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L’application des nouvelles règles anti-érosion dans le cadre de la mise en œuvre de la PAC

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 562 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 04/04/2023
    • de DESQUESNES François
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Ce 23 février 2023, sur la proposition de Monsieur le Ministre, le Conseil des Ministres a approuvé l'arrêté du Gouvernement wallon relatif aux notions communes aux interventions et aides de la politique agricole commune et à la conditionnalité.

    Cet arrêté fixe de nouvelles règles pour les agriculteurs notamment par rapport aux parcelles dites à risques d'érosion « extrême, très élevé ou élevé ».

    On peut notamment lire dans le rapport au Gouvernement ceci :
    « Sous-section 2. Gestion minimale de la terre reflétant les conditions locales spécifiques en vue de limiter l'érosion (BCAE 5). Cette section traduit en règles de droit la section 3.10.3.1 du Plan stratégique wallon relatif à la PAC.

    Cette sous-section prévoit la mise en œuvre de la BCAE 5. Celle-ci s'appuie sur un nouveau référentiel du risque d'érosion des parcelles basé sur la pente, la longueur de pente, les caractéristiques du sol et l'érosivité locale des pluies. Les parcelles aux risques d'érosion « extrême, très élevé, élevé » sont concernées par cette BCAE 5. »

    Quelle est la base légale des critères utilisés dans le « nouveau référentiel du risque d'érosion » ?

    Sauf erreur de ma part, ceux-ci ne sont pas repris dans le texte de l'arrêté ? Pourquoi ?

    Combien de parcelles sont actuellement identifiées respectivement en risque d'érosion élevé, très élevé et extrêmement élevé en Wallonie ?

    Pour chacune de ces trois catégories, quel est le nombre d'hectares concernés ?

    Par ailleurs, l'article 54 de l'arrêté prévoit ceci :
    « §1er L'organisme payeur attribue un code informatif pour chaque parcelle présentant une sensibilité élevée, très élevée ou extrême à l'érosion. Le code informatif est communiqué aux agriculteurs au moyen du formulaire de la demande unique.
    § 2. L'agriculteur peut introduire une demande de requalification de la sensibilité d'une parcelle à l'érosion auprès de l'organisme payeur dans les situations suivantes (…) »

    Quelle est la portée de ce « code informatif » ?

    N'est-il pas en soi porteur de conséquences juridiques importantes pour l'agriculteur ?

    Comment l'agriculteur est-il informé de la motivation juridique et de fait de ce « code informatif » ?

    Par ailleurs, il est communiqué aux agriculteurs qu'ils ne peuvent, pour le moment, pas faire usage du droit de contestation prévu par le paragraphe 2. Pourquoi ?

    Quand ce droit leur sera-t-il ouvert ?

    En Flandre, la cartographie des « Potentiële bodemerosiekaart per perceel » est publique. Pourquoi ne l'est-elle pas en Wallonie ? Quand le sera-t-elle ?

    Sur le site du SPW relatif à la BCAE 5, il est précisé que la mesure est applicable à partir du 1er janvier 2023. Toutefois, un communiqué de presse daté du 20 mars annonce que la mesure ne sera pas appliquée en 2023 et 2024 ? Monsieur le Ministre confirme-t-il cela ?

    L'arrêté va-t-il être modifié pour donner la sécurité juridique que n'offre pas le communiqué de presse ?
  • Réponse du 27/04/2023
    • de BORSUS Willy
    L'arrêté du Gouvernement wallon relatif aux notions communes aux interventions et aides de la politique agricole commune et à la conditionnalité adopté ce 23 février 2023 comprend différentes mesures du Plan Stratégique PAC (PS-PAC), dont celles relatives à l’érosion.

    Pour rappel, ce PS-PAC a largement été concerté avec l’ensemble des parties prenantes, dont les organisations professionnelles agricoles, et a fait l’objet d’une enquête publique. Ce PS-PAC est accessible à tous sur le portail wallon de l’agriculture.

    D’un point de vue juridique, la base légale pour les mesures du PS-PAC et spécifiquement pour la « bonne condition agricole et environnementale » (BCAE) n° 5 relative à la protection des sols et donc l’érosion, réside dans les dispositions suivantes du Code wallon de l’Agriculture :
    Art. D.4. Le Gouvernement prend toutes les mesures d'exécution des actes européens relatifs à la politique agricole commune et relatifs à la politique commune de la pêche.
    Art. D.242. Le Gouvernement détermine pour l'octroi des aides relatives au soutien des activités visées à l'article D.2 : (…)
    3° les conditions d'octroi; (…)
    Art. D.250. Le Gouvernement prend les mesures d'exécution en vue du respect des normes relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales et des exigences réglementaires en matière de gestion, dans les domaines de l'environnement, du changement climatique (…).
    C’est sur la base de ces habilitations que le Gouvernement a pris les mesures via l’arrêté du 23 février 2023 précité.

    Cet arrêté produit ses effets depuis le 1er janvier 2023, mais nous avons négocié et obtenu de la Commission européenne une transition pour certaines nouvelles mesures. C’est notamment le cas pour les nouvelles mesures relatives à l’érosion qui sont en vigueur, mais pour lesquelles aucune sanction ne peut être prise ni en 2023 ni en 2024. Vu le délai et la complexité de mise en œuvre de la nouvelle PAC, avec mes équipes et l’administration, je plaide pour l’octroi d’une année additionnelle de transition, auprès de la Commission européenne.

    Le communiqué de presse ne fait qu’informer sur ce qui est prévu dans les textes juridiques. Il est en effet apparu utile de communiquer à ce sujet vu certaines incompréhensions et mauvaises informations circulant sur le terrain.

    Concernant la base juridique de la BCAE5 relative à la protection des sols en vue de limiter l’érosion, ce sont les articles 54 à 60 de l’arrêté qui en précisent les modalités. En outre, le portail de l’agriculture reprend des explications détaillées sur cette mesure, avec notamment des vidéos explicatives.

    Conformément à l’article 54 de l’arrêté, un code informatif pour chaque parcelle présentant une sensibilité élevée, très élevée ou extrême à l'érosion a été communiqué aux agriculteurs au moyen du formulaire de la demande unique.

    En outre, un courrier a été envoyé à chaque agriculteur pour l’informer de la classification de l’ensemble de ses parcelles. Ce courrier informatif a suscité de nombreuses réactions d’agriculteurs qui ont découvert cette nouvelle mesure à cette occasion alors qu’elle avait pourtant été discutée avec les organisations professionnelles agricoles notamment lors d’une phase test dès 2019, mais également lors de la concertation du PS-PAC. C’est suite à ces réactions que j’ai mis en place un groupe de travail pour évaluer la mise en œuvre de la mesure et les éventuels besoins d’adaptation suite aux retours du terrain.

    Le code par parcelle est généré automatiquement selon la méthodologie décrite dans le PS-PAC. Le code est dit « informatif », car l’agriculteur peut, s’il le souhaite, modifier la valeur par défaut du taux de matière organique sur la base de résultats d’analyses plus précises dont il disposerait pour ses parcelles. Cette possibilité est déjà effective.

    Outre cette information de la classification de ses parcelles via eDS2023 et/ou via le courrier envoyé, l’administration a mis en place un outil de simulation qui permet à chaque agriculteur d’accéder aux informations relatives à ses parcelles et de faire des tests d’évolution pour en réduire le risque d’érosion, en découpant sa parcelle par exemple.

    Pour ce qui concerne les superficies concernées, les informations sont disponibles dans le PS-PAC sur le portail de l’agriculture.

    La superficie agricole utile (SAU) wallonne comptabilise 293 475 parcelles agricoles.

    Parmi celles-ci, 17 211 parcelles en terre arable (soit 11 % des terres arables ou 5,8 % de l’ensemble des parcelles agricoles) sont concernées par l’une des trois classes de sensibilité à l’érosion soumises aux mesures BCAE. Elles se répartissent de la manière suivante : 8 604 en Elevé, 7 686 en Très élevé et 921 en Extrême. À cela s’ajoutent 8 317 parcelles de prairies en Elevé, 11 080 en Très élevé et 3399 parcelles de prairie en Extrême.

    Ces hectares concernés sont repris en page 368 du PS-PAC. Ils nécessitent quelques précisions :
    * 222 000 hectares sont en effet repris dans les classes de sensibilité à l’érosion Elevée, Très élevée et Extrême. Mais, plus de la moitié sont des prairies permanentes sur lesquelles aucune contrainte ne s’applique sauf en cas de labour, ce n’est donc en réalité qu’une information ;
    * En terre arable, 95 372 ha sont repris dans l’une des 3 classes de sensibilité à l’érosion, dont seule la moitié doit intégrer des contraintes de gestion liées à la conditionnalité, puisqu’il n’y a aucune contrainte pour les céréales d’hiver, le colza d’hiver, les mélanges céréales-légumineuses d’hiver, etc. en risque Elevé ou Très élevée ;
    * Dans les faits, ce sont donc 48 745 ha de terres arables qui sont soumis plus directement à une contrainte de gestion BCAE 5 visant à intégrer le risque érosif, non pas 222 000 ha.

    Cela reste cependant évidemment conséquent et doit être aussi comparé à certaines réalités de terrain : à titre d’exemple, 3 communes wallonnes sur 4 ont fait appel aux services du SPW au cours de ces 10 dernières années afin de gérer des problèmes d’inondations par ruissellement, dans la plupart des cas avec coulées boueuses.

    Par ailleurs, ces superficies sont appelées à évoluer à la baisse : en effet, le modèle intégrant la longueur de pente de la parcelle, une terre présentée comme étant originellement « à risque érosif » peut être classée à un niveau de sensibilité inférieur à la suite d’un découpage. Ce sera le cas d’une terre à cheval sur un plateau en faible pente et sur un versant de vallée, par exemple. Après découpage, la partie plane à risque érosif faible pourra continuer à accueillir des cultures sensibles à l’érosion tandis que le versant plus exposé serait dédié à des cultures moins sensibles.

    Tout comme en Flandre, où un système comparable existe depuis l’entrée en vigueur de la PAC précédente, la carte de sensibilité à l’érosion sur l’ensemble de la Wallonie est disponible pour tout citoyen. Depuis décembre dernier, cette carte, qui donne la valeur de sensibilité à l’érosion pour tout le territoire wallon (par pixel de 10 mètres de côté), est disponible sur le géoportail de la Wallonie.

    Néanmoins, je peux confirmer que les équipes juridiques tant du SPW que d’un cabinet externe procèdent actuellement à une analyse complète et circonstanciée du cadre juridique de cette affirmation et, au besoin, apporteront les recommandations nécessaires à une éventuelle consolidation.