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L'action du groupe TotalEnergies dans le développement de centrales solaires en Espagne

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 1126 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 31/05/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    La construction de 48 centrales solaires d'une capacité totale de 3 GW permettant d'alimenter près de 4 millions de personnes en électricité en Espagne, c'est ce qu'a annoncé le groupe TotalEnergies.

    « Le développement de ces fermes solaires contribuera massivement à la transition énergétique du pays » et permettront à TotalEnergies de se rapprocher de son « ambition d'atteindre 100 GW de capacité brute installée de génération électrique renouvelable à travers le monde à l'horizon 2030 », a déclaré Patrick Pouyanné, PDG du groupe.

    TotalEnergies va déployer une série de « mesures de compensation » comme le marquage des oiseaux pour observer leur comportement, la location de 400 hectares supplémentaires pour des actions de conservation, ainsi que le versement d'une allocation débouchant sur des remises sur les factures d'électricité des habitants locaux. Parallèlement, une formation en construction et en opération de maintenance sera mise sur pied pour les habitants des communes avoisinantes.

    Quel regard porte Monsieur le Ministre sur cet ambitieux projet ?

    La Wallonie pourrait-elle accueillir de telles infrastructures sur son territoire ?

    Quels sont les éventuels freins actuels au développement de tels projets ?

    Son administration a-t-elle eu des contacts avec le groupe TotalEnergies pour la construction de fermes solaires similaires en Wallonie ? Avec d'autres entreprises peut-être aussi ?

    La Wallonie pourrait-elle aussi imposer des « mesures de compensation » si des fermes solaires étaient construites chez nous ?

    A-t-il déjà une idée du type de compensations qui seraient réclamées ?
  • Réponse du 27/07/2023
    • de HENRY Philippe
    Ambitieux est bien le mot. Quelques jours avant son assemblée générale, TotalEnergies a annoncé avoir reçu les autorisations environnementales du ministère espagnol de la transition énergétique et des communautés autonomes pour développer ces 48 centrales solaires en Espagne.

    Je suis bien sûr enthousiasmé de voir de tels projets se déployer où que ce soit en Europe et dans le monde. Je souhaiterais bien entendu pouvoir initier de tels projets en Wallonie, mais force est de constater que les situations de la Wallonie et de l’Espagne sont bien différentes. Tout d’abord, il faut rappeler que ces projets concernent 48 centrales qui seront construites dans plusieurs régions espagnoles, soit dans la communauté de Madrid (soit des capacités installées de 1,9 gigawatt), dans la région de Murcie (plus de 350 mégawatts), en Castille-La Manche (plus de 300 MW), en Andalousie (263 MW) et en Aragon (environ 150 MW). L’ampleur du projet doit donc d’abord être rapportée à la taille du pays et des régions qui le composent. De plus, des différences significatives entre les territoires considérés portent sur la densité de population et l’ensoleillement.

    À ma connaissance, ni mon cabinet ni mon administration n’ont été contactés par TotalEnergies ou pour des projets de telle ampleur, en revanche, bien sûr, des entreprises se profilent pour installer des champs photovoltaïques.

    Avant d’aller plus loin, si nous considérons les projets de photovoltaïque de puissance, la meilleure façon d’éviter les atteintes à la biodiversité est de privilégier des sites “à moindres enjeux environnementaux”, en donnant la priorité aux espaces déjà artificialisés ou dégradés : toitures des bâtiments, parkings, friches industrielles, sites pollués, délaissés routiers et autoroutiers…

    Couvrir les parkings pourrait être une option intéressante qui permettrait de combiner plusieurs avantages parmi lesquels l’ombrage des véhicules.

    Ensuite, bien entendu, de tels projets doivent s’inscrire dans le respect de la législation environnementale qui organise avec l’octroi des permis et quand c’est nécessaire la mise en œuvre des compensations. Les mesures de compensation font partie intégrante du dossier de demande de permis sur base d’un protocole défini par le DNF (Département de la Nature et des Forêts) et le DEMNA (Département de l’étude du milieu naturel et agricole).

    Le DNF décrit les mesures de compensation comme les actions positives pour la biodiversité mises en œuvre pour contrebalancer les impacts résiduels d’un projet sur l’environnement. Une fois que le rayon et la superficie de mise en place de celui-ci sont déterminés, le porteur du projet investigue donc les emplacements les plus adéquats en fonction de ses connaissances du site.

    Pour l’éolien, les mesures de compensation doivent répondre aux caractéristiques suivantes :
    • concerner la ou les espèce(s) et/ou habitat(s) pour lequel l’impact a été identifié ;
    • contrebalancer les dégâts occasionnés ;
    • respecter dans la mesure du possible un principe de proximité lorsque cela se justifie ;
    • être accompagnées d’un cahier des charges clair et précis pour la mise en œuvre ;
    • être opérationnelles au moment où l’impact négatif devient effectif, en général avant l’implantation des éoliennes.

    En matière de photovoltaïque, les incidences potentielles se situent au niveau des pressions sur les sols, sur le microclimat sous les panneaux (effet d’ombrage et modification de la température et de l’hygrométrie du sol), sur la flore et la faune sauvage. Les mesures de compensation éventuelles auraient donc pour objectifs d’apporter une contrepartie à des incidences de ce type, si elles n’ont pu être évitées ni suffisamment réduites.

    Pour conclure, je voudrais attirer l’attention de l’honorable membre sur le fait que « Bien conçus, les parcs solaires ont des effets bénéfiques sur la biodiversité » (https://www.revolution-energetique.com/les-parcs-photovoltaiques-peuvent-ils-faire-bon-menage-avec-la-biodiversite/). Un article publié en 2021 répertorie une série de projets de recherche qui ont mené à des conclusions similaires aux Pays-Bas et en Allemagne. On en retient que des parcs photovoltaïques bien conçus, exploités et entretenus peuvent avoir des effets bénéfiques sur la biodiversité, ils abritent une belle diversité biologique, les structures d’habitat restent intactes et les panneaux offrent un refuge à différentes espèces. De plus, si on les compare aux monocultures agricoles intensives, ils peuvent être plus performants, tant pour ce qui concerne le développement d’une végétation variée que l’apparition d’habitats favorables aux oiseaux et aux insectes. En revanche, les parcs solaires développés uniquement dans le but de maximaliser le rendement énergétique peuvent provoquer un déficit de lumière pour les plantes et une distribution inégale de l’eau sur le sol. Cette situation peut entraîner une réduction de la végétation et la disparition de certaines espèces. Elle pourrait aussi affecter la qualité des sols, avec des effets à long terme sur leur teneur en carbone.