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La compatibilité de certains lotissements éloignés avec les centralités prônées par le futur Schéma de développement du territoire (SDT)

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 826 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 23/06/2023
    • de ANTOINE André
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Pour en avoir débattu voici quinze jours, le SDT soumis à enquête publique ambitionne de concentrer l'habitat sur les zones de centralités urbaines et villageoises identifiées par le futur SDT. L'inspecteur général de l'aménagement du territoire précisait de son côté qu'il faudrait étendre certains centres et d'autres revoir le périmètre potentielle d'extension.

    Ainsi, à Mont-St-Guibert, les habitants sont pour l'heure consultés sur le futur SDT, mais aussi sur le projet Jaurdinia. C'est en effet un dossier qui refait surface à la faveur de l'enquête publique qui vient de démarrer pour un projet de lotissement, à cheval sur les communes de Mont-Saint-Guibert et de Court-Saint-Etienne, sur lequel un promoteur souhaite construire 120 maisons individuelles. Seulement voilà, le permis date de 1993 et les critères en matière d'urbanisme et d'environnement ont radicalement changé.

    Construire sept logements à l'hectare était une pratique courante en 1993. Artificialiser les sols, cela ne préoccupait pas grand monde. A l'époque, les conseils communaux des deux communes concernées avaient donc délivré un permis d'urbanisation pour les 14 hectares de prairies et de zones boisées situées de part et d'autre du chemin de Beaurieux. La Société brabançonne de développement espérait donc y bâtir 120 logements individuels.

    Pendant 30 ans, ce projet est resté dans les cartons mais il en est ressorti il y a deux ans puisque le propriétaire, Emmanuel Busetti a souhaité mettre enfin son projet à exécution, faisant valoir que les terrains à bâtir étaient rares en Brabant wallon et que la demande était donc avérée.

    Le problème, c'est que 30 années ont passé, l'écologie est passée par là et les critères d'urbanisation n'ont plus grand chose à voir avec ceux en cours dans les années 90. Les communes ne sont donc pas favorables à la création de ce lotissement, même si le permis est toujours valide, comme l'explique Julien Breuer, le bourgmestre de Mont-Saint-Guibert.

    Si la question de la légalité du permis est tranchée, cela a été étudié par la Région wallonne, d'autres questions juridiques se posent et elles sont analysées par la commune en ce moment. Il s'agit par exemple de savoir si l'acte de 1993 n'est pas entaché d'irrégularités. Par ailleurs, ce serait quand même étonnant, qu'il n'y ait aucun moyen pour la Région wallonne d'éviter ce type d'urbanisation, surtout quand tous les niveaux de pouvoir sont clairement conscients que nous devons lutter contre l'artificialisation des sols.

    Pour les habitants des communes concernées, doublement consultés sur des dossiers et documents contradictoires sur le plan urbanistique, la perplexité est de mise : pour le SDT, l'essentiel doit se retrouver dans les centralités, pour Jaurdinia, 120 logements sinon plus envisagés en dehors de tout concept d'économies du SOL.

    Quelle hiérarchie des documents Monsieur le Ministre établit-il dans les deux dossiers soumis à enquête publique ?

    De quels moyens disposent encore les deux communes pour s'opposer au projet dont question ?

    Dans ce genre de dossiers, le promoteur peut-il espérer une indemnisation financière ?
    Si oui, à charge de quel pouvoir public : la région ou les communes ?

    L'exemple ne relève pas d'un cas particulier local, mais d'une hiérarchie de normes en Wallonie qui engage sa responsabilité !
  • Réponse du 17/07/2023
    • de BORSUS Willy
    Une demande de permis d’urbanisation est effectivement en cours d’instruction sur le site dit du « Jaurdinia ». Ce permis d’urbanisation permettrait la construction de 123 logements. Une nouvelle voirie doit également être réalisée. Ce terrain d’approximativement 14 hectares est situé en majeure partie en zone d’aménagement communal concerté, en zone d’habitat pour le solde. L’emprise du projet s’étalant sur deux communes, c’est le Fonctionnaire délégué qui est l’autorité compétente, conformément à l’article D.IV.22, 3°, du CoDT.

    La ZACC concernée est couverte par un schéma directeur dit « rue Fond des Vaux – Chemin de Beaurieu » qui s’étend sur le territoire des communes de Mont-Saint-Guibert et de Court-Saint-Étienne. Ce schéma directeur a été élaboré conformément à la circulaire ministérielle n°4bis relative à la mise en œuvre des zones d’extension de l’habitat du 23 mars 1981 et adopté par les Conseils communaux des deux Communes concernées en septembre 1993. Depuis l’entrée en vigueur du CoDT, tout schéma directeur adopté par le conseil communal avant le 1er mars 1998 devient schéma d’orientation local et est soumis aux dispositions y relatives (cf. art. D.II.68, §1er, du CoDT). Ce schéma directeur est partiellement révisé, dans sa partie nord par le rapport urbanistique et environnemental dit « Jaurdinia » adopté par le Conseil communal de Mont-Saint-Guibert en juillet 2006.

    Comme l’honorable membre le sait, il ne sera pas possible de « compter » sur une éventuelle péremption du SOL. Le CoDT fixe un certain nombre de dispositions en la matière. Aux termes de l’article D.II.68, § 2, un schéma ou une partie de schéma approuvé(e) par le Gouvernement avant l’entrée en vigueur du plan de secteur et qui n’a pas été révisé(e) en tout ou en partie après l’entrée en vigueur du plan de secteur, est applicable pendant 18 ans à dater de l’entrée en vigueur du Code. Dans ce cas, l’abrogation s’opère de plein droit. Le conseil communal peut toutefois proroger la validité du plan ou schéma pour une période de six ans, pour autant que la décision de prorogation intervienne au moins deux mois avant l’expiration du délai de 18 ans. Dans le cas qui nous préoccupe, cette disposition ne peut trouver à s’appliquer, dès lors que le schéma directeur devenu schéma d’orientation local a été adopté après l’entrée en vigueur du plan de secteur, qui date du 28 mars 1979.

    Il faut relever l’article D.IV.58. du CoDT qui permet de fonder un refus de permis sur une révision en cours du plan de secteur ou l’établissement ou la révision d’un schéma de développement communal (SDC) ou d’un schéma d’orientation local (SOL). Ce refus devient toutefois caduc si le nouveau plan ou schéma n’est pas entré en vigueur dans les trois ans qui suivent la décision d’établissement ou de révision. Pour mémoire, ces schémas sont menés à l’initiative communale, les communes concernées ont donc la possibilité d’actionner ce levier.

    Enfin, une commune peut abroger explicitement un SOL. En effet, le CoDT permet d’abroger des outils obsolètes. Ainsi, l’article D.II.15 § 3, du CoDT dispose que lorsque les objectifs d’un SDC ou d’un SOL sont dépassés, le conseil communal peut l’abroger en tout ou partie. Les objectifs d’un schéma sont présumés dépassés après 18 ans à dater de la publication au Moniteur belge de l’arrêté du Gouvernement adoptant le schéma ou la publication au Moniteur belge de l’avis indiquant que le schéma est réputé approuvé. Un schéma peut aussi être abrogé lors de l’adoption ou de la révision d’un autre schéma ou du plan de secteur. Toutefois, suite à l’abrogation d’un SOL mettant en œuvre une zone d’aménagement communal concerté, ce qui est le cas en l’espèce, les affectations prévues au SOL resteraient d’application et cette zone mise en œuvre. Comme ce schéma directeur devenu SOL prévoit des zones d’habitat en ordre ouvert et semi-ouvert, ces affectations seraient bien maintenues en cas d’abrogation de ce SOL.

    A ma connaissance, aucune des communes n’a entamé à ce jour une telle démarche de révision ou d’abrogation de SOL.

    En l’état et à défaut de révision ou d’abrogation initiée par les communes concernées, il y a bien lieu de considérer que le SOL est de stricte application.

    Quant à la hiérarchie des documents, le SDT a bien comme ambition de devenir l’outil « faîtier » pour l’aménagement du territoire en Wallonie. En ce qui concerne le résidentiel par exemple, le SDT s’appliquera aux SOL et aux permis de plus de 2 hectares cinq ans après son entrée en vigueur sauf si un SDC ou un SDP à tout le moins thématique « optimisation spatiale » est adopté par la ou les communes concernée(s). Dans ce cas, ce sont les mesures guidant l’urbanisation ou encore les centralités de ce schéma communal ou pluricommunal qui s’appliqueront.

    Le SDT est, à l’heure actuelle, encore au stade de projet. Il ne saurait dès lors être question de le considérer comme étant d’application et de motiver une décision, quelle qu’elle soit, en s’appuyant sur celui-ci.

    Portant, avec le Gouvernement, ce projet de SDT, je suis le premier convaincu de l’importance des constats et enjeux qu’il met en avant, et de la nécessité de revoir la façon d’artificialiser notre territoire. Les Fonctionnaires délégués sont au quotidien les premiers relais pour porter dans leurs avis et décisions les valeurs défendues par mon administration.

    Je rappelle aussi que le SDT est actuellement en projet, dont la version finale pourra évoluer – éventuellement significativement – en fonction des consultations en cours.

    Je me permets aujourd’hui de ne pas préjuger de cette décision à venir. De mon côté, je pourrais être l’autorité compétente en cas de recours de la part du demandeur. Il comprendra dès lors que je ne prononcerai pas sur ce point avant une analyse complète du dossier dans le cadre de cet éventuel recours.