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L’augmentation de la consommation de crack

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 146 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 07/12/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    Parfois appelé la drogue des pauvres pour son coût peu onéreux, et connu pour ses effets « brutaux » sur les consommateurs, le crack se consomme essentiellement dans le milieu de la rue et serait en forte augmentation dans les grandes villes, en particulier parmi les sans-abris et les plus défavorisés.

    Une récente enquête du magazine Le Vif du 30 novembre 2023 faisait état d'une progression alarmante et effarante de la vente et consommation de cette drogue : « tous les signaux sont au rouge » !

    Sciensano confirme cet état de fait et le centre de crise de l'ASBL, Transit, tire plus que jamais la sonnette d'alarme face à une drogue où l'offre est abondante et le prix abordable, avec des pratiques commerciales « agressives » !

    Madame la Ministre partage-t-elle le constat et dispose-t-elle d'informations et de statistiques qui confortent cet état de fait ?

    Y a-t-il des rapports sur la situation wallonne disponibles ?

    A-t-elle des chiffres qui puissent montrer l'évolution particulière de la consommation en Région wallonne ?

    Aucun produit de substitution ne lui étant connu, l'effet de dépendance est d'autant plus dramatique et seule une approche de proximité et de prévention semble pouvoir agir avec efficacité ! Face à cet état de fait, la Région bruxelloise travaillerait sur un Plan crack. Qu'en est-il en Wallonie ?

    Comment Madame la Ministre aborde-t-elle la problématique et quelle est la politique mise en place au sein de son cabinet et de son administration ?

    Comment la Wallonie peut-elle appliquer des politiques publiques dignes de ce nom avec une approche holistique qui puisse accompagner les consommateurs de la meilleure de manière ?

    Quelles sont les mesures entreprises sur la législature, avec quelle efficacité ?

    Quel bilan en tire-t-elle et quelles sont les difficultés persistantes ?

    Quelles sont les analyses apportées par les acteurs de terrain en la matière ?

    Quid de la FEDITO wallonne à cet égard ?

    Doit-on réfléchir, voire déterminer, des moyens plus adaptés ?

    Quels sont les moyens budgétaires disponibles pour faire face à ce drame ?

    Comment se répartissent-ils entre aide directe, travail associatif et techniques de prévention ?

    Une réflexion européenne existe-t-elle sur le sujet ?

    Quelle est-elle et sera-t-elle abordée dans le cadre du semestre européen que présidera la Belgique ?
  • Réponse du 23/01/2024
    • de MORREALE Christie
    Actuellement, en Wallonie, 25 services sont agréés et subventionnés comme services spécialisés en assuétudes. Face à la problématique des assuétudes, ces services remplissent des missions d’accompagnement psychosocial, de prises en charge thérapeutiques, de soins et de réduction des risques liés à la consommation de drogues.

    Pour information, le crack est la forme « fumable » de la cocaïne. C’est un mélange de cocaïne, de bicarbonate de soude et/ou d’ammoniaque, qui se présente sous la forme de petits cailloux. L’euphorie provoquée par le crack est plus intense qu’une consommation de cocaïne sniffée, mais l’état dépressif qui lui succède est encore plus marqué. L’état de dépendance se fait rapidement sentir.

    Il y a en effet une augmentation constante de consommateurs de crack en Belgique ces dernières années. Ce phénomène est probablement lié à l’augmentation actuelle de la cocaïne. Nous finançons Sciensano pour le suivi des demandes de traitements pour assuétudes afin de connaitre l’évolution du secteur. Le rapport 2022 doit justement sortir en cette fin d’année. Nous disposons aussi des très bonnes analyses de notre point focal Eurotox, dont le tableau de bord sur l’usage des drogues en Wallonie est sorti début septembre.

    On le voit dans les chiffres, les demandes de traitement pour addiction au crack augmentent depuis 2015, avec une augmentation particulièrement importante entre 2020 et 2022. Les trois régions belges sont concernées par cette augmentation.

    En Wallonie, en 2022, 334 patients ont été en traitement pour une addiction au Crack (comme premier produit). Ce nombre est passé à 213 en 2021 et il est redescendu à 200 en 2022. À Bruxelles et en Flandre, le nombre de traitements pour dépendance au crack à continuer d’augmenter depuis 2020. La cocaïne et le crack représentent 19.4 % des demandes de traitement en 2021 en Wallonie, juste après la dépendance à l’alcool (37,1 %) et aux opiacés (23,7 %).

    Il faut savoir qu’une proportion importante de patients en demande de traitement pour assuétudes sont en situation de dépendance pour plusieurs substances. Plus d’un quart (30 % dans les services ambulatoires et 36 % dans les hôpitaux) des patients ayant mentionné la cocaïne en produit principal ont également un usage problématique d’alcool, et un quart (25 % dans les services et 34 % dans les hôpitaux) avec le cannabis. Par ailleurs, les patients ayant mentionné les opiacés en produit principal sont quant à eux très nombreux à mentionner conjointement un usage problématique de cocaïne (37 % dans les services spécialisés et 45 % dans les hôpitaux) - Régny, R., Stévenot, C. & Hogge, M. (2023). Tableau de bord de l’usage de drogues et ses conséquences sociosanitaires en Wallonie. Bruxelles : Eurotox ASBL.

    Sous cette législature, nous avons notamment travaillé à l’élaboration d’une stratégie interfédérale drogue. Une nouvelle organisation de la gestion des politiques drogues a été proposée à la Conférence interministérielle Drogue. Un Commissaire national Drogue a été désigné ainsi que des personnes de contact dans chaque région.

    La nouvelle stratégie couvre toutes les facettes de l’approche du phénomène de drogue, depuis la prévention et la limitation des risques et des dommages associés à la consommation de drogues et aux comportements à potentiel addictif, jusqu'à l'offre d’assistance et de traitements psychosociaux, en passant par l'approche de la criminalité et des nuisances liées à la drogue. La stratégie vise à protéger et à renforcer une société saine et sûre pour tous, grâce à une politique antidrogue équilibrée, globale et intégrée, intersectorielle et fondée sur des données probantes. Le champ d'application de cette stratégie drogue inclut les produits ou les comportements qui créent - concrètement ou potentiellement - une dépendance et peuvent avoir un effet nocif à partir d'une certaine exposition, tels que les drogues illicites, l'alcool, le tabac, les médicaments psychoactifs, les addictions comportementales et d'autres produits à potentiel addictif (produits dopants, protoxyde d’azote).

    Pour la Wallonie, nous avons travaillé, en collaboration du secteur des assuétudes, à la ré-écriture de la base légale qui organise les services et réseaux spécialisés en assuétudes. Un avant-projet de décret est en préparation et est déjà passé en première lecture devant le Gouvernement wallon.

    Les moyens sont d’ores et déjà prévus à l’initial 2024 pour permettre aux services de faire face à la fois aux augmentations et indexations que connaissent tous les secteurs, et à la fois à l’augmentation et à la complexification des demandes d’aide spécifiques au secteur des assuétudes. 4 243 milliers d’euros sont prévus pour le secteur privé. 1 125 milliers d’euros est prévu pour les frais de personnel et de fonctionnement des réseaux et des services d’aide et de soins spécialisés en assuétudes, ainsi que, de leur fédération, relevant du secteur public.

    À la suite du futur décret « assuétudes », les services et réseaux spécialisés en assuétudes (RASA’s privés + publics) seront refinancés à hauteur de 3 743 milliers d’euros dont 1 768 milliers d’euros provenant du Plan de relance de la Wallonie (PRW), et ce, afin de garantir un agrément de base de minimum 3 ETP par service, financés à hauteur de 75 milliers d’euros l’ETP, et les frais de fonctionnement y assimilés.

    L'axe prévention des usages addictifs et réduction des risques représente presque 3 millions (2 977 149 euros) sur la base des agréments, dont 224 000 euros pour Infor-Drogues et 558 186,97 euros pour Modus Vivendi.

    Dans la perspective de la présidence belge de l’Union européenne, le travail sera axé sur la mise en œuvre de la feuille de route de l'UE adoptée par la Commission européenne le 18 octobre 2023, pour renforcer la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité organisée. La feuille de route consiste en des actions concrètes qui renforceront la réponse globale de l’UE aux réseaux de criminalité organisée et de trafic de drogue.