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L’annulation de 600 000 quotas d'émissions de dioxyde de carbone (CO2)

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 204 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 21/11/2023
    • de LIRADELFO Julien
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    Lors de la discussion sur le projet de décret portant assentiment à l’accord de coopération du 22 septembre 2023 entre l’État fédéral, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif à certaines dispositions du partage des objectifs belges climat et énergie pour le début de la période 2021-2030 et au partage des revenus fédéraux de la mise aux enchères des quotas d’émissions pour les années 2015 à 2020 incluse, Monsieur Schonbrodt interrogeait Monsieur le Ministre sur l'annulation de 600 000 quotas d'émissions de CO2 en 2021. Sur un total de 3 millions de quotas mis aux enchères, cela représente une diminution d'un cinquième des quotas.

    Monsieur le Ministre lui a expliqué qu'il s'agissait de la conséquence d'un changement européen et non un choix de la Région.

    Pourrait-il me préciser le mécanisme qui a mené à ces annulations ?

    Quel est le manque à gagner induit par ce changement ?
  • Réponse du 06/02/2024
    • de HENRY Philippe
    Chaque État membre européen reçoit une part des recettes des quotas de l’ETS (« Emission Trading Scheme ») qui sont mis aux enchères sur le marché ETS européen, conformément à l’article 10 de la directive 2003/87/CE. Toutefois, l’article 6 du règlement 2018/842 sur la répartition de l’effort (« Effort Sharing Regulation (ESR) », communément appelé « le non-ETS ») prévoit dans son point 1 que les États membres, énumérés dans son annexe II, peuvent bénéficier d’une annulation limitée jusqu’à concurrence de 100 millions de quotas de l’ETS, collectivement pris en considération aux fins de la conformité avec ce règlement. Il est procédé à une telle annulation à partir des volumes que l’État membre concerné a mis aux enchères.

    Dans son point 3, le même article précise que les États membres énumérés à l’annexe II notifient à la Commission, au plus tard le 31 décembre 2019, toute intention de faire usage de l’annulation limitée de quotas de l’ETS de l’Union européenne visée au paragraphe 1 de cet article, jusqu’à concurrence du pourcentage indiqué à l’annexe II pour chaque année de la période 2021-2030 et pour chaque État membre concerné, afin d’assurer sa conformité au titre de l’article 9.

    Pour la Belgique, l’annexe II définit un maximum de 2 % de leurs émissions ESR de l’année 2005. C’est la volonté de pouvoir faire usage de cette flexibilité jusqu’à concurrence de 1,89 % qui a fait l’objet d’une décision du Comité de Concertation en sa séance du 28 novembre 2019. Notons que cette même décision du CODECO édicte le principe que chaque Région assumera seule la diminution de revenus de mises aux enchères liée à ses quotas ETS non mis aux enchères à la suite de l’utilisation par la Région en question de ce mécanisme de flexibilité. Pour chaque Région, la quantité de quotas ainsi soustraite mensuellement des mises aux enchères, multipliée par le prix moyen du quota durant ce mois, est déduite chaque mois du revenu de mise aux enchères versé à la Région concernée.

    Cette flexibilité s’applique à la période 2021-2030, soit 10 ans. Quand un État membre a décidé d’activer la flexibilité, qui a donc pour but d’assurer la conformité de ses budgets carbone annuels au titre de l’article 9 de l’ESR ; chaque année, un dixième des quotas concernés de l’ETS (appelés les EUAs) sont automatiquement transformés en quota de l’ESR (appelés les AEAs). Autrement dit l’annulation des EUAs conduit automatiquement à la création d’un montant équivalent d’AEAs au bénéfice de cet État membre.

    De même que la Belgique, huit des dix autres États, énumérés à l’annexe II du règlement 2018/842, ont décidé dans les délais prescrits de recourir à cette flexibilité : le Danemark, l’Irlande, le Luxembourg, Malte, l’Autriche, la Finlande, l’Islande et la Norvège. Cependant, la révision 2023 du règlement 2018/842 donne à la Belgique, à Malte, aux Pays-Bas et à la Suède la possibilité de notifier à la Commission, au plus tard le 31 décembre 2023, la part du montant maximal non utilisé de cette flexibilité pour la période 2025-2030 qu'ils auraient l'intention d'utiliser.

    À noter que le point 3 du même article 6 du règlement 2018/842 prévoit que les États membres énumérés à l’annexe II peuvent décider de revoir à la baisse les pourcentages notifiés, une fois en 2024 et une fois en 2027. Dans ce cas, l’État membre concerné devra le notifier à la Commission respectivement au plus tard, le 31 décembre 2024 ou le 31 décembre 2027. Concrètement, cela signifie que ces États membres peuvent revoir à la baisse le pourcentage d’annulation ou même renoncer à ce mécanisme de flexibilité, à deux reprises au cours de la période (en 2024 pour la période 2026-2030 et en 2027 pour la période 2028-2030). Compte tenu de la possibilité de renoncement en 2024, le présent engagement de ces États membres, en ce bien sûr y compris la Belgique, ne portent donc que sur la période 2021-2025.

    La Région wallonne bénéficie de 0,71 % des 1,89 % sollicités par la Belgique. Cela représente sur une base annuelle l’annulation de 356 000 EUAs et donc une réduction des recettes du Fonds Kyoto en 2021 et en 2022, de respectivement 30,4 et 46 millions d’euros. En contrepartie, la Région wallonne a bénéficié de 1,159 million d’AEAs qui ont été ajoutées à son solde initial de 189 millions d’AEAs.

    En 2024, une analyse sera bien évidemment menée afin de juger si le recours à ce mécanisme doit être poursuivi ou non, compte tenu des bilans des années précédentes et des nouvelles projections disponibles à ce moment-là. À cette occasion, chaque Région pourra unilatéralement décider de revoir à la baisse ou à la hausse sa part d’utilisation de la flexibilité à hauteur des maximums 2 % autorisés.