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Les contrats de travail journaliers pour les allocataires sociaux

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 58 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 10/10/2023
    • de EVRARD Yves
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Depuis le début du conflit en Ukraine, notre pays a accueilli un nombre important de réfugiés ukrainiens : fin mars 2023, on parle de 11 000 personnes accueillies en Wallonie.

    En termes d'accès à l'emploi dans notre pays, les ressortissants ukrainiens bénéficient de la protection temporaire européenne qui donne et facilite leur accès au marché du travail. Toujours en termes d'emploi, le FOREm enregistrait 2 220 demandeurs d'emploi ukrainiens en Région wallonne de mars 2022 à fin janvier 2023. Les chiffres de mars comptent une légère augmentation, mais la mise à l'emploi par le FOREm ne concernait qu'environ 408 personnes.

    Mon questionnement concerne plus particulièrement les travailleurs qui bénéficient d'une allocation du CPAS et qui postulent dans le cadre d'emplois saisonniers ou de flexy-jobs, c'est-à-dire des types de contrats journaliers qui répondent à une demande très ponctuelle et très souvent dans des secteurs où les difficultés de recrutement sont prégnantes.

    Concrètement, ces personnes, qui ne demandent pourtant qu'à être utiles et à travailler, sont pénalisées par la fameuse règle qui dit que si leurs revenus dépassent le montant de l'allocation reçue par le CPAS, celle-ci sera diminuée d'autant. Une légère exonération autorise un revenu complémentaire, mais celui-ci reste très limité.

    Dans le cadre de ces emplois non pérennes, l'effet pervers est double : pour la personne, son incitation à travailler est tuée dans l'œuf et pour l'entreprise, le besoin urgent de travailleurs n'est pas rencontré.

    Très vite, ces travailleurs qui sont en capacité de travail et motivés comprennent qu'il n'est pas judicieux d'accéder à un contrat temporaire puisque leurs allocations en sont réduites des prestations effectuées.

    Ce système est donc non incitatif et pervers à un double niveau puisque les entreprises manquent de main-d'œuvre.

    Que compte faire Madame la Ministre pour inverser la logique ?
  • Réponse du 21/12/2023
    • de MORREALE Christie
    Cette matière relève de la compétence de l’État fédéral.

    Le revenu d’intégration (ou l’aide sociale équivalente, en ce qui concerne les Ukrainiens) est octroyé pour compenser un manque de ressources. Le législateur (fédéral) estime, par exemple, qu’une personne isolée doit avoir 1 263 euros pour vivre conformément à la dignité humaine.

    Donc :
    - si un isolé a 0 euro de ressources, il va recevoir 1 263 euros du CPAS ;
    - s’il a 100 euros de ressources sur le mois (il a travaillé un jour, par exemple), il aura 1 163 euros ;
    - et s’il gagne 500 euros, il recevra 763 euros du CPAS pour compléter.

    Il s’agit là du principe de subsidiarité du revenu d’intégration, qui vient en complément de tout le reste.

    Toutefois, pour encourager les personnes à travailler, le législateur (fédéral toujours) a prévu que les personnes qui reçoivent de l’aide du CPAS verront une partie de leurs revenus du travail immunisés. L’idée est que chaque personne qui commence à travailler recevra davantage que si elle ne travaillait pas. Le montant des ressources exonérées est de 297 euros par mois. Les personnes qui travaillent avant de venir au CPAS n’ont pas droit à cette exonération. Par ailleurs, cette exonération a une durée limitée à 3 ans maximum (sur une période de 6 ans).

    Dans cet exemple, si l’on arrondit l’exonération à 300 euros par facilité, et si l’on simplifie, le principe de cette exonération est le suivant :
    - si la personne gagne 100 euros sur son mois, 100 euros étant inférieur à 300 euros, la totalité sera exonérée, et la personne recevra toujours un revenu d’intégration de 1 263 euros (donc 1 363 euros de ressources au total, revenu d’intégration et salaire compris) ;
    - si la personne gagne 500 euros sur son mois, 300 euros seront exonérés, et le revenu d’intégration sera réduit en effet de 200 euros (donc 1 563 euros de ressources au total, 1 063 euros de revenu d’intégration et 500 euros de salaire).

    Par conséquent, il n’est pas exact de considérer que les personnes n’ont aucun avantage à travailler de manière épisodique : elles gagnent 297 euros de plus que le revenu d’intégration. Ce travail épisodique ne sort toutefois pas les personnes de la précarité, mais le revenu d’intégration reste une aide résiduaire.

    Cela n’empêche pas les personnes de travailler, malgré tout. En 2022, 10 % des bénéficiaires du revenu d’intégration étaient des personnes qui travaillaient et bénéficiaient d’un complément de revenu d’intégration (sans l’exonération, donc pour les mêmes ressources au total), et 5 % des bénéficiaires du revenu d’intégration travaillaient en bénéficiant de l’exonération ISP (elles percevaient jusqu’à 297 euros de plus que leur revenu d’intégration).