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La production de protéines végétales en Wallonie

  • Session : 2022-2023
  • Année : 2023
  • N° : 865 (2022-2023) 1

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  • Question écrite du 11/07/2023
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Comme pour l'énergie, un des enjeux majeurs pour l'Europe de demain sera d'assurer son autosuffisance alimentaire. Depuis de nombreuses années, séduite par les chantres d'un libéralisme exacerbé, l'Europe a confié une partie de son alimentation à une source d'approvisionnement extérieure. Or, les dernières crises en date nous rappellent encore, combien, nous sommes fragiles lorsque nous sommes dépendants d'une source extérieure.

    À ce titre, le Commissaire européen à l'Agriculture a annoncé récemment le lancement d'une stratégie européenne sur les protéines végétales qui devrait débuter début 2024. Il s'agit selon l'Europe d'un enjeu majeur de souveraineté, deux tiers des protéines végétales consommées sur le continent sont aujourd'hui importés, et 90 % pour le soja.

    Toutefois, il ne suffira pas seulement de produire européen ; il faudra aussi encourager la consommation. En effet, les protéines végétales servent aujourd'hui en Europe essentiellement à nourrir le bétail.

    Les Européens mangent moitié moins de légumineuses que les habitants du reste du monde. Il apparaît pourtant qu'une augmentation de la consommation de légumes secs aurait de nombreux bénéfices :
    - pour leurs finances (des protéines saines rassasiantes et très bon marché);
    - pour leur santé (cardio-vasculaire notamment);
    - pour l'environnement (des cultures qui se passent d'engrais et enrichissent même les sols, et en parallèle une diminution possible du nombre d'élevages industriels polluants).

    Ainsi, mes questions visent à savoir si Monsieur le Ministre a été informé de ce plan.

    Comment est-il accueilli par les acteurs de terrain en Wallonie ?

    Se met-il en place ou existe-t-il des réticences quant à son application par les agriculteurs wallons ?

    Une campagne visant à encourager la consommation de légumineuses wallonnes est-elle envisagée afin de promouvoir la culture et la consommation de ces produits ?
  • Réponse du 26/07/2023
    • de BORSUS Willy
    Nous suivons attentivement les travaux entrepris par la Commission européenne quant aux moyens d'exploiter les possibilités de production de protéines végétales dans l’UE. Il sera bien entendu indispensable de tenir compte des besoins des agriculteurs, des producteurs et des consommateurs.

    L’approvisionnement en protéines végétales et la production de ces protéines pour le secteur agroalimentaire ont stimulé le débat politique à plusieurs reprises au niveau de l’UE. Sur le plan économique, je tiens tout d’abord à rappeler que la filière de l’élevage (production de viande, de produits laitiers et œufs) représente un important volet de l’agriculture de l’Union. Si le développement d’une stratégie européenne en matière de protéines végétales parait nécessaire pour garantir la souveraineté alimentaire de l’Union, il me semble toutefois essentiel de travailler sur les possibles synergies et complémentarités sectorielles pour soutenir la compétitivité agricole de l’UE.

    Néanmoins, je tiens à préciser qu’il ne faut pas voir ce dossier avec le seul « prisme » de protéines végétales en strict remplacement des protéines animales.

    Il est aussi important de rappeler que, grâce aux prairies exploitées par nos bovins, le niveau d’autonomie protéique global de la Wallonie reste élevé et est supérieur à 75 % (moins de 40 % en Flandre) pour les élevages bovins.

    Toutefois, il subsiste effectivement un véritable enjeu pour les approvisionnements liés aux alimentations animales des monogastriques et humaines pour lesquelles les matières premières sont en grande partie importées. En Wallonie, la production de légumineuses à graines ne représente qu’une très faible partie de la SAU (un peu plus de 1 %, soit 9 500 ha en 2022). La vision portée par le plan stratégique du Collège des Producteurs est d’atteindre une augmentation de 15 000 ha d’emblavement annuel de cultures protéagineuses à l’horizon 2030 (équivalent à 18 000 ha environ).

    Face à de multiples enjeux majeurs qui déstabilisent les marchés, notamment géopolitique, climatique et énergétique, l'Europe de demain doit mobiliser ses différents outils permettant d’assurer son autosuffisance et sa sécurité alimentaire. Pour diversifier ses chaines d’approvisionnement et diminuer ses dépendances stratégiques au niveau agricole, l’Europe a la responsabilité de pleinement exploiter le concept « d’autonomie stratégique ouverte », et cela passe notamment via la conclusion d’accords commerciaux ambitieux et équilibrés. En effet, les accords de libre-échange permettent aussi d’appréhender ces nouveaux défis. L’Europe doit plus que jamais nouer des alliances avec des partenaires stratégiques pour renforcer la résilience de nos secteurs économiques et développer nos chaines de valeur à l’échelle régionale et mondiale, tout en protégeant nos filières agricoles les plus sensibles.

    Le principal défi de la filière protéines végétales est de favoriser la prise de risque technique et économique des producteurs wallons en vue de répondre aux opportunités liées aux perspectives prometteuses de marchés et d’innovations à l’échelle wallonne et européenne. Pour ce faire, une amélioration des perspectives économiques des producteurs est indispensable au travers : i) d’un partage des risques liés à des soutiens publics notamment la PAC, ii) de la mise en place de relations commerciales structurées entre les acteurs de la filière.

    Depuis la rédaction du plan stratégique « protéines végétales » du Collège des Producteurs en 2018, on observe une augmentation en continu des surfaces allouées aux légumineuses à graines (+64 % en 4 ans).

    Pour continuer cette progression et atteindre les objectifs du plan stratégique et de la stratégie européenne, il est nécessaire de poursuivre le soutien d’actions structurantes pour lever les freins évoqués précédemment, notamment :
    • renforcer les moyens de la recherche scientifique et de l’encadrement sur les facteurs techniques prioritaires qui affectent la production, la transformation et la rentabilité de la filière protéines végétales : une filière « protéines végétales » forte nécessite également la présence d’acteurs de transformation et de commercialisation des produits dérivés. Dans le cadre de la stratégie intelligente wallonne, 19 initiatives d’innovation stratégiques ont été lancées, dont l’une d’entre elles se focalise sur la recherche et développement dans le domaine des protéines végétales, visant à soutenir des projets de recherche innovants sur cette thématique au sein des universités pour élargir les sources protéiques disponibles et développer de nouvelles applications, mais également pour soutenir les entreprises du secteur agroalimentaire dans leurs activités de recherche et le développement de nouveaux produits à base de protéines végétales qui pourront être commercialisés tant localement qu’internationalement ;
    • assurer un dispositif de partage du risque au travers de la PAC par des mécanismes de soutiens financiers déjà en place (prime PAC de 375 euros/hectare pour une liste de cultures de protéagineux) ;

    • mettre à disposition des services de facilitation des relations de filières entre les producteurs et les transformateurs (au travers du Collège des Producteurs et de Wagralim).

    Une action de promotion des protéines végétales auprès des consommateurs a été définie dans le plan stratégique. Cette action sera pilotée par l’APAQ-W dès lors qu’un seuil critique de produits aura été atteint, car aujourd’hui les volumes produits sont hélas encore trop confidentiels. Par ailleurs, l’APAQ-W organise des animations et propose des recettes à base de protéines végétales.

    Concernant la promotion de la culture, le Cepicop organise pendant la durée du projet « Développement de filière(s) pilote(s) pour la production de protéines végétales en Wallonie » (du 1er mars 2021 au 29 février2024) avec la FWA, des visites d’essais (notamment lentilles, pois chiche et soja) à destination des producteurs.