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La précarité énergétique liée aux pics de chaleur

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 1272 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 30/06/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    Si la précarité énergétique est le plus souvent assimilée à la sensation de froid dans le logement en périodes hivernales, elle se rencontre également face aux pics de chaleur d'été, les températures élevées étant difficiles à supporter quand on habite une bouilloire énergétique !

    Ces épisodes de chaleur et l'insuffisance d'adaptation des bâtiments engendrent des conséquences sanitaires, sociales, économiques et environnementales ! Elles se rencontrent souvent chez les personnes qui occupent des logements moins bien isolés, moins ventilés et rarement équipés de climatisation !

    Comment Monsieur le Ministre rencontre-t-il la problématique et comment la décrit-il ?

    Quelles sont les mesures prises pour aider les personnes souffrant de cette situation ?

    Quels sont les conseils qui peuvent être apportés aux populations qui se retrouvent dans une situation de précarité énergétique d'été pour rafraîchir l'immeuble ?

    Des moyens budgétaires sont-ils mis à disposition ? Lesquels et de quelle grandeur ?

    L'installation de protections solaires fixes, d'occultants, de brasseurs d'air fixe, de revêtements réfléchissants ou de végétalisation sont-elles subventionnées ?

    De quelle manière et à quelles conditions ?

    Quel est le pourcentage de la population wallonne concernée ?

    Quelles sont les correspondances qui existent entre les précarités énergétiques dites d'hiver et d'été ?

    La climatisation ne constitue-t-elle pas une fausse solution ?

    N'a-t-elle pas pour conséquence de rejeter l'air chaud à l'extérieur des bâtiments, augmentant le phénomène de l'îlot de chaleur et les émissions de CO2, ainsi que la consommation d'électricité ?

    Existe-t-il un encadrement légal à l'utilisation de la climatisation ? Quel est-il ?
    Le cas échéant, ne conviendrait-il pas de légiférer en la matière ?

    Ne convient-il pas d'imposer pour de nouvelles constructions une architecture bioclimatique ?
  • Réponse du 19/09/2023
    • de HENRY Philippe
    Le phénomène de surchauffe estivale est bien réel et peut varier fortement d’un bâtiment à l’autre.

    Il faut noter que ce sont surtout les apports solaires non maîtrisés via les fenêtres qui sont les principaux responsables de la surchauffe en été.

    Ce phénomène peut s’observer à la fois dans les passoires énergétiques hivernales, mais aussi dans les bâtiments mieux isolés où la problématique de la surchauffe n’a pas été étudiée.

    De même, certains bâtiments fort énergivores en hiver peuvent avoir un très bon confort estival vu la présence des petites fenêtres avec volets et la masse thermique avantageuse du bâtiment.

    Ainsi, il est assez compliqué d’avoir une vue claire sur la correspondance entre les précarités « d’été » et « d’hiver ». Il est également difficile d’estimer le pourcentage de la population wallonne qui est concerné par la « précarité d’été ».

    À ce jour, en Wallonie, il n’y a pas d’aide pour les protections solaires, les brasseurs d’air, les revêtements réfléchissants ou la végétalisation des toitures.

    À Bruxelles, il existe une prime pour la végétalisation des toitures.

    Conseils à court terme/sans trop de moyens :
    • ventilation/aération :
    o en l’absence de ventilation mécanique, aérer la nuit en ouvrant les fenêtres quand la température extérieure est plus basse que la température intérieure ;
    En journée, faire l’inverse : laisser les fenêtres fermées, sauf si la température intérieure venait à être plus élevée que la température extérieure ;
    o en présence de ventilation mécanique, la laisser au minimum en journée, pour maintenir un renouvellement d’air minimal. Et, la nuit, la faire fonctionner à plein débit quand la température extérieure est plus basse.
    • protections solaires :
    o placer des protections solaires extérieures (voiles pare-soleils) sur les fenêtres, particulièrement les fenêtres de toit ;
    o à défaut, placer un drap à l’extérieur sur la fenêtre et/ou placer un store intérieur qui aide déjà.

    Conseils à plus long terme (= avec travaux) :
    • en cas d’ajout/de remplacement de fenêtres assez bien ensoleillées :
    o placer des protections solaires dignes de ce nom et/ou
    o placer un vitrage antisolaire ;
    • prévoir des débordants pour ajouter de l’ombrage au niveau des fenêtres ;
    • isoler le bâti ;
    • augmenter la masse thermique du bâtiment pour stabiliser la température intérieure tout au long de l’année.

    Il est évidemment préférable de se passer de refroidissement actif dans les bâtiments. La consommation afférente à la climatisation a un impact non négligeable en termes de CO2 ainsi que sur la facture d’énergie (en dehors du cas particulier de l’autoconsommation instantanée d’électricité renouvelable produite sur place).

    Cependant, il convient de prendre également en compte la santé des personnes. Passer plusieurs nuits dans un bâtiment à 30°C ne permet pas d’avoir un repos réparateur. L’usage de climatisation active peut pallier à court terme à certaines situations problématiques.

    À noter que l’impact d’un système de climatisation est fort différent en fonction du type d’appareil.

    D’un côté du spectre, il y a les petites climatisations mobiles qui ont généralement un rendement assez faible et demandent en plus de laisser une fenêtre ouverte, ce qui fait entrer l’air chaud extérieur.

    De l’autre, il y a les pompes à chaleur géothermiques qui peuvent fonctionner en mode « free-cooling » : la source de chaleur permet, sans faire usage de la pompe à chaleur de disposer d’eau à 10-12°C pour rafraichir le bâtiment ‘gratuitement’ : la consommation résiduelle des seules pompes de circulation est en effet très faible.

    Entre ces 2 cas de figure, il y a les PAC avec source « air extérieur » : les climatiseurs fixes habituels. Ils mettent en œuvre un refroidissement actif bien plus efficace que les appareils mobiles.

    Il n’y a pas de cadre légal pour les appareils mobiles de climatisation (qui peuvent être déplacés d’une pièce à l’autre).

    Il serait assez illusoire de légiférer en la matière (comme pour les petits chauffages électriques portatifs).

    Par contre, pour les installations de climatisation fixes (PAC air-air, air-eau ou géothermique), il existe des prescriptions :
    • l’obligation de recourir à un frigoriste certifié pour la gestion des gaz réfrigérants des installations de refroidissement et des pompes à chaleur non hermétiquement scellées en usine ;
    • des prescriptions techniques dans l’annexe C4 PEB (dimensionnement de l’installation, calorifugeage des conduites d’eau glacée, régulation de la distribution et de l’émission de froid).

    Les exigences PEB intègrent bien une exigence sur la surchauffe des bâtiments résidentiels. Cela dit, les calculs PEB se font actuellement avec un pas de temps mensuel, ce qui ne permet pas d’apprécier finement ce phénomène.

    L’exigence PEB a néanmoins le mérite de mobiliser l’attention des concepteurs autour de cette problématique.

    Pour le futur, la prochaine version de la Directive PEB va probablement imposer de baisser le pas de temps du calcul PEB et, de cette façon, rendre possible la prise en compte de ce phénomène de façon plus réaliste.

    Ce n’est que sur cette base que l’imposition d’exigences plus strictes sur ce sujet sera raisonnablement possible. Cette prochaine version intègrera également à priori l’imposition d’exigences systèmes pour cadrer le placement de protections solaires automatisées, quand on décidera d’en placer.