de l'Institut wallon de l'évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS) sur la structure de la propriété en Wallonie

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 335 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 20/03/2023
    • de LOMBA Eric
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Le dernier rapport de l'IWEPS se penche sur la « structure de la propriété en Wallonie et en Belgique ».

    Cette étude est assez novatrice, car elle permet de croiser des bases de données différentes qui donnent un éclairage sur la situation notamment de notre région. Elle met aussi en évidence plusieurs données, dont la complexité de la propriété de logement. En effet, un seul et même logement peut être détenu par un ou plusieurs propriétaires. Ainsi, on constate qu'il y a 23,2 % de logements occupés qui sont détenus par au moins deux propriétaires. Ce chiffre grimpe à 28,4 % pour les propriétaires dont un occupe effectivement le logement. Cette complexité de la propriété a un impact sur de potentiels conflits locatifs et des travaux notamment pour l'économie d'énergie.

    À l'heure où la Wallonie a un besoin important de logements, ces données doivent permettre de mieux comprendre les réalités et besoins de notre région.

    Monsieur le Ministre a-t-il pu prendre connaissance de cette étude ?

    Quelles sont les conclusions qu’il peut en tirer ?

    Quelle est son analyse concernant la complexité de la propriété en Wallonie que ce soit sous les différentes formes qu'elle renvoie (multipropriétaires d'un seul logement, sous-utilisation du bail emphytéotique, copropriétés forcées) et leurs conséquences (choix locatifs, réalisation de travaux d'économie d'énergie) ?
  • Réponse du 25/04/2023
    • de COLLIGNON Christophe
    En termes d’implications pour la politique du logement et pour répondre à la question de l’honorable membre, l’étude de l’IWEPS donne un certain nombre de résultats, concernant des enjeux actuellement débattus au sein du secteur tels que les logements inoccupés, la rénovation des copropriétés et les revenus du patrimoine locatif. J’attendrai toutefois qu’ils soient confortés ou infirmés par d’autres études.

    En effet, il convient de relever que les données utilisées proviennent du Census 2011. Certes, il s’agit pour l’instant des données les plus récentes disponibles. Il n’empêche qu’elles ne reflètent pas la situation actuelle, notamment sur des sujets qui ont connu une évolution importante dernièrement. Par exemple, les sociétés immobilières proposant des produits de placement liés au marché locatif ne se sont développées qu’au cours de la dernière décennie en Wallonie. L’étude ne peut dès lors pas donner de clés pour comprendre ce phénomène.

    L’interprétation qui est faite des données du Census suscite également des interrogations. Dans ses conclusions, l’IWEPS note que « la multiplicité des propriétaires n’empêche pas toute location, car, parmi les logements avec plusieurs propriétaires, il y a nettement plus de logements loués que de logements vides ». Que doit-on déduire de ce constat ? Conclure que la multiplicité des propriétaires n’est pas un frein à la location ? Pourtant les études portant sur le logement inoccupé (et donc le vide locatif) montrent que les difficultés des copropriétaires à se mettre d’accord entre eux sont un frein à la remise sur le marché des logements. Les retours des communes, que je connais bien, sont du même avis. Je rappelle que, le 1er septembre dernier, sont entrées en vigueur trois nouvelles mesures de lutte contre les logements inoccupés en Wallonie dont l’objectif est, en partie, de mettre une pression sur les copropriétaires en conflit et mettre fin à l’inoccupation.

    De la même façon, l’IWEPS conclut que « en Wallonie, la présence de la copropriété au sein des immeubles ne semble pas constituer un frein majeur à la rénovation énergétique. En effet, les logements en copropriété sont peu fréquents (10,6 % des logements) ». Ces conclusions reflètent une mécompréhension par l’IWEPS des enjeux en matière de logement. De nouveau, les acteurs de terrain insistent sur le fait que la rénovation est plus difficile dans les copropriétés. La rénovation sera d’autant plus difficile que, comme le souligne l’IWEPS, ces logements détenus en copropriété sont mis en location dans leur très grande majorité (seuls 12% des logements en copropriété sont occupés par leur propriétaire).

    Ainsi, la problématique du « split incentive », c’est-à-dire le fait que les propriétaires n’habitant pas le logement mis en location sont beaucoup moins enclins à effectuer des travaux puisqu’ils en supportent le coût sans bénéficier de la réduction des factures énergétiques, est un enjeu majeur des politiques de rénovation énergétique du logement. 10,6 % des logements en copropriété majoritairement mis en location sont une vraie question pour la politique du logement locatif privé.

    Enfin, à l’heure où le débat sur la fiscalité des revenus locatifs est ouvert, je suis interpellé par une autre conclusion de l’IWEPS selon laquelle : « les revenus des ménages bailleurs sont quasiment identiques à ceux des ménages de la population du même âge ». En effet, l’IWEPS chiffre à 56 568 euros le revenu annuel moyen des ménages bailleurs en Wallonie contre 54 576 euros pour l’ensemble de population des ménages du même âge, soit une différence de 3,6 %.

    Malheureusement, l’étude ne prend pas en compte les donations ou les héritages qui amènent certains bailleurs à disposer d’un bien immobilier en plus. C’est pourtant fondamental. Les revenus locatifs ne sont pas fiscalisés comme les revenus du travail. On touche ici aux compétences fédérales.

    En conclusion, la connaissance de la structure de la propriété est effectivement une information essentielle. Il est toujours utile de disposer de cette information pour poser le cadre. Je demanderai toutefois que les réflexions de notre Institut soient plus poussées sur certaines questions, notamment avec l’aide des experts du secteur, afin d’étudier plus finement cette question complexe de la propriété avant d’en tirer des conclusions définitives pour notre politique. Ce n’est en rien une critique au travail de qualité réalisé par l’IWEPS.