Le développement du "smart farming"
- Session : 2022-2023
- Année : 2023
- N° : 940 (2022-2023) 1
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Question écrite du 05/09/2023
- de AHALLOUCH Fatima
- à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
Le "smart farming" a pour objectif la numérisation du secteur agricole qui est aujourd'hui un des secteurs de l'économie les moins numérisés. Le tout afin de rendre le secteur plus compétitif et de développer, je cite, « une agriculture pérenne et rentable » pour les agriculteurs wallons.
Les projets permettraient d'optimiser la production agricole, grâce au contrôle affiné des intrants dans le sol. Numériser l'agriculture permettrait de développer une banque de données agricoles de grande échelle permettant d'avoir une vue actualisée sur de nombreux paramètres des terres agricoles wallonnes.
Le projet DuratechFarm, par exemple, vise à intégrer l'agriculture de précision au sein d'une exploitation conventionnelle et bio. L'agriculture de précision vise à limiter l'utilisation d'intrants dans les parcelles agricoles au travers de techniques numériques notamment.
Plus globalement, quatre opportunités devraient émerger du "smart farming" : optimisation de la production, amélioration des pratiques agricoles, rétablissement du dialogue entre l'agriculteur et le consommateur et développement des activités commerciales des productions agricoles.
L'agriculture constitue un défi face au dérèglement climatique, la poussée démographique et la raréfaction des ressources. Il semble opportun d'investir dans le développement technique et économique de l'agriculture tant que les problématiques environnementales et sociales sont pleinement intégrées dans la démarche, ce qui semble être le cas.
Quels sont les détails des différents projets qui vont bénéficier du fonds de relance ? Monsieur le Ministre connaît-il le nombre d'agriculteurs wallons qui ont intégré les outils numériques dans leur quotidien ?
Surtout, comment ce projet de numérisation s'accorde-t-il avec les objectifs environnementaux ?
Qu'en est-il du volet social ?
Comment le travail des agriculteurs est-il préservé malgré la numérisation à l'œuvre ?
Réponse du 25/09/2023
- de BORSUS Willy
1. Sensibilisation au numérique :
La mission principale est d’assurer la cohérence des actions qui sont menées, mais également de mettre en œuvre des actions de sensibilisation sur l’importance de la transformation numérique dans le secteur agricole.
2. DURATECHFARM, plus-value économique et environnementale du Smart Farming au sein d’une exploitation agricole wallonne :
Le projet a pour but principal de mettre en lumière la plus-value économique et environnementale du Smart Farming. Le but est de proposer une vitrine de l’application du Smart Farming (SF) en Wallonie pour le secteur et d’établir des référentiels techniques et économiques.
Ce projet permettra également une mise en évidence des points bloquants pour l'intégration du Smart Farming au niveau wallon et la recherche de pistes de solutions possibles.
3. WallESmart : Plateforme transversale de gestion de ces données :
Le projet WallESmart 3 vise trois objectifs principaux :
- concevoir une plateforme numérique interopérable capable de mettre en réseau les données de la production animale et végétale et favoriser leur valorisation ;
- garantir que la sécurité de la plateforme est conforme aux besoins de l’agriculture wallonne ;
- permettre l’échange des données entre plateformes, pour autant qu’elles soient sécurisées.
4. OPENAGRO 4.2. Cadre juridique des bases de données, plateformes, et outils d’aide à la décision (OAD) agricoles :
Le projet OpEnAgro vise 4 objectifs principaux qui permettront de faire des propositions au Gouvernement wallon afin de définir et d’implémenter le cadre juridique nécessaire dans le contexte du SmartFarming :
- établir le socle de connaissances existant au niveau de la Wallonie en matière de plateformes et outils d’aide à la décision (OAD) destinés aux secteurs de l’agriculture et de l’élevage et de l’environnement et analyser la pertinence des dispositions juridiques qui y sont associées afin de garantir un accès optimal aux utilisateurs du secteur agricole, tout en préservant la reconnaissance des auteurs ;
- fournir les pistes d’amélioration et les outils de valorisation de la collecte, la consolidation, l’analyse et l’exploitation de données, et cetera ;
- contribuer à l’élaboration de propositions de bonnes pratiques dans le cadre de l’établissement d’un code de conduite wallon ;
- mettre en place un « comité des utilisateurs » représentatif.
5. MOBILAB : Conception et réalisation d’un laboratoire mobile pour la démonstration de l’application des capteurs et analyseurs innovants en agriculture et en agroalimentaire :
Le projet MOBILAB vise à concevoir et réaliser la mise en place à l'horizon 2024, d’un laboratoire mobile pour la démonstration de l’application des capteurs et analyseurs innovants en agriculture et en agroalimentaire. Ainsi de nombreux capteurs et analyseurs seront proposés pour la caractérisation des matières premières et produits, le suivi de la transformation et la détection de contaminants et stress.
6. AGROMET II. Météorologie de précision grâce à la combinaison du réseau météo de référence Agromet.be et du réseau collaboratif de stations météo connectées des agriculteurs :
La recherche menée dans ce projet porte sur la « combinaison » des deux sources de données en vue de leur renforcement mutuel : la qualité des stations météorologiques virtuelles dérivées du réseau Pameseb devrait être améliorée par l’addition des nombreuses stations d’agriculteurs ; les dysfonctionnements éventuels des stations d’agriculteurs seront détectés par le contrôle qualité Agromet.
La valeur référentielle des enregistrements météo Pameseb va être accrue grâce à l’acquisition de nouveaux pluviomètres performants et par un renforcement du contrôle qualité.
À l’issue de ces trois années de recherche, la qualité des stations météorologiques virtuelles Agromet sera améliorée, deux outils agrométéorologiques opérationnels seront mis à disposition des agriculteurs et un cadre clair aura été défini entre acteurs pour l’utilisation des nouveaux outils et le partage des données après la période projet.
7. SUNSHINE. Suivi et modélisation de la pousse de l’herbe pour une gestion smart (2.0) du pâturage :
Avec comme objectif d’accompagner les éleveurs dans cette gestion, le projet SUNSHINE vise à développer un Outil d’Aide à la Décision (OAD) qui permet la caractérisation de la pousse de l’herbe en prairies basée sur une combinaison de données d’observation de la terre, de données météorologiques et la modélisation ainsi qu’une gestion informatisée des calendriers de pâturage.
Cet outil numérique fournira à l’agriculteur une plus grande autonomie fourragère au travers notamment d’une meilleure valorisation des ressources et une diminution des apports extérieurs / intrants. Il aura également une vision globale des ressources fourragères lui permettant de mieux planifier l'utilisation des surfaces enherbées et l’organisation des fauches.
La question du nombre d'agriculteurs wallons qui ont intégré les outils numériques dans leur quotidien est complexe, car la notion d’outils numériques regroupe des concepts très variés.
Selon le baromètre de maturité numérique des entreprises 2022 réalisé par l’Agence du Numérique, par rapport aux entreprises du secteur agricole :
- 38 % disposent d’un site web ;
- 29 % utilisent un réseau social externe ;
- 22 % ont recours à un espace de stockage dans le Cloud ;
- 15 % ont acquis des nouveaux logiciels au cours des deux dernières années ;
Cependant, la numérisation des exploitations agricoles n'est pas uniforme et peut varier en fonction de plusieurs facteurs, tels que la taille de l'exploitation, la localisation géographique, les orientations technico-économiques (OTE), et cetera.
L’Association wallonne de l’Élevage (AWE) indique :
- une croissance annuelle de plus de 25 % des agriculteurs qui s'équipent de systèmes de monitoring ;
- plus de 10 000 vaches connectées ;
- +/- 80 % des éleveurs déclarent une naissance via un moyen numérique.
Le lien entre ces projets « numérisation » et les objectifs environnementaux est évident.
Si l’on prend le projet Duratechfarm en particulier, concernant le volet environnemental, le projet vise à mesurer l’impact du SmartFarming sur la consommation d’intrants ayant un impact sur l’environnement par rapport à l’impact sur la production. De plus, les leviers agronomiques prioritaires du projet sont la gestion de l’irrigation et de la teneur en carbone du sol, qui sont deux enjeux environnementaux majeurs.
Concernant le projet Sunshine en lui-même, la plus grande autonomie fourragère résultant de l’utilisation de l’OAD aura un impact environnemental positif de par une meilleure valorisation des ressources fourragères en quantité et en qualité, une diminution des apports extérieurs et de facto des impacts environnementaux directs et indirects liés à cette importation.
Quant au volet social, toujours en lien avec le projet Duratechfarm, le projet a pour tâche d’évaluer l’impact du SmartFarming sur l’organisation de l’exploitation, la formation nécessaire, le gain ou la perte de temps et le ressenti de l’exploitant agricole. Le projet vise également à communiquer des articles scientifiques et de vulgarisation afin de mieux préparer les agriculteurs dans leur démarche d’implémentation du SmartFarming.
L’intérêt du projet est d’étudier un exemple concret et actuel d’implémentation du SmartFarming dans une exploitation wallonne afin d’en évaluer les avantages et les inconvénients.
Concernant le projet Sunshine évoqué précédemment, la plus grande autonomie fourragère résultant de l’utilisation de l’OAD aura un impact sociétal au travers d’une amélioration de la qualité et de la traçabilité des produits sortants de la ferme ainsi qu’une amélioration de l’alimentation et la santé du bétail. Cet outil doit également permettre à l’agriculteur de gagner en indépendance dans ses prises de décision, ce qui contribue positivement à l’attrait du métier.
La numérisation et la technologie ont eu un impact significatif sur l'agriculture, améliorant l'efficacité et la productivité tout en aidant les agriculteurs à relever de nouveaux défis. Tout comme dans le secteur de l’industrie, le travail de l’agriculteur va donc évoluer.
Bien que la numérisation transforme l'agriculture, le travail des agriculteurs est préservé grâce à l'association d'une expertise humaine traditionnelle avec les avantages de la technologie. Les agriculteurs doivent évoluer avec les nouvelles technologies tout en conservant les compétences et les valeurs qui ont fait de l'agriculture un secteur essentiel de notre société.