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La loi européenne de restauration de la nature et le projet Nassonia en Wallonie

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2023
  • N° : 201 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 21/12/2023
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
    Pour février 2024, la loi européenne de la restauration de la nature devrait être définitivement entérinée, un accord ayant été approuvé par la Commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement européen en novembre 2023.

    Bien que le résultat de cette loi soit « édulcoré » et que l'on aurait voulu un développement législatif beaucoup plus ambitieux, il reste nécessaire de progresser en la matière et de développer autant que possible des mesures de restauration de la biodiversité.

    La loi envisage de restaurer, d'ici 2030, 30 % des habitats naturels dégradés dans chaque État membre de l'Union européenne. En Belgique, 95 % des habitats naturels sont en mauvais état de conservation, ce qui donne suffisamment de choix en la matière.

    Dans ce contexte, la presse a récemment fait écho au projet de restauration Nassonia.

    Une experte de la biodiversité pour le « World Wildlife Fund » (WWF) argumentait en ce sens car en Wallonie, la forêt en effet a besoin d'être protégée et restaurée surtout pour créer des forêts plus résilientes.

    Il était aussi question que la loi serve à restaurer la nature pour la rendre proche des citoyens. Effectivement, compte tenu des particularités de la Belgique et de la Wallonie, il est essentiel que les citoyens puissent avoir accès à la nature qui les entoure.

    Quelles sont les mesures contraignantes de la loi de restauration de la nature de l'Union européenne ?

    Comment impactent-elles les politiques publiques de la Région wallonne en la matière ?

    Quel est son apport vis-à-vis de la stratégie de restauration de la Région wallonne ?

    Quelles pourraient être les zones visées pour des restaurations ?

    Quelles sont les opportunités en la matière pour la Région wallonne ?

    Madame la Ministre pourrait-elle donner plus de précisions sur le projet Nassonia, qui a fait, de manière positive, grand bruit dans la presse ?

    Comment est-ce que ce projet phare progresse-t-il ?

    Quelles sont les prochaines étapes de restauration pour la Région wallonne ?

    Quelles sont les leçons à retenir de ce grand projet ?

    La Région wallonne vise-t-elle d'autres terrains d'intérêt biologique en Wallonie ?

    Qu'en est-il de ceux qui n'auraient pas le statut de protection ?
  • Réponse du 26/03/2024
    • de TELLIER Céline
    Le projet de loi sur la restauration de la nature a fait l’objet d’un accord en trilogue (Conseil, Parlement, Commission) au niveau de l’Union européenne et doit encore être définitivement validé par le Conseil et le Parlement européen avant d’entrer en vigueur.

    La loi sur la restauration de la nature prévoit différentes dispositions plus ou moins contraignantes. Notamment, cette loi obligera les états membres à mettre en place des mesures pour atteindre ses objectifs, à savoir la restauration, d’ici 2030, d’au moins 30 % de la surface totale d’une série d’habitats naturels menacés à l’échelle européenne et d’au moins 60 % de la surface de chaque groupe d’habitats d’ici 2040, et d’au moins 90 % de la même surface d’ici 2050. Les mesures devront tenir compte des besoins de connectivité des espèces.

    Plus globalement, des mesures de restauration devront également être mises en place pour restaurer les écosystèmes agricoles, les écosystèmes forestiers et les milieux tourbeux et pour inverser le déclin des pollinisateurs.

    Les états devront également s’assurer que l’état des habitats figurant dans les listes annexées à la législation soit connu sur au moins 90 % de leur superficie.

    Les états membres devront aussi s’assurer de mettre en place des mesures pour éviter la détérioration des habitats qui sont en bonne condition ou qui font l’objet de mesures de restauration. Le choix des mesures est laissé à l’appréciation des états membres.

    La quantification des efforts selon les types d’habitats et, pour une partie des objectifs, la localisation des opportunités de restauration, devront faire partie des plans nationaux de restauration. Les premiers projets de plans nationaux de restauration sont à produire dans les deux ans de l’entrée en vigueur de la loi sur la restauration de la nature.

    La structure même de ces plans est en discussion dans un groupe de travail ad hoc au niveau de l’Union européenne, piloté par la Commission.

    Mon administration suit et participe à l’ensemble de ces travaux. Dès la parution du texte définitif et validation du canevas attendu pour les plans de restauration, celle-ci réalisera une analyse complète des implications de la Loi pour la Wallonie. Mon administration sera alors en mesure d’évaluer si de nouveaux outils et politiques publiques sont nécessaires, au regard des instruments existant déjà actuellement dont notamment :
    - les moyens financiers régionaux ;
    - le plan stratégique relevant de la PAC (intervention 355) ;
    - le Plan de relance, notamment les projets :
    o PNRR 97 « Renforcer le réseau d’aires protégées » au profit des associations de conservation de la nature ;
    o PNRR 98 « Créer deux parcs nationaux en Wallonie » ;
    o PRW 111 « Renforcer le réseau d’aires protégées » ;
    o PRW 112 « Restaurer les milieux et habitats dégradés afin de rétablir une grande qualité biologique » ;
    o PRW 113 « Valoriser les espaces naturels de Wallonie, mieux les faire connaitre et assurer l’adéquation entre protection et fréquentation ».

    En ce qui concerne le projet Nassonia, celui-ci cadre tout à fait avec les ambitions de la Loi sur la Restauration de la Nature. Depuis trois ans, le Master plan élaboré en 2020 a notamment été traduit en un plan d’aménagement forestier et un plan de gestion de la réserve naturelle domaniale, qui a fait l’objet d’une reconnaissance par le Gouvernement wallon le 13 décembre dernier. Au total, sur le territoire du projet, ce sont 724 hectares qui bénéficient maintenant du statut de réserve naturelle domaniale, dont 119 hectares de réserve naturelle intégrale, zone dans laquelle plus aucune intervention ne sera réalisée dans un futur proche.

    Par ailleurs, des projets de restauration ont déjà été menés sur le terrain : restauration de 54 hectares de forêts alluviales, de 7,6 hectares de landes à bruyères, creusement de plus de 80 mares, reconstitution de 7,5 kilomètres de haies et de lisières forestières, conversion progressive de vieux peuplements d’épicéa en milieu ouvert ou en boulaie-chênaie, diversification de la hêtraie, augmentation de la quantité de bois mort en forêts, avec le maintien de tous les houppiers lors des exploitations feuillues …

    Toutes ces actions contribuent à augmenter le sentiment de naturalité et à donner des bases solides à la forêt de Saint-Michel, pour lui permettre d’évoluer de plus en plus librement et d’acquérir une meilleure résilience face aux dérèglements climatiques.

    Le projet « Nassonia » permet de mener, comme le préconise la Loi européenne sur la Restauration de la Nature, d’importantes actions de restauration des habitats en vue d’aboutir à un état satisfaisant d’évolution naturelle fonctionnelle.

    Compte tenu de l’échelle de temps de l’évolution d’une forêt, il est trop tôt pour tirer un bilan de l’évolution de la faune et de la flore dans ce laboratoire du vivant. La réplication de ce type de projet dans d’autres zones ne manquerait pas d’intérêt pour renforcer les enseignements du projet Nassonia.