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L’impact de la réforme du droit des sociétés sur les règles de gouvernance locale

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 427 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 17/05/2023
    • de DISPA Benoît
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Le 21 mars 2023, la Commission du logement et des pouvoirs locaux a débattu de la proposition de décret modifiant l'article L5111-1, alinéa 1er, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (Doc. 452 (2020-2021) N° 1).

    Il a été évoqué durant les débats parlementaires que des avis juridiques seraient sollicités afin de vérifier, notamment, si la réforme fédérale du droit des sociétés est susceptible de créer une possibilité de contournement des règles de gouvernance locale.

    Monsieur le Ministre a-t-il commandé une analyse juridique externe ?
    Le cas échéant, quelles sont ses conclusions et cette analyse peut-elle être jointe à la réponse ?
  • Réponse du 06/07/2023 | Annexe [PDF]
    • de COLLIGNON Christophe
    À ma demande, le SPW Intérieur et Action sociale a effectivement commandé une étude juridique externe le 27 mars 2023, par ailleurs jointe à la présente. Son analyse est en cours.

    Pour rappel, il s'agissait de :
    - confirmer ou infirmer que les modifications réalisées dans le cadre de la réforme du code des sociétés et des associations quant à la notion de capital n’ouvrent pas la porte à de possibles contournements de la norme définie dans le cadre du décret dit « gouvernance », singulièrement sur la question du contrôle des SPPLS ;
    - appréhender l’alternative d’imposer aux pouvoirs locaux d’acquérir uniquement des actions pourvues de droit de vote lors d’une prise de participation au capital d’une société, singulièrement au regard du principe constitutionnel de l’autonomie locale.

    En outre, le SPW Intérieur et Action sociale a demandé au consultant externe de déterminer si, en prenant une « participation » dans une société en vertu de la législation applicable (Code de la démocratie locale et de la décentralisation et loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d’action sociale), un pouvoir local acquiert nécessairement des droits de vote ou non et, le cas échéant, le « contrôle » de ladite société qui en deviendrait la « filiale ». À cet effet, le SPW Intérieur et Action sociale a demandé de clarifier et de concrétiser la portée des définitions de « participation », « contrôle » et « filiale » données dans le Code des sociétés et des associations, notamment la portée des termes « droits sociaux » employés dans la définition de « participation ».

    Le consultant externe a rendu son analyse le 30 mars. Suivant cette celle-ci, la proposition de décret modifiant l’article L5111-1, alinéa 1er, 10°, du CDLD n’est pas fondée. En voici la synthèse :

    1. « […] en prenant une participation dans une société, un pouvoir local n’acquiert pas nécessairement des droits de vote. […] il faut également relever que le CSA prévoit néanmoins un certain nombre d’hypothèses dans lesquelles les détenteurs d’actions sans droit de vote disposeront quand même de ce droit […]. Donc même s’il ne détient que des actions sans droit de vote, le pouvoir public concerné participera néanmoins à la prise de certaines décisions essentielles. » ;

    2. « Le critère unique actuel (depuis l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 16 janvier 2020) de qualification d’une société en tant que SPPLS, soit celui d’une participation au capital supérieure à 50 %, demeure à mon sens pertinent nonobstant la réforme de la notion de “capital” inférée par le CSA et décrite ci-avant.

    Il pourrait même être considéré qu’il l’est encore davantage qu’auparavant, dès lors qu’effectivement, comme judicieusement relevé dans la note d’analyse établie le 16 mars 2023 par l’administration, une participation au capital d’une société peut désormais se concevoir sans que le moindre droit de vote y soit attaché…

    Ainsi, si la proposition de décret dont objet devait être adoptée, des sociétés (nombre indéterminable) pourraient désormais ne plus être considérées comme SPPLS et ce alors même que le capital de celles-ci serait détenu à plus de 50 % par des pouvoirs publics…

    En réalité, dans cette perspective, la proposition de décret non seulement ne permet pas d’atteindre l’objectif escompté, mais en outre mène au résultat opposé… En ce sens, je souscris totalement aux réticences émises à cet égard. » ;

    3. « […] il convient aussi de relever, a contrario, que la réforme du CSA permet par ailleurs d’envisager le scénario d’un pouvoir public qui participe au capital d’une société à concurrence de moins de 50 %, mais qui en assure le contrôle total par le mécanisme des actions avec droit de vote multiple…

    […] Toutefois, comme l’a rappelé la Cour constitutionnelle dans son arrêt du 16 janvier 2020, eu égard à l’objet du décret “gouvernance” (à savoir favoriser la transparence des opérations réalisées et des décisions prises à l’aide des fonds investis par des personnes morales de droit public locales dans des sociétés de privé), il y a lieu de privilégier le critère relatif à la détention de la majorité du capital de la société. Et ce quoiqu’il en soit de la capacité décisionnelle qui en découle compte tenu de la modalisation du droit de vote résultant des actions détenues. » ;

    4. « […] Dès lors que la modification du CSA emporte pour conséquence que les pouvoirs locaux peuvent désormais, le cas échéant, détenir des participations dans le capital d’une société sans disposer du moindre droit de vote, il ne semble pas prima facie disproportionné d’adapter les mécanismes de contrôle prévus afin de tenir compte de l’impact des modifications précitées.

    Ainsi interdire aux pouvoirs locaux de prendre des participations dans des sociétés sans détenir de droit de vote ne semble pas priver les pouvoirs locaux de tout ou de l’essentiel de leurs prérogatives.

    Ceci étant, par-delà la conformité d’une telle mesure avec le principe de l’autonomie locale, il y a lieu de s’interroger sur la pertinence de celle-ci.

    En effet, comme cela a été dit, les actions sans droit de vote sont limitées à 1/3 dans une société. Les actions sans droit de vote ne peuvent donc jamais dépasser 1/3 du capital social. […] Dans cette optique, il y a lieu de s’interroger sur l’effet utile d’une imposition de détention d’actions avec vote puisque par hypothèse le seuil des 50 % de détention du capital social (soit le critère d’élection en qualité de SPPLS) ne sera pas atteint. » (voir annexe)