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L’inévitable évolution du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC)

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 844 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 28/03/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    Face à une décennie cruciale pour la lutte contre le réchauffement climatique et la réduction des GES, de plus en plus de spécialistes considèrent qu'il convient de faire évoluer la structure et réformer le fonctionnement du GIEC.

    Il semble difficilement imaginable qu'il faille attendre neuf ans pour obtenir le prochain rapport de synthèse du GIEC !

    Des plus petits rapports publiés de manière plus régulière n'est-il pas la piste à suivre ?

    Quelle est l'opinion de Monsieur le Ministre et comment se positionne-t-il dans le débat ?

    En termes de contenu, il semble que les sciences sociales et les savoirs indigènes et locaux soient souvent ignorés ou catalogués comme les parents pauvres de la réflexion !

    Un changement apparaît-il opportun en la matière ? Quel est son avis ?

    D'autres manquements sont-ils constatés ? Lesquels ?

    Il est manifeste que certains États, souvent ceux qui vivent des productions fossiles, tentent de tout faire pour ralentir l'évolution du rapport et en minimiser la force !

    Pour faire obstacle à cette politique de l'obstruction, ne serait-il pas judicieux d'introduire des votes quand le consensus fait défaut ? Quelle est sa réflexion sur la question ?

    Ces interrogations sont-elles apportées et soulevées par Monsieur le Ministre dans le débat intrabelge ? Quel en est le résultat ?
    Le cas échéant, ne serait-il pas utile de le faire ?

    Quelle est la procédure qui permettrait de faire évoluer le dossier sur le plan international ?

    La COP28 pourrait-elle être saisie du débat ?
  • Réponse du 28/04/2023
    • de HENRY Philippe
    Le développement des différents rapports d’évaluation sur le climat prend effectivement de plus en plus de temps. Diverses raisons peuvent expliquer cet allongement des délais. D’abord le processus qui organise les travaux est assez long puisque le sixième rapport a été initié en février 2020. Par ailleurs, la littérature scientifique qui est la substance de ce rapport s’est considérablement accrue cette dernière décennie. Son analyse et sa synthèse prennent donc plus de temps.

    La rédaction du rapport de synthèse final est précédée par la rédaction des rapports de synthèse des trois groupes de travail. Entre les rapports de synthèse, le GIEC travaille aussi sur des rapports techniques. Le GIEC publie également des rapports spéciaux intitulés :« Réchauffement planétaire 1,5 °C », « Le changement climatique, la désertification, la dégradation des terres, la gestion durable des terres, la sécurité alimentaire et les flux de gaz à effet de serre dans les écosystèmes terrestres » et le « rapport spécial sur l'océan et la cryosphère ».

    Concernant les éléments liés aux sciences sociales, le GIEC se préoccupe de plus en plus de cet aspect notamment dans le cadre des travaux du Groupe de Travail II sur l’adaptation, les risques et les vulnérabilités.

    Le rapport de GT 2 met en évidence non seulement les composantes physiques des risques, mais aussi les dimensions sociales de la vulnérabilité (inégalités économiques, démographiques…). J’insiste sur le caractère innovant de la contribution du Groupe de travail 2 du GIEC au sixième rapport d’évaluation, elle marque une inflexion profonde de l’adaptation caractérisée par l’ouverture particulière aux questions de genre, de transition juste, de participation citoyenne, d’équité et de transparence.

    On ne peut que constater à travers des recommandations du panel que les citoyens ont parfaitement compris la double dualité et la complémentarité des volets atténuation.
    Ce challenge implique un changement sociétal et le devoir du politique est de capaciter l’ensemble de la société pour y faire face.

    Sur l’impact de certains Pays dans le processus, il est fortement marqué lors de l’adoption du résumé pour les décideurs.

    En effet, ce rapport très synthétique doit extraire les éléments les plus importants. Par ailleurs, il sera potentiellement plus lu que le rapport général. Son contenu fait donc l’objet de discussions plus intenses par savoir quels éléments seront mis en avant. En ce qui concerne les pays producteurs de combustibles fossiles, le comportement est à géométrie variable. Le Royaume d’Arabie saoudite est particulièrement actif dans le domaine. Les Saoudiens produisent énormément de propositions La Russie grand producteur et exportateur des combustibles fossiles reste assez en retrait dans le cadre des interventions. L’Inde présente une délégation de taille moyenne, mais de grande pertinence scientifique capable d’exercer une influence forte dans la discussion et les orientations du texte en challengeant les auteurs. La Chine aussi est très active. Ni l’Inde ni la Chine ne sont producteurs de combustibles fossiles, mais une entente cordiale s’établit entre ces deux grands pays et l’Arabie saoudite.

    Le modus operandi du GIEC présente des inégalités importantes ceci est conséquence d’une filiation avec le système de fonctionnement de grande partie des organismes de Nations Unies. Le poids de la Chine à la même valeur que celle d’Andorre.

    L’idée d’introduire un vote pour contourner les atermoiements volontaires serait à mon sens malvenue. La science n’est pas une opinion, mais un fait. Les démarches scientifiques se basent sur des études indépendantes et publiées qui ont été revues par des pairs. Un mécanisme de vote introduirait une politisation nettement plus forte sur la pertinence de certains résultats scientifiques avérés. Ce serait là une dérive majeure à la démarche scientifique.

    Par ailleurs et au regard de la gestion politique sur d’autres dossiers, rien ne dit que le vote irait en faveur des données scientifiques les plus fiables. Enfin, le vote pourrait faire l’impasse sur le débat scientifique nécessaire permettant d’arriver au consensus alors même que la portée d’un accord par consensus est beaucoup plus marquante.