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L'étude prospective pour l'agriculture européenne en 2050

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 591 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 14/04/2023
    • de RYCKMANS Hélène
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    L'INRAE vient de publier les résultats d'une recherche sur le futur de l'agriculture européenne, dont l'originalité et la plus-value résident dans l'élaboration de trois scénarios, qui combinent la quantification des rendements, de l'impact sur les échanges commerciaux, les régimes alimentaires, les émissions de GES, les trajectoires envisageables pour y parvenir, et quatre études de cas régionaux d'application des scénarios.

    En utilisant une méthode dite de « backcasting », partant d'un futur souhaitable : celui d'une agriculture sans pesticides, l'étude dégage dix messages clés intéressants. Elle souligne la nécessité de changer de paradigme et de construire des systèmes de culture innovants sans pesticides chimiques, et de considérer les systèmes de culture comme des composantes des systèmes alimentaires.

    Pour l'INRAE, l'agriculture conventionnelle, actuellement majoritaire, ne pourrait pas maintenir sa production en stoppant simplement les pesticides sans rien modifier par ailleurs. C'est toute l'organisation de la production qu'il faut changer.

    Monsieur le Ministre a-t-il pris connaissance de cette étude ? Quelle analyse en fait-il ? Des équipes de recherches wallonnes y ont-elles été associées ? A-e-il jugé utile et financé des recherches de ce type au sein du CRA-W ou d'autres instances ? Avec quels résultats ?

    L'INRAE note également qu'il faut intégrer l'accès à la ressource en eau, qui devient rare et donner un rôle plus important à l'épidémiosurveillance et à la prévention. Où en sont les recherches et les solutions à cet égard ?

    Quels sont les leviers dont il dispose pour aider l'agriculture wallonne à s'adapter à de tels scénarios ?
  • Réponse du 27/04/2023
    • de BORSUS Willy
    Comme toute étude prospective, les scénarios sont des hypothèses de futurs potentiels. Si l’article explique que les ventes de pesticides ne diminuent pas en UE, le nombre de substances actives est quant à lui en forte baisse. Pour les auteurs, l’impact des pesticides sur la biodiversité et l’environnement nécessite d’envisager une agriculture sans pesticides à l’avenir, d’où l’intérêt de la démarche prospective.

    L’étude montre que se passer des pesticides impliquerait successivement :
    - une reconception des systèmes de culture ;
    - le basculement d’une stratégie de lutte contre les bioagresseurs vers une stratégie de prophylaxie (préventive) ;
    - la nécessité de se doter d’outils d’épidémiosurveillance ;
    - la nécessité de renforcer les régulations biologiques à l’échelle du sol et du paysage, en mobilisant les principes de l’agroécologie, dont la diversification spatiale et temporelle des cultures.

    Les équipes du CRA-W n’ont pas été directement associées à cette étude, mais le CRA-W est membre de l’European Alliance Toward pesticide-free agriculture.

    Le CRA-W développe ainsi différentes recherches qui doivent permettre la mise en œuvre du/des scénarios qui serai(en)t retenus :
    - Il développe des systèmes ou outils d’aide à la décision (OAD)- en vue de mieux cibler l’usage des pesticides et, ainsi, d’en réduire l’usage, mais également des outils comparant l’impact de différentes stratégies de lutte afin de retenir les moins impactantes pour l’environnement projet Indic’eau, avec des indicateurs tels qu’ISAC’eau ;
    - Il teste des alternatives aux pesticides de synthèse, dans une stratégie de substitution : utilisation de bioproduits, possibilités offertes par l’utilisation de robots désherbeurs (projet Robots) ou du désherbage mécanique (projet BioCoCorp) ;
    - Il teste des stratégies de reconceptions de systèmes de cultures afin de réduire l’utilisation des pesticides de synthèse ou de permettre une agriculture sans ceux-ci, en mobilisant, entre autres, les leviers offerts par la diversification des systèmes de culture et l’utilisation de cultures de services.

    Il y a lieu d’ajouter aussi que le CRA-W s’implique aussi dans la réduction de l’usage des pesticides de synthèse et des risques liés à leur usage autrement que par des projets de recherche, on peut citer :

    1) L’introduction présentée lors du débat public « Quelles alternatives aux pesticides de synthèse », lors du 50e congrès du Groupe Français de Recherche sur les Pesticides (GFP) qui a eu lieu à Namur du 18 au 20 mai 2022, reprend les approches possibles en matière d’alternatives aux pesticides de synthèse, et les principaux travaux en cours au CRA-W dans cette thématique, ainsi que les questions à résoudre, les enjeux et les défis à relever :
    * Approches de réduction des risques :
    - Optimiser les formulations et leurs modalités d’application ;
    - Réduire les risques de contamination et les effets indésirables ;
    - Développer des outils de biovigilance et d’agriculture de précision ;
    * Approches de substitution technologique :
    - Développer des produits de biocontrôle (biopesticides) ;
    - Développer des variétés résistantes aux maladies et ravageurs ;
    * Approches systémiques :
    - Rechercher des pratiques culturales innovantes ;
    - Développer la lutte biologique ;
    * Approches sociétales :
    - Analyser la balance risques / bénéfices liée à l’utilisation des pesticides ;
    - Changer les comportements, les habitudes alimentaires.

    2) La brochure « Le CRA-W au bénéfice d'une agriculture raisonnée dans l'utilisation des produits phytopharmaceutiques » reprend les principaux travaux réalisés et en cours au CRA-W en vue de développer des alternatives aux produits de synthèse (lutte intégrée, agriculture biologique, etc.), de réduire l’usage des produits de synthèse ou les risques liés à leurs usages.

    3) Le CRA-W contribue fortement au Programme wallon de réduction des pesticides pour la période 2023-2027 (PWRP 3), dont l’objectif est de continuer à réduire l’utilisation de pesticides dans notre région pour préserver l’environnement tout en proposant des actions concrètes pour veiller à la santé des riverains et des agriculteurs. Ce nouveau programme inscrit la Wallonie dans la droite ligne des objectifs du Green Deal européen visant une réduction de 50 % des pesticides à l'horizon 2030.

    En dehors des aspects liés à la recherche, dans le cadre de sa stratégie Farm to Fork, la Commission a publié en 22 juin une proposition de nouvelles règles visant à diminuer l’utilisation et le risque des pesticides au sein de l’UE.

    Par ailleurs, dans le plan de relance, plusieurs projets contribuent au futur de l’agriculture. Nous pouvons citer l’accompagnement de la transition environnementale et climatique en consolidant l’outil DECIDE, l’analyse d’un système de rémunération des externalités positives, la sensibilisation des acteurs locaux à l’agroécologie ainsi que plusieurs projets concernant l’accès à la ressource en eau.

    Ces axes de travail permettront à l’avenir une agriculture plus durable et respectueuse de l’environnement.