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Le plan d’action de la Commission européenne visant à accélérer le déploiement des réseaux électriques et la nouvelle liste de projets d’intérêt commun (PIC)

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 240 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 07/12/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    La Commission européenne a dévoilé le 28 novembre 2023 un plan d'actions visant à accélérer le déploiement des réseaux électriques et à supprimer les obstacles qui entravent le développement des énergies renouvelables au niveau local. Le plan vise aussi à numériser les réseaux électriques afin d'accélérer la transition énergétique.

    Ce plan d'action répond en partie au fait que les délais d'attente pour les autorisations de renforcement des réseaux sont beaucoup trop longs, notamment pour les réseaux hautes tensions. Il est aussi question de faire face au défi des réseaux de distribution locaux européens vieillissants. Selon son plan d'actions, la Commission européenne estime qu'un investissement de l'ordre de 584 milliards d'euros sera nécessaire d'ici à 2030.

    Le plan d'action prévoit 14 points ayant pour but d'accélérer les règles de délivrance des permis et d'améliorer l'accès au financement pour les projets liés au réseau, tant au niveau de la transmission que de la distribution.

    C'est une première étape importante pour assurer notre transition ainsi que la souveraineté de l'Union européenne dans le domaine de l'énergie. Certains experts soulignent cependant la nécessité de tenir compte de manière de la résistance des réseaux face à la menace croissante d'événements météorologiques extrêmes provoqués par le changement climatique.

    Parallèlement à son plan d'action en matière de réseaux, la Commission européenne a également dévoilé une nouvelle liste de projets d'intérêt commun (PIC) au niveau européen qui pourront bénéficier d'un financement européen, notamment dans le domaine de l'éolien l'offshore, de l'hydrogène et des réseaux électriques intelligents, pour une mise en œuvre prévue entre 2027 et 2030.

    Soyons certains que la Région wallonne, via la Présidence belge du Conseil de l'Union, aura un rôle à jouer et devra fournir un soutien approprié à ce plan d'action. La Région devra s'atteler à la tâche en visant un mandat « net zéro » ambitieux afin de donner priorité aux projets contribuant à la décarbonation.

    Monsieur le Ministre a-t-il pris connaissance de la présentation de ce plan d'action de la Commission européenne ? Quelles sont ses premières réactions et analyses ?

    Qu'en est-il des 14 points mentionnés et quelle est sa position concernant l'accès au financement pour des projets de réseaux au niveau de la distribution ?

    Qu'en est-il du cas wallon en la matière, eu égard notamment aux connexions hybrides en mer et la réduction des délais d'attente pour l'interconnexion au niveau de la distribution ?

    Quelle a été la nature des discussions interfédérales sur ce plan d'action ? Qu'en est-il de la position de la Région wallonne en la matière ?

    Qu'en est-il de la priorité qui sera donnée à ce plan d'action lors de la Présidence belge au conseil de l'Union ?

    Qu'en est-il de la participation de la Région wallonne concernant la liste des PIC ?
  • Réponse du 21/03/2024
    • de HENRY Philippe
    J’ai pris connaissance avec beaucoup d’intérêt de ce plan.

    En effet, de manière générale, si tout le monde s’accorde à dire que des réseaux électriques interconnectés et stables constituent l’épine dorsale d’un marché de l’énergie qui fonctionne bien et que le réseau électrique européen est l’un des plus étendus et résilients au monde ; il est aujourd’hui confronté à de nombreux défis : la demande croissante liée à la mobilité électrique, au chauffage et au refroidissement, à l’électrification de l’industrie et au lancement de la production d’hydrogène renouvelable. L’Union européenne estime également que la consommation d’électricité devrait augmenter d’environ 60 % d’ici à 2030. De plus, les réseaux devront également intégrer une part importante d’énergie renouvelable variable, avec entre autres une forte augmentation des énergies renouvelables en mer, qu’il faut connecter au littoral. Les réseaux doivent donc s’adapter à un système électrique plus décentralisé, numérisé et flexible, avec des millions de panneaux solaires en toiture et des communautés énergétiques locales partageant leurs ressources.

    Dans ce contexte, la planification et l’exploitation des réseaux européens de transport et de distribution d’électricité doivent également être en corrélation avec la planification et l’exploitation de la nouvelle infrastructure de l’hydrogène, du stockage de l’énergie, de l’infrastructure de recharge pour l’électromobilité et de l’infrastructure du CO2.

    Compte tenu de ces tendances, le réseau européen doit rapidement se moderniser et s’étendre. La Commission estime à 584 milliards d’euros les investissements nécessaires pour les réseaux électriques au cours de cette décennie.

    D’un point de vue plus régional, je me félicite de l’intérêt porté par la Commission aux réseaux de distribution, car ce n’était pas le cas précédemment alors que non seulement la décentralisation de la production d’électricité, mais le recours à l’électrification de la mobilité et du chauffage impose une évolution radicale de ces réseaux également.

    Je voudrai donc commencer par souligner l’intérêt des actions proposées qui visent directement nos compétences régionales.

    À cet égard, je rappelle que la mise en œuvre du Clean energy package a mené à la création en juin 2021 de l’entité des GRD de l’Union (en anglais DSO Entity). Cette nouvelle entité a pour missions :

    - la participation à la rédaction des codes et directives de réseau pertinents pour les réseaux DSO ;

    - le renforcement de la coopération entre les GRT et GRD afin de promouvoir la planification et l’exploitation optimales et coordonnées des réseaux de transport et de distribution ;

    - le partage des meilleures pratiques en offrant un forum d'expertise pour échanger des points de vue sur des sujets pertinents liés à la transition énergétique.

    La Commission propose (L’action nº 3) que l’entité des GRD de l’Union soutienne la planification du réseau des GRD en cartographiant les plans de développement de la distribution existants et leurs caractéristiques. L’entité des GRD de l’Union devrait, d’ici à la mi-2024, examiner les études de cas et les bonnes pratiques et publier des recommandations en vue d’améliorer la planification des réseaux de distribution, en étroite coordination avec le REGRT-E et les GRT, ainsi que les représentants pertinents des utilisateurs du réseau, telles que les énergies renouvelables, l’électromobilité ou le chauffage et le refroidissement, en tenant compte des incertitudes qui affectent le plus les activités des GRD, et de la taille hétérogène de ces derniers.

    Dans le cadre de l’Action nº 6, le REGRT-E et l’entité des GRD de l’Union se mettront d’accord sur des définitions harmonisées de la capacité d’hébergement du réseau disponible pour les gestionnaires de réseau et établiront une vue d’ensemble à l’échelle de l’UE pour la mi-2025. Ces informations sont essentielles afin de donner de la visibilité aux promoteurs de projets en matière d’énergie renouvelable ou d’infrastructures de recharge de véhicules électriques, et les aider à estimer le risque de retards dans l’approbation des demandes de raccordement et, partant, à prévoir plus clairement le moment où leurs projets pourront commencer à générer des recettes.

    Enfin, la mise en œuvre de l’Action nº 7 conduira le REGRT-E et l’entité des GRD de l’Union à favoriser l’adoption de réseaux intelligents, l’efficacité des réseaux et les technologies innovantes en accroissant la visibilité des actifs technologiques disponibles pour un déploiement rapide ainsi que des solutions innovantes pour les réseaux intelligents et une meilleure efficacité du réseau, tel que les lignes dynamiques (DLR), les câbles supraconducteurs à haute température (HTS), les compensateurs synchrones statiques (STATCOM), les convertisseurs de source de tension (VSC) dans les systèmes HTCC, les disjoncteurs HTCC ou les transformateurs déphaseurs (PST).

    Des actions portent plus particulièrement sur les aspects financiers qui viendront à point nommé soutenir nos GRD pour traverser cette étape de la transition énergétique de manière efficace et en continuant à offrir un servir de qualité.

    Au travers de l’Action nº 4 : la Commission proposera des principes directeurs définissant les conditions dans lesquelles des investissements anticipatifs dans les projets de réseau devraient être accordés. Leur utilisation devrait cependant rester proportionnelle aux besoins.

    L’ACER (Action nº 8), dans son prochain rapport sur les tarifs, recommandera de bonnes pratiques relatives à la promotion des réseaux intelligents et des technologies d’efficacité des réseaux à travers l’élaboration des tarifs, en mettant l’accent sur la prise en compte des dépenses d’exploitation, en plus des dépenses en capital, et sur le partage des bénéfices afin de tenir compte de l’évolution du système énergétique vers la décarbonation et du rôle de plus en plus actif des GRD. Il est en effet nécessaire de répondre à l’augmentation des coûts opérationnels dans le déploiement et l’exploitation de nos réseaux, y compris pour la sécurité physique et la cybersécurité. Les exigences d’efficacité incitent les opérateurs de réseaux à réduire les coûts et à travailler plus efficacement.

    Enfin, la Commission (Action n°9) recensera des modèles de financement adaptés et renforcera le dialogue pour lever les obstacles au financement privé compte tenu des spécificités des modèles d’affaires des gestionnaires de réseau.

    Un aspect critique déjà identifié pour les unités de production d’énergie à partir de renouvelable concerne l’accélération du déploiement au moyen de procédures d’octroi de permis plus rapides et grâce à l’engagement public (Action nº 11). La Commission soutiendra l’accélération de l’octroi des permis en fournissant des conseils et une assistance technique sur la manière de mettre en œuvre les outils législatifs existants et les États membres mettront en œuvre des mesures d’accélération.

    La directive renouvelable révisée (2023/2413) permet, en effet, aux états membres d’accélérer le développement des réseaux de transport et de distribution nécessaires à l’intégration des énergies renouvelables dans le système. Le développement du réseau est de plus en plus motivé par la nécessité d’intégrer de grandes quantités d’énergies renouvelables dans le système, et il pourrait donc y avoir un potentiel important pour que les États membres désignent des zones d’infrastructure dédiées conformément à la directive.

    À ma connaissance, il n’y a pas eu de discussions interfédérales sur ce plan d’action.

    Le Plan d’action de l’UE pour les réseaux ne sera pas mis en tant que tel à l’agenda des activités de la Présidence belge que ce soit au niveau des réunions de groupe ou d’un Conseil Énergie, mais les infrastructures énergétiques faisant partie intégrante du programme officiel de la Présidence belge (Une transition rentable vers un système énergétique durable nécessite de recourir non seulement aux infrastructures existantes, mais aussi à de nouvelles infrastructures, parmi lesquelles une infrastructure de réseau ainsi que des installations pour l’importation d’hydrogène et le transport de CO2. La Présidence belge prévoit d’évaluer l’efficacité du cadre européen actuel en matière de planification, de construction et de financement des infrastructures), celle-ci va mettre la thématique des réseaux/infrastructures sur le devant de la scène. Les infrastructures de réseau sont la thématique centrale du Conseil Informel des 15 et 16 avril (planification, résilience, financement et investissements, standardisation et permis). Ensuite, la Présidence belge proposera aux États membres de rédiger des Conclusions du Conseil sur les infrastructures de réseaux en vue d’une validation politique au Conseil des ministres de l’Énergie du 30 mai, portant entre autres sur l’accroissement les investissements en faveur d’un réseau d’énergie intégré et adapté aux évolutions futures.

    En ce qui concerne la participation de la Région wallonne aux Projets d’intérêt commun,

    Sur les 166 projets d'intérêt commun et PIC sélectionnés :
    - plus de la moitié (85) sont des projets concernant l'électricité, les réseaux électriques en mer et les réseaux électriques intelligents, nombre d'entre eux devant être mis en service entre 2027 et 2030 ;
    - pour la première fois, des projets relatifs à l'hydrogène et aux électrolyseurs (65) sont inclus, qui joueront un rôle majeur dans l'intégration du système énergétique et la décarbonation de l'industrie de l'UE ;
    - la liste comprend également 14 projets de réseaux de CO2 conformes aux objectifs de création d'un marché pour le captage et le stockage du carbone.

    La plupart des projets belges sont portés par l’Autorité fédérale, car le transport de l’énergie relève de ses compétences. Toutefois, d’une part, ces projets considérés comme relevant de l’intérêt commun européen, contribuent également à l’approvisionnement de la Région wallonne et permette aussi à celle-ci de s’inscrire dans la transition énergétique.

    Au niveau belge, on peut identifier six projets dans les rubriques suivantes :
    - Northern Seas offshore grids (NSOG): Projects of common interest developed in the region :
    o Offshore hybrid interconnector between Belgium and Denmark [currently known as “Triton Link”];
    - Hydrogen interconnections in Western Europe (HI West): Projects of common interest developed in the region :
    o Internal hydrogen infrastructure in France to the Belgium border [currently known as Franco-Belgian H2 corridor];
    o Internal hydrogen infrastructure in Belgium [currently known as Belgian Hydrogen Backbone];
    o Ammonia reception facilities in Belgium :
    * Ammonia reception facility Antwerp;
    * Ammonia reception facility Amplifhy Antwerp ;
    * Zeebrugge New Molecules development ammonia reception facility;
    - Priority Thematic Area Cross-border carbon dioxide network: Projects of common interest developed in the thematic area :
    o EU2NSEA – cross-border CO2 network developed between Belgium, Germany and Norway to also collect CO2 from DK, FR, LV, NL, PL and SE, with storage on the Norwegian continental shelf;
    o Northern Lights – a CO2 cross-border connection project between several European capture initiatives (among others Belgium, Germany, Ireland, France, Sweden) transport by ship to storage on the Norwegian continental shelf (No. 12.4 on the fifth PCI list).

    En ce qui concerne le Belgian Hydrogen Backbone, le plan précis n’est pas encore connu, toutefois, en première approche :
    • Liège serait un nœud relié aux ports d’Anvers et de Gand, aux réseaux néerlandais et allemands et permettrait une connexion du Luxembourg avec les réseaux du nord. Une amorce est prévue vers l’amont de la Meuse en direction de Huy ;
    • depuis Valencienne, un gazoduc est prévu vers le Borinage et continue vers le nord (Gand), avec des connexions vers Feluy notamment.

    On peut donc dire que même si peu de projets seront implantés directement sur le territoire wallon, ils contribueront directement ou indirectement à la transition énergétique de l’économie wallonne et partant, soutiendront l’insertion des entreprises wallonnes dans le paysage européen de l’hydrogène et du carbone et l’amélioration de leur compétitivité grâce à la fourniture d’une énergie durable, sûre et abordable.

    Enfin, l’honorable membre cite l’interconnexion de la distribution. Il n’y a pas de volonté de créer des interconnexions entre les réseaux de distribution. Chaque réseau de distribution se connecte au réseau de transport et de transport local. Le réseau de transport se renforce et doit encore se renforcer sur le territoire wallon, notamment au niveau de la boucle du Hainaut. Ceci est nécessaire pour rapatrier toute l’électricité issue des parcs éoliens offshore, mais ceci est une compétence fédérale au niveau de l’énergie. La compétence régionale concerne les autorisations liées à l’aménagement du territoire.