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La réaction de la Région wallonne face aux nombreuses difficultés administratives rencontrées par les agriculteurs

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 721 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 26/05/2023
    • de ANTOINE André
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Entre 1980 et 2019, le secteur agricole a perdu 68% de ses exploitations en Belgique, avec un rythme de disparition plus ou moins identique en Flandre et en Wallonie (-2% par an en moyenne). Ainsi, l'on dénombrait en 2019, 12 733 exploitations agricoles en Wallonie contre 37 843 en 1980…

    Plus particulièrement, le Brabant Wallon ne dispose plus que de 1 026 exploitations agricoles en 2020. C'est surtout la betterave sucrière qui est cultivée dans la jeune province avec 576 615 tonnes en 2020, suivie par les pommes de terre avec 291 002 tonnes et le froment complète le podium agricole brabançon wallon.

    Face à cette déperdition d'agriculteurs, la commune de Genappe a récemment mené une enquête sur la qualité de vie des agriculteurs, leur perception du métier et leur relation à la dynamique du territoire : « En 2012, il y avait plus d'une centaine d'agriculteurs à Genappe. Ils n'étaient plus que 70 à 80 en 2018 et sont encore entre quarante et cinquante actuellement, dont une vingtaine s'est lancée dans la vente de leurs produits à la ferme ou dans la vente d'autres produits, comme par exemple le pellet. S'ils rencontrent des difficultés identifiées, nous devons le savoir et réagir à bon escient », concluent les autorités de Genappe.

    Concrètement, cette enquête a été réalisée par la commission agriculture de la ville qui s'est associée pour l'occasion à Yves Patte, sociologue du bureau Innovons, Tom Dedeuwaerdere, professeur à l'UClouvain, co-responsable de la plateforme interdisciplinaire LPTransition, ainsi que deux étudiants ingénieurs agronomes.

    De nombreux agriculteurs ont participé à cette enquête. Les résultats de celle-ci doivent, semble-t-il, encore être analysés, mais le plus grand problème identifié est sans aucun doute celui des lourdeurs administratives qui accablent nos agriculteurs selon les autorités communales et les experts mandatés pour cette enquête.

    Monsieur le Ministre a-t-il pris connaissance de cette enquête qui tombe à point nommé au vu de la chute du nombre d'agriculteurs en Wallonie ? Quels en sont les résultats complets ? Comment les interprète-t-il ? Quelles sont les initiatives nouvelles qu'elles lui inspirent ?

    Au passage, ne serait-il pas utile d'élaborer et de réaliser une enquête semblable à l'échelle de la Wallonie ?

    Une réflexion anticipée sur les futures mesures d'aide dans le cadre d'une nouvelle reconnaissance en calamité agricole est-elle en cours ? Si oui, laquelle ?

    Au vu du nombre décroissant des jeunes agriculteurs - moins de 6% de nos agriculteurs wallons sont âgés de moins de 35 ans - va-t-il augmenter les 70 000 euros de subvention réservés à l'aide à l'installation de ces derniers ? Compte-t-il intervenir plus significativement sur une réduction des taux d'intérêt pratiqués dans la reprise des exploitations agricoles ? Si oui, de combien de points de base ?

    Enfin, compte-t-il étendre l'intervention au secteur agricole dès lors qu'il s'agit d'authentiques entreprises à l'échelle de notre région ?
  • Réponse du 22/06/2023 | Annexe [PDF]
    • de BORSUS Willy
    Les statistiques en matière d’exploitations agricoles sont les suivantes : voir tableau en annexe.

    L’honorable membre l’aura ainsi constaté que, si le nombre d’exploitations a effectivement diminué, passant de quelque 29 200 exploitations en 1990 à un peu moins de 12 730 en 2021, il est pratiquement stable depuis quelques années. La réduction observée a essentiellement touché les exploitations non professionnelles, c’est-à-dire celles dont la production brute standard, le chiffre d’affaires potentiel en quelque sorte, est inférieure à 25 000 euros. Le détail de ces données est consultable sur le site de l’État de l’Agriculture wallonne que j’ai demandé à mon administration de mettre en place et qui intégrera prochainement les bilans communaux. Ainsi, on peut par exemple y observer que la Commune de Genappe recensait encore 83 exploitations en 2021.

    Si la problématique de la réduction du nombre d’exploitations n’est hélas pas récente, il est essentiel d’analyser et de suivre la situation des jeunes agriculteurs. À ma requête, un projet d’observatoire des jeunes qui se lancent en agriculture est en cours de développement et doit conduire à une meilleure connaissance de leurs profils ainsi que des spécificités de leur installation afin de contenir les politiques de soutien dans un cadre parfaitement circonscrit.

    Par exemple, ces dernières années, une aide en intérêts n’aurait guère été opportune dès lors que les taux pratiqués étaient historiquement bas. D’ailleurs, aujourd’hui, contrairement aux règles précédentes, le taux d’intérêt n’est plus une variable qui entre en ligne de compte dans la fixation du montant de l’aide qui est accordée aux jeunes bénéficiaires. Par contre, l’aide en capital forfaitaire de 70 000 euros pour l’installation d’un jeune agriculteur (- de 41 ans) prévue dans ADISA dans le cadre de la PAC 2014-2020 a été maintenue pour la nouvelle programmation en vigueur depuis le 1er janvier 2023, et ce, malgré une diminution du budget alloué par l’UE. De plus, la répartition du cofinancement est passée de 60 % - part Wallonie et 40 % - part UE à 62,92 % part Wallonie et 37,08 % - part UE, ce qui permet, à défaut d’augmenter le montant de l’aide à l’installation par jeune agriculteur, d’augmenter le nombre de bénéficiaires potentiels.

    Si les tâches administratives représentent en effet une charge réelle importante pour nos exploitants, elles ne constituent malheureusement pas le seul ou principal frein à la reprise des exploitations. D’autres éléments tels que l’accès au foncier, l’importance du capital à mettre en œuvre, le manque de rentabilité de certaines productions, la charge de travail autre qu’administrative, et cetera, y contribuent également. Dès lors, suite aux Assises de la terre, j’ai également chargé mon administration de travailler sur la mise en place d’outils qui devront permettre la facilitation de l’accès à la terre pour les jeunes, notamment au niveau du marché locatif.

    La simplification administrative représente aujourd’hui un processus continu et un objectif à soutenir même si la politique agricole se montre de plus en plus complexe.

    Par exemple, aujourd’hui, l’introduction d’une demande d’indemnité dans le cadre des calamités agricoles est totalement numérisée et intégrée à l’espace personnel PAC on Web du producteur. Le parcellaire agricole est donc lu et ne doit ainsi plus être encodé. En cette matière, la partie la plus lourde administrativement reste actuellement l’établissement des procès-verbaux de constats de dégâts à remplir manuellement dans chaque commune hébergeant une partie de l’exploitation de l’agriculteur. Une réflexion est actuellement en cours en vue de simplifier ce dernier volet de la procédure.

    Toujours à titre d’exemple, dans le cadre des aides à l’installation et à l’investissement, la demande d’aide que les agriculteurs peuvent compléter est en grande partie préremplie par les données connues de l’administration. Seuls quelques éléments propres à l’exploitation sont à compléter.

    Concernant précisément l’enquête menée par la Commune de Genappe, je n’en ai pas connaissance, mais je suis effectivement intéressé par les résultats de celle-ci.

    Au niveau régional, en 2016, le Collège des Producteurs avait réalisé une étude dédiée aux démarches administratives. Plus de 500 producteurs avaient alors été concernés et avaient émis leurs préoccupations et propositions en la matière. Six types de préoccupations avaient été identifiés dont le premier, représentant 44 % des préoccupations exprimées, mettait en exergue la « peur des sanctions » et le second, représentant près de 21 % des préoccupations exprimées, celle du temps consacré aux démarches administratives.

    Par ailleurs, la mise en œuvre des nouvelles règles en matière environnementale, notamment la fameuse conditionnalité renforcée, augmente fortement la complexité des règles et fait naître dans certains cas, des difficultés de mise en œuvre réelles pour nos services. Cette complexité s'explique, jusqu'à un certain point, par des chevauchements entre les différents instruments verts de la PAC, notamment les normes en matière de bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) ainsi que les nouvelles interventions comme les écorégimes. Il est évident que dans un souci d’amélioration permanente, une analyse à posteriori de chaque processus s’avère nécessaire.