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Les enseignements de la visite de terrain dans les Hautes Fagnes après l'incendie

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 602 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 09/06/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    L'incendie qui a ravagé 155 ha de végétations dans les Hautes Fagnes a été au cœur de nombreux questionnements lors de la séance plénière du Parlement de Wallonie le 31 mai dernier. Dans un premier bilan, Madame la Ministre disait que ce sinistre ne devrait pas être catastrophique pour la flore puisque l'incendie est resté en surface. Pour la faune, on pouvait craindre des dégâts plus importants. Elle évoquait une visite de terrain programmée le 1er juin et une évaluation dans les jours qui suivent.

    Qu'est-il ressorti de sa visite sur site ?

    Ce que l'on a vécu là-bas sera-t-il utile dans la mise en place de la Cellule de vigilance qui est actuellement à l'étude ?

    De quelle manière alors que le risque de départ de feu était jugé faible au moment de l'incident ? A-t-on manqué de vigilance ?

    A-t-on une analyse plus fine des dégâts occasionnés par l'incendie ? 

    Quand sera lancé le processus de restauration ? Comment et par qui sera-t-il effectué ?

    L'incident aura-t-il des répercussions sur le mode de fonctionnement du Département Nature et Forêts ?

    De quoi parle-t-on alors, de l'organisation, des effectifs ?
  • Réponse du 07/07/2023
    • de TELLIER Céline
    Le principal enseignement qu’il me semble important de souligner, c’est l’excellente collaboration entre les services de secours et les agents du Département nature et forêt, qui ont pu apporter toute leur expertise. Le chef de cantonnement, par sa connaissance du terrain, a pu aider les services de secours à prendre les bonnes décisions pour la mise en œuvre des moyens (humains et matériels) et la localisation de ceux-ci aux endroits les plus pertinents.

    L'incendie est probablement dû à une imprudence humaine, car le feu est parti le long d'un sentier de promenade très fréquenté, le Eifelsteig. Le service de surveillance du DNF interpelle régulièrement les personnes qui ne parviendraient pas à boucler cette longue étape et qui voudraient camper illégalement. Le SPW continuera à sensibiliser le grand public au risque d’incendie.

    Pour la zone touchée par l’incendie, il est prévu que le DNF installe encore des panneaux d'information supplémentaires le long de ce sentier de promenade très apprécié. L’objectif est de sensibiliser les utilisateurs au danger d'incendie et à l'interdiction légale d'allumer des feux.

    La zone touchée par l'incendie ne contient aucune infrastructure d'accueil du public. Cette zone est donc en permanence interdite au public. La mesure de précaution prise le 30 mai dernier d’interdire l’accès de certaines fagnes concerne des Fagnes près de Baraque Michel - Botrange et dans les Fagnes de l'est, habituellement interdites d'accès au printemps lorsqu'il y a un danger d'incendie. Il existe toujours beaucoup d'autres possibilités de se promener autour de ces fagnes et dans les forêts environnantes.

    D’un point de vue matériel, le quad du cantonnement d’Elsenborn a été bien utile pour tirer les lignes de tuyaux depuis les autopompes jusqu’aux endroits de déploiement des lances. L’utilisation des drones avec caméra thermique de la Protection civile a également été très efficace pour détecter les points de danger.

    Il a également été relevé l’importance de disposer, pour des sites comparables, d’un plan d’intervention qui reprendra pour chaque site :
    - les accès avec caractérisation de ceux-ci pour les différentes classes de véhicules d’intervention (praticabilité du revêtement, hauteurs et largeurs admissibles, tonnage permis notamment par rapport aux éventuels ponts …) ;
    - les points de première destination (PPD) ;
    - les points de croisement ou de retournements des charrois ;
    - les endroits stratégiques où disposer les moyens d’extinction ;
    - les lignes de tuyaux à tirer ;
    - les points d’eau où les services de secours peuvent se ravitailler.

    Il est impossible de disposer de ce type de plan pour la totalité de la Wallonie, mais une réflexion est bien en cours sur une liste de sites plus sensibles pour lesquels un plan d’urgence et d’intervention sera vraiment utile et efficace.

    Il y aura lieu d’évaluer la pertinence de distinguer les moyens de surveillance de la situation de risque d’incendie en fonction du type de milieux. En effet, les milieux que l’on retrouve dans les Hautes Fagnes sont très différents des milieux forestiers. La période de risque n’est également pas la même. Les conditions de ce printemps ont été particulièrement difficiles à interpréter car il y a eu beaucoup d’humidité suivie d’une longue période sèche, sans toutefois avoir des températures importantes. Le vent soutenu de nord-est a joué un rôle prépondérant. Le dérèglement climatique risque de créer à l’avenir des conditions auxquelles nous ne sommes pas habitués, et il faudra continuer à nous y préparer au mieux.

    Concernant la cellule de vigilance, le DNF va effectuer un suivi rigoureux des indices météorologiques, dont l’indice IFM (Indice Forêt Météo) de manière à pouvoir détecter l’entrée dans un cycle propice aux risques d’incendie en milieux naturels. Auparavant, cette surveillance se faisait déjà, mais de manière moins structurée et sur base uniquement des constatations de terrain et de prévisions météo classiques.

    La multiplication des phénomènes climatiques anormaux nous amène à optimiser et moderniser nos méthodes de prévention. Les constatations de terrain seront bien entendu toujours nécessaires et feront également partie de l’appréciation. Lorsque la situation le demandera, c’est un CELEX « incendie », dont l’opérationnalisation est en cours, sous l’égide du CRC, qui sera enclenché. Celui-ci sera alors alimenté par les constats du DNF au même titre que ses autres membres.

    En ce qui concerne les conséquences de cet incendie, il s'agit en effet d'un feu superficiel. Le feu n'est pas rentré dans le sol et les racines de la majorité des plantes n'ont pas été touchées, vu l’humidité du sol. Une semaine après le feu, beaucoup de zones commençaient déjà à reverdir. Les dégâts les plus importants concernent les oiseaux qui avaient leur nid au sol ou dans les buissons.

    Les habitats les plus précieux de cette zone, c'est à dire les lithalses (des cuvettes tourbeuses), n'ont pas été touchés par l'incendie, vu leur niveau d'humidité. Les spécialistes s'attendent également à une régénération des habitats de landes qui ont été restaurés ces dernières années.

    Plus de 10 hectares de terrains couverts de molinie, graminée facilement inflammable dans les fagnes, ont été restaurés ces 15 dernières années. On y trouve maintenant des landes humides. La présence de ces habitats restaurés, qui brûlent de manière moins violente, en contact des zones où se trouvaient les pompiers, a facilité l’extinction de l’incendie. Il faut aussi souligner que le DNF réalise chaque année des travaux de restauration d'habitats dans d'autres fagnes.