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La stratégie de décarbonation des cimenteries

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 1109 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 26/05/2023
    • de ANTOINE André
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    La fabrication de ciment émet énormément de CO2, vu la nécessité de chauffer le calcaire afin d'obtenir une réaction chimique qui elle-même dégage aussi du gaz carbonique. Cette émission s'additionne à celle liée au combustible utilisé pour chauffer, le pire étant évidemment le charbon.

    La décarbonation de l'industrie du ciment est donc un enjeu majeur dans l'optique de la neutralité carbone réclamée par le Green Deal européen en 2050. Les trois principaux cimentiers belges sont engagés dans des plans de transformation qui intègrent un volet de captation du CO2 et son acheminement, via le port d'Anvers, dans les puits de stockage de la mer du Nord.

    Heidelberg (Inter-Béton) vient ainsi de lancer dans son usine d'Antoing la production d'un béton 60 % moins polluant, appelé EcoCrete. L'utilisation de combustibles alternatifs, comme la biomasse, est combinée au recyclage de béton (issu entre autres des chantiers de démolition) et de l'eau.

    Chez CCB, à Gaurain-Ramecroix, l'idée, outre la captation de CO2 via une nouvelle unité, est de faire diminuer drastiquement la part des combustibles fossiles et de modifier la composition du béton pour réduire la part du calcaire. Un investissement d'un demi-milliard d'euros qui doit amener la neutralité carbone dans 10 ans.

    Chez Holcim, à Obourg, il est question d'une refonte totale du site, sous le nom de programme Go4zero, et d'un investissement identique à celui de CCB. Il s'agit, outre la production d'énergie renouvelable sur site via un partenariat avec TotalEnergies, de n'utiliser que des combustibles alternatifs dès 2026 et de privilégier un nouveau mode de combustion qui permet de concentrer le CO2 dans les fumées avant de l'emmener à Anvers via une collaboration avec Air Liquide.

    L'occasion pour nous d'interroger Monsieur le Ministre sur les objectifs de réduction des émissions de CO2 fixés pour les cimenteries d'ici 2030. Les objectifs seront-ils traduits en normes réglementaires ? Si oui, sous quelles formes ?

    Au passage, comment la Région wallonne contrôle-t-elle les émissions de CO2 d'un secteur responsable au premier chef de la production de dioxyde de carbone par sa consommation considérable d'énergies primaires émettrices de gaz à effet de serre ?

    En cas de non-respect des exigences environnementales nouvelles, quel type de sanctions va-t-il leur infliger ?

    Comme Ministre de l'Environnement, compte-t-il conclure avec ce secteur un authentique accord de branche primant leurs comportements plus écologiques ?
  • Réponse du 03/07/2023
    • de HENRY Philippe
    La Région wallonne n’a pas fixé d’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour l’industrie cimentière via des normes réglementaires. En effet, comme l’honorable membre doit le savoir, les émissions de gaz à effet de serre des cimenteries comme celles des toutes les grandes installations industrielles européennes sont incluses dans le système européen d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (European Emissions Trading System, EU ETS). L’objectif de réduction des émissions des gaz à effet de serre des installations visées par l’EU ETS est géré au niveau européen de façon globale.

    Dans le cadre du ‘fit for 55’, le niveau d’ambition de l’EU ETS existant a été renforcé en faisant passer l’objectif de réduction des émissions ETS de l’ensemble des installations européennes de 43 % à 62 % d’ici 2030, par rapport au niveau d’émissions de 2005. Afin d’atteindre cet objectif, le système prévoit l’obligation pour l’ensemble des acteurs de surveiller leurs émissions et de restituer des quotas afin de les couvrir annuellement. Les quotas disponibles sont plafonnés et ce plafond diminue chaque année afin d’atteindre l’objectif fixé.

    Une partie de quotas sont distribués gratuitement aux installations industrielles selon des référentiels définis au niveau européen et mis à jour tous les cinq ans, l’autre partie étant mise aux enchères. Le prix du carbone découlant de l’offre et de la demande de quotas doit en première ligne conduire à des investissements de leur part pour diminuer leurs émissions.

    La surveillance des émissions de gaz à effet de serre doit être réalisée selon un plan de surveillance approuvé par l’Agence wallonne de l’Air et du Climat.

    Ce plan de surveillance est établi selon des règles harmonisées au niveau européen. Chaque année, les émissions sont vérifiées par un vérificateur accrédité.

    Il n’existe donc aucun objectif de réduction individuel pour les cimentiers wallons comme pour toutes les entreprises concernées par le système, mais bien une obligation de restitution pour couvrir leurs émissions. En cas de non-restitution dans les délais, de très lourdes amendes sont prévues par la réglementation européenne.

    En ce qui concerne les accords volontaires de troisième génération, le secteur du ciment fait clairement partie des secteurs prioritaires avec lequel la Région souhaite conclure une future convention carbone pour autant que les objectifs soient ambitieux. Ce travail est en cours et devrait aboutir avant la fin de cette année.

    J’en profite pour rappeler que l’objectif des conventions carbone est d’accompagner les entreprises vers la neutralité carbone en 2050, et de contribuer collectivement de manière significative à l’atteinte des objectifs climatiques wallons.

    L’engagement des entreprises portera principalement sur la réduction de l’empreinte carbone de l’entreprise, mais intègrera également des objectifs complémentaires de décarbonation des procédés, des objectifs en gestion et efficacité énergétique et des objectifs renouvelables dans les conventions. La captation et le stockage du CO2 seront donc valorisables. Ces communautés carbone permettront de créer des synergies et d’encourager les partenariats techniques et technologiques ambitieux afin d’activer des potentiels additionnels et de favoriser le passage à l’action par rapport aux accords actuels.

    En échange de leurs engagements, les entreprises bénéficieront de contreparties pour les accompagner et favoriser le passage à l’action tout en assurant la proportionnalité du soutien.