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La biométhanisation

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 88 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 23/10/2023
    • de AHALLOUCH Fatima
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    La Déclaration de politique régionale wallonne met l'accent sur le traitement des déchets mis en décharge par des techniques plus respectueuses de l'environnement. La biométhanisation intègre le spectre de solutions dites vertes et encouragées par notre Région. Le principe de la biométhanisation est de faire fermenter des déchets organiques en l'absence d'oxygène. Le biogaz qui s'en dégage, contenant 55 % de méthane, alimente à terme des moteurs qui produisent de la chaleur et de l'électricité verte. À l'heure du dérèglement climatique, cette technique occupe naturellement une place de choix dans les politiques publiques afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Néanmoins, la mise en œuvre de cette technique est parfois à l'origine de désagréments pour les riverains. À Robelmont, par exemple, une famille de fermiers désirant installer un système de biométhanisation doit faire face aux réticences du voisinage.

    En cause tout d'abord la fiabilité des installations. Certains habitants s'inquiètent que cette production de gaz ne se traduise par un risque d'explosion plus élevé. L'entrepreneur quant à lui est formel, les risques d'explosion sont minimes et même inférieurs à ceux provoqués par la présence d'une cuisinière à gaz, du fait de l'absence de mise sous pression du méthane. Viennent ensuite des désagréments plus pratiques dus à la proximité du projet avec les habitations voisines. Les risques d'odeurs, de pollution sonore et visuelle qui pourraient à terme entraîner une dévalorisation des biens immobiliers sont au centre des préoccupations.

    Si tout un chacun reconnaît l'impact positif de ce projet, la question de la localisation de ces installations se pose inévitablement. Il est du ressort des pouvoirs publics d'intégrer la question de l'acceptabilité de la transition écologique dans ses politiques publiques pour que la cohésion et le vivre-ensemble ne soient pas mis à mal.

    Madame la Ministre dispose-t-elle du nombre de dispositifs de biométhanisation installés en Région wallonne ?

    Existe-t-il un cadre juridique spécifique relatif à cette technique pour prévenir les désagréments possibles ?

    A-t-elle connaissance d'autres conflits de cette nature relatifs à une installation de biométhanisation ?

    Qu'est-il mis en place pour les désamorcer ?
  • Réponse du 08/01/2024
    • de TELLIER Céline
    Il convient tout d’abord de distinguer les unités de biométhanisation « agricole » des unités de biométhanisation de déchets organiques.

    Les premières sont alimentées essentiellement par des biomatières et des résidus générés par l’exploitation agricole ou par l’entreprise du secteur agroalimentaire à laquelle l'unité de biométhanisation est annexée. Il peut s’agir d’effluents d'élevage (fumiers, lisiers…), de résidus ou sous-produits agroalimentaires (épluchures de fruits et légumes p.ex.), et le cas échéant de « produits » tels que des cultures dans leur état naturel (cultures énergétiques, cultures intermédiaires, et cetera).

    Si les intrants proviennent d’autres sources (collecte sélective des déchets organiques ménagers p.ex.), il s’agit alors d’une unité de biométhanisation de déchets.

    En ce qui concerne le cadre juridique applicable pour ces installations, l'annexe I de l'arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2002 arrêtant la liste des projets soumis à étude d'incidences et des installations et activités classées définit plusieurs rubriques de classement (ou types d’installation), qui sont détaillées ci-après. Le nombre d’unités de biométhanisation concernées présentes en Wallonie est également précisé.

    Pour les installations agricoles qui traitent des biomatières qui ne sont pas considérées comme des déchets, on distingue les rubriques suivantes :
    - 40.40.10.01 - Installation de biométhanisation lorsque la capacité de traitement est inférieure ou égale à 15 tonnes par jour - classe 3 : 14 installations concernées ;
    - 40.40.10.02 - Installation de biométhanisation lorsque la capacité de traitement est supérieure à 15 tonnes et inférieure ou égale à 500 tonnes par jour - classe 2 : 24 installations concernées ;
    - 40.40.10.03 - Installation de biométhanisation lorsque la capacité de traitement est supérieure à 500 tonnes par jour - classe 1 : 1 installation concernée.

    Les installations de biométhanisation traitant des déchets sont couvertes par les rubriques suivantes :
    - 90.23.15.01 - Installation de biométhanisation lorsque la capacité de traitement est inférieure ou égale à 500 tonnes par jour - classe 2 : 43 installations concernées ;
    - 90.23.15.02 - Installation de biométhanisation lorsque la capacité de traitement est supérieure à 500 tonnes par jour - Classe 1 : 3 installations concernées.

    Pour rappel, les installations visées par la classe 3 sont soumises à un régime de déclaration préalable auprès de la commune.

    Une unité peut comporter plusieurs installations couvertes par plusieurs rubriques différentes.

    Toutes les unités de biométhanisation doivent donc se conformer à la législation relative au permis d’environnement, en vue d’encadrer de manière adéquate les impacts sur l'environnement de toutes les installations de biométhanisation, que celles-ci soient alimentées ou non par des déchets. Cela implique notamment un suivi régulier en matière de contrôles par les autorités compétentes, ainsi que des entretiens fréquents des installations.

    En termes de nuisances, les installations qui traitent plus de 15 tonnes par jour, et en particulier celles qui traitent plus de 500 tonnes par jour, présentent les mêmes types d’impacts au niveau du charroi, du bruit, des émissions de poussières, des nuisances liées au stockage des matières entrantes et du digestat, de la gestion du biogaz ou encore du traitement éventuel du digestat, raisons pour lesquelles elles sont soumises à l’octroi d’un permis d’environnement.

    Le digestat sortant des installations de biométhanisation constitue un déchet au regard du décret du 9 mars 2023 relatif aux déchets, à la circularité des matières et à la propreté publique. Dès lors, si l’exploitant souhaite valoriser ce digestat en agriculture, il est soumis à l'obtention préalable d'un enregistrement et d’un certificat d'utilisation sur base de l’arrêté du Gouvernement wallon du 14 juin 2001 favorisant la valorisation de certains déchets. Il doit également bénéficier d’une dérogation au niveau fédéral, conformément à l’arrêté royal du 28 janvier 2013 relatif aux engrais.

    Enfin, les unités de biométhanisation qui convertissent des sous-produits animaux au sens du Règlement UE n°1069/2009 relatif aux règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux, doivent par ailleurs être agréés conformément à l’article 24 g) dudit Règlement.

    Fort légitimement, les projets d’installations d’unités de biométhanisation (agricole ou autre) peuvent générer des craintes de la part des riverains au regard des impacts environnementaux potentiels que ces types d’installation peuvent générer, comme c’est le cas par exemple pour le projet de Hautrage (porté par la société Cryo Advise) ou celui de Soignies (porté par la société Walvert), qui ont fait l’objet de pétitions de la part de citoyens. Dans ces cas de figure, en amont du processus décisionnel de l’octroi du permis (ou non) par les autorités compétentes, il est d’usage que les porteurs de projets organisent une rencontre citoyenne pour présenter leur projet et les résultats de l’étude d’incidences environnementales plus en détail, et répondre aux différentes questions et craintes des citoyens concernés.