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Les données de l’Eurobaromètre sur la santé mentale

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 67 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 12/10/2023
    • de GALANT Jacqueline
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Selon l'Eurobaromètre sur la santé mentale de la Commission européenne, près de la moitié des Européens et Européennes ont connu des difficultés mentales au cours des 12 derniers mois et plus de la moitié d'entre eux n'ont reçu aucune aide professionnelle.

    En Belgique, les résultats sont légèrement moins préoccupants que pour la moyenne de l'Union européenne.

    Les symptômes les plus cités sont le fait de se sentir triste ou mal, des peurs ou inquiétudes excessives, une faible estime de soi, des difficultés de concentration, un manque d'intérêt ou de jouissance pour des activités précédemment appréciées ou encore une incapacité à affronter les problèmes quotidiens ou le stress.

    Madame la Ministre a-t-elle pris connaissance de ces chiffres ?
    Le cas échéant, qu'en pense-t-elle ?

    Sur quelles politiques nouvelles travaille-t-elle en matière de santé mentale ?

    Que met-elle en place pour les jeunes en particulier ?

    La majorité des Européens et Européennes considèrent que les affections mentales sont moins bien prises en charge que les affections physiques.

    Quels projets développe-t-elle afin d'améliorer ce sentiment, voire cette réalité ?
  • Réponse du 09/11/2023
    • de MORREALE Christie
    Les données de l’Eurobaromètre, publiées le 9 octobre par la Commission européenne, révèlent une réalité qui me préoccupe grandement.

    Le constat est en effet alarmant : près de la moitié des Européens ont connu des problèmes de santé mentale au cours de l’année écoulée et plus de la moitié d’entre eux n’ont reçu aucune aide professionnelle.

    Le bien-être des citoyens est un élément fondamental d’une société en bonne santé. Plus encore ces dernières années, et à un état de crises successives et polymorphes, il s’avère que préserver et renforcer la bonne santé des citoyens exige des actions et des moyens exceptionnels. Les trois piliers à renforcer sont énoncés : prévention adéquate et efficace, accès à des soins de santé mentale et à des traitements de qualité et abordables, et réintégration dans la société après la guérison.

    Comme l’honorable membre le sait, nous avons fourni des efforts budgétaires depuis 2020 pour favoriser l’accès aux soins de santé mentale en Wallonie. Plus de 180 équivalents temps pleins de professionnels en santé mentale ont renforcé des services agréés et actifs en Wallonie, notamment dans les services de santé mentale, mais pas uniquement. Tous ces moyens injectés sont prolongés jusque fin 2024.

    Pour l’avenir proche, un nouveau décret modifiant le Code wallon de l’action sociale et de la santé concernant la santé mentale et ses services actifs en Wallonie a été adopté en troisième lecture par le Gouvernement wallon, le 25 octobre dernier. Il vise notamment à définir un plan stratégique des soins en santé mentale sur une période de 5 ans, en concertation avec le secteur.

    Sur la base d’un diagnostic de l’état de santé mentale de la population de la Région de langue française et compte tenu des données disponibles, le plan stratégique fixera les objectifs transversaux et les thématiques de santé mentale et guidera les actions et les stratégies à mettre en œuvre en matière de santé mentale, en incluant une évaluation de la mise en place de la stratégie et de ses effets. Son ambition est également de répondre aux différentes problématiques d’accès à l’offre existante en santé mentale. Le plan stratégique prendra en compte, bien évidemment, les données de l’Eurobaromètre.

    Je tiens à souligner, en ce qui concerne les jeunes en particulier, que mon Administration contribue à tisser des relations intersectorielles plus fortes, permettant de déjouer, en partie, le morcellement des compétences et des responsabilités d’accompagnement et de prise en charge par rapport aux jeunes.

    En effet, des collaborations renforcées s’avèrent indispensables pour rencontrer de manière holistique les besoins des enfants et des adolescents. Il faut pouvoir parler de ces trop nombreux jeunes qui rencontrent dès leur plus jeune âge des obstacles à leur croissance et à leur épanouissement : ils font partie de ce public exposé, particulièrement vulnérable, qui cumule des problèmes de nature intrafamiliale, d’ordre psychoaffectifs, et qui sont porteurs d’un handicap. Dans ces situations, aucun type de service d’accompagnement ou de soin ne peut assumer seul la responsabilité d’une prise en charge. Il faut augmenter l’encadrement, la collaboration, les moyens. C’est ce que vise le projet « Jeune avant tout », que je soutiens dans sa cinquième année pilote.

    L’aide à la Jeunesse, avec laquelle nous travaillons, est étroitement associée à son comité de pilotage, et envisage également de déployer des moyens supplémentaires au bénéfice des jeunes à la croisée des secteurs et d’établir par ailleurs des modalités pratiques de concertation et d’orientation intersectorielles structurelles. L’objectif étant de ne laisser aucune situation, aussi critique soit-elle, sans solution.

    Outre l’accompagnement et les soins, le secteur de la « revalidation » a pris de l’importance depuis son transfert vers la Région wallonne.

    Transfert qui s’est notamment concrétisé par la création de différents services durant cette législature et notamment dans le secteur de l’enfance. Citons par exemple, le Centre de Revalidation pédopsychiatrique « le Mènolou » développé par le CHU Tivoli et financé à hauteur de 1 million d’euro par an ou encore le focus effectué sur l’autisme avec le développement d’un projet de détection précoce 0-3 ans par le SUSA à Mons. Un autre centre revalidation pédiatrique verra également le jour à Liège.

    Aussi, un nouveau service de santé mentale spécifique pour les enfants et adolescents a été développé en Brabant wallon. Il me tenait donc à cœur d’orienter des moyens spécifiques vers le secteur de l’enfance au sein de mes compétences.

    L’inclusion sociale est pleinement intégrée dans la vision politique que je défends. Elle va de pair avec une conception centrée sur la personne, dans une approche territoriale : le trajet de vie, et pas uniquement d’accompagnement et de soins, l’inclusion dans la communauté, la réintégration dans la communauté par la revalidation et la politique de désinstitutionnalisation, confortent ce point de vue et les actions qui vont dans ce sens.

    Je me permettrai néanmoins de nuancer le principe louable de « réintégration dans la société après la guérison », par un principe de réalité. En effet, le terme de rétablissement utilisé dans la terminologie en santé mentale ne correspond pas, dans tous les cas, à ce qu’on nomme ‘guérison’, par assimilation à la santé physique. Il s’agit plus souvent d’adaptation, de renforcement de la résilience et de recherche d’un équilibre pour mener une vie digne et la plus épanouissante possible.

    Par ailleurs, le principe de réalité exige de considérer que le rétablissement et l’insertion dans la communauté, sans parler du travail et de la productivité, ont leurs limites et ne sont simplement pas atteignables pour de nombreux citoyens atteints de troubles de la santé mentale. Il faut donc prévoir des structures adaptées permettant de vivre dignement et en sécurité, sans faire reposer le poids sur les familles les plus vaillantes qui finissent par défaillir, avec un coût humain et socio-économique très lourd. L’idéal serait, bien entendu, que notre société s’adapte à ces personnes sans devoir créer des structures adaptées, mais force est de constater que ce n’est pas encore une réalité.

    Pour aborder un pilier tout aussi important, en ce qui concerne les projets mis en place pour améliorer la santé mentale de nos concitoyens, la Wallonie soutient les organismes assureurs et leurs agents de prévention qui, à la suite de leur intervention dans le cadre de la crise Covid, ont été pérennisés et développent continuellement leurs compétences dans les différentes dimensions de la santé.

    Ces agents de prévention sont au nombre de 20 ETP financés via l’AViQ, mais travaillant au sein des mutualités, avec une répartition parmi les cinq Sociétés Mutualistes régionales (SMR). Ces agents réalisent des activités de promotion de la santé selon les décisions prises en Comité de Suivi (représentants de l’AViQ, du Cabinet, des SMR).

    Les problématiques telles que l’isolement social chez la personne âgée, le burn-out parental ou les difficultés des familles monoparentales font effectivement partie des thématiques abordées par les agents lors de leurs entretiens. Ils abordent ainsi ces sujets avec le public et rappellent les aides développées tant en interne des mutuelles qu’en externe (comme le site de l’Agence « Trouver du Soutien », et la campagne « Je me libère », par exemple).

    Les agents de prévention font preuve d’une oreille attentive, donnent des pistes de solutions, orientent les personnes vers les services ad hoc, et surtout les recontactent afin de voir ce qui a été mis en place depuis le premier contact. Tout cela dans une démarche bienveillante et non stigmatisante. La plupart de ces contacts sont généralement établis par téléphone, mais des visites domiciliaires sont parfois organisées.

    Une réflexion est en cours en vue d’organiser des ateliers en présentiel, cela afin de soustraire les personnes de leur environnement, le temps de quelques heures, leur offrir une bulle d’air dans un quotidien parfois pesant.

    Je suis également occupée avec l’AViQ à travailler sur l’organisation de la première ligne en Wallonie dans le cadre de Proxisanté. Ce processus participatif a abouti à un avant-projet de décret organisant la première ligne d’accompagnement et de soins, en y incluant la promotion de la santé, mais aussi la santé mentale de première ligne. Je m’apprête à le soumettre à l’approbation du Gouvernement.

    Il s’agit d’améliorer l’accès aux soins de santé mentale et la coordination entre les différents acteurs de la première ligne d’aide et de soin. Cette meilleure coordination devrait à terme inclure le soin de santé mentale au sein de la première ligne, améliorer la lisibilité de l’offre et la coopération entre les professionnels et, de la sorte, orienter vers les soins de santé mentale spécialisés quand c’est nécessaire, dans une vision de proximité des soins au sein du territoire.