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La prolongation du glyphosate par l'Union européenne

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 151 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 29/11/2023
    • de RYCKMANS Hélène
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    La Commission européenne a décidé de prolonger l'autorisation du glyphosate, qui expire le 15 décembre, et cela pour 10 ans encore.

    Elle n'a en effet pas trouvé de majorité pour l'interdire. Alors que le Centre international de recherche sur le cancer de l'OMS classifie depuis 2015 cet herbicide comme probablement cancérigène et que des victimes obtiennent réparation, en France notamment. La fabrique du doute semble donc fonctionner, puisqu'il existe des instances pour considérer que les preuves de sa dangerosité ne sont pas avérées. Et pourtant, ce qui manque, clairement, ce sont les preuves de son innocuité !

    Cette prolongation est annoncée par la Commission comme conditionnée à un certain nombre d'éléments.

    Monsieur le Ministre peut-il nous préciser les conditions qui ont été mises à la Belgique ? À la Wallonie ? A-t-il pris contact avec le Ministre fédéral de l'Agriculture et avec son homologue flamande pour agir de manière coordonnée ? Quelles sont les stratégies mises en place ?

    La mise en œuvre en Wallonie des conditions posées par la Commission est de sa responsabilité. Il est important d'avancer afin de restreindre l'utilisation du glyphosate et d'interdire son usage dans les meilleurs délais. Quelles actions a-t-il prises pour agir en la matière ?
  • Réponse du 04/12/2023
    • de BORSUS Willy
    Comme l’honorable membre l’indique, la Commission européenne va procéder au renouvellement de l’approbation pour une période de 10 ans, sous réserve de certaines conditions et restrictions. Mais contrairement à ce qu’elle sous-entend, il ne s’agit pas de conditions imposées spécifiquement à la Belgique ou à la Wallonie, mais bien à tous les États membres de l’Union européenne.

    En plus de ces conditions, la Belgique pourra, si elle l’estime nécessaire, et si cela se justifie, ajouter des conditions supplémentaires d’utilisation des produits contenant du glyphosate.

    D’ailleurs, les importantes modifications d’usage des produits à base de glyphosate qui ont eu lieu fin 2022 lors de la réévaluation des produits belges répondent déjà à certaines dispositions spécifiques envisagées par la Commission, notamment celle qui concerne la protection des petits mammifères herbivores.

    Pour mémoire, une fois que la Commission autorise l’usage d’une substance active, les États membres peuvent à leur tour autoriser l’utilisation de PPP contenant cette substance active tout en fixant ou en limitant leurs conditions d’utilisation. Je rappelle qu’il s’agit donc bien, pour la Belgique, d’une compétence exclusivement fédérale.

    C’est ainsi que le Fédéral, le 16 septembre 2018, a modifié l’arrêté royal du 28 février 1994 afin d’interdire la mise sur le marché et, par là même, l’utilisation d’herbicides de synthèse, dont le glyphosate, destiné aux utilisateurs non professionnels.

    Pour ce qui concerne les PPP à usage professionnel, il faut rappeler que les utilisateurs professionnels doivent disposer d’une phytolicence, qu’ils sont sensibilisés vis-à-vis des risques encourus, des règles à respecter, et disposent d’informations actualisées dispensées par les différents organismes spécialisés et reconnus comme tels, notamment lors de séances de formations dans le cadre de la phytolicence.

    Sur le fait qu’il est important d’avancer en Wallonie, notamment afin d’interdire l’usage du glyphosate dans les meilleurs délais, je tiens à lui rappeler que la Wallonie avait déjà adopté un arrêté du Gouvernement wallon, le 30 mars 2017, interdisant l’utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate sur l’ensemble du territoire wallon (avec quelques dérogations). Cet arrêté a été annulé par le Conseil d’État le 11 janvier 2021 au motif de non-respect de la loyauté envers le Fédéral (l’interdiction d’utilisation sur tout le territoire wallon étant considérée de facto comme une interdiction de vente, ce qui relève des compétences fédérales). Ceci fait donc jurisprudence et empêche de facto de prendre à nouveau une interdiction d’utilisation de pesticides sur l’entièreté du territoire wallon.

    En outre, je rappelle qu’à deux reprises, le 19 août 2021 et le 31 août 2023, ma Collègue en charge de l’Environnement a sollicité le Gouvernement wallon en vue de l’autorisation d’utiliser du glyphosate pour les lignes de chemin de fer. Il y a en Wallonie 1 665 km de voies ferrées.

    Par ailleurs, la Wallonie a déjà pris des mesures plus générales en termes d’utilisation des PPP, notamment :
    • sur la base de la Directive européenne, les espaces publics, les espaces fréquentés par les groupes vulnérables (écoles, aires de jeux), les espaces privés accessibles au public (parcs, jardins, terrains de sport) ne peuvent plus être traités avec des PPP, sauf quelques exceptions pour des raisons de santé publique, d’hygiène, de sécurité, de conservation de la nature ou du patrimoine végétal ;
    • les législations européennes et/ou belges et/ou wallonnes imposent dans certains cas, l’éradication ou le fait d’éviter la propagation de plantes nuisibles ou exotiques envahissantes. À ce titre, le glyphosate est encore autorisé et utilisable dans les espaces publics pour être injecté dans les cannes de renouées du Japon ;
    • il est obligatoire de pulvériser avec des buses anti-dérive de minimum 50 % ;
    • à proximité de toutes les eaux de surface, il est obligatoire de respecter au moins une largeur de 6 mètres de zone non traitée (et enherbée à proximité des cours d’eau).

    Enfin, avant d’envisager de prendre certaines mesures supplémentaires en Wallonie, il serait utile d’attendre le règlement révisé proposant le renouvellement de l’approbation du glyphosate. En effet, celui-ci n’ayant pas encore été publié, il n’est pas possible de savoir si les dispositions spécifiques annexées dans sa dernière version du 16 novembre 2023 ont été modifiées depuis lors.