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La création de voiries communales par prescription acquisitive

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2024
  • N° : 262 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 24/01/2024
    • de DESQUESNES François
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Le titre III du décret du 6 février 2014 relatif à la voirie communale prévoit deux modes distincts de création de voiries communales.

    Son premier chapitre détaille un mode générique : création, modification et suppression des voiries communales par les autorités publiques ou par les particuliers. Le second chapitre traite de la création par le mode spécifique de l'usage public.

    Lorsque l'assiette est une propriété privée, l'usage public entraîne la constitution d'une servitude publique de passage.

    L'article 29 du décret précité dispose que la création et la modification de la voirie font l'objet d'un acte les constatant, non susceptible de recours administratif et adopté par le conseil communal.

    Quelle est la fréquence de telles décisions de création de voiries communales par usage public ?

    Comment la décision communale est-elle intégrée dans les dispositifs cartographiques de la Région comme WalOnMap, notamment ?

    L'article 29, alinéa 2, du décret précité précise que « s'il s'ajoute à l'usage du public des actes d'appropriation posés par la commune, la voirie communale lui appartiendra en outre en pleine propriété à l'expiration d'un délai débutant à partir du premier de ces actes, de trente ans ou de dix ans si la voirie est reprise dans un plan d'alignement ».

    Quels sont les actes d'appropriation ?

    Qui décide de cette appropriation ?

    Cette appropriation implique-t-elle une compensation financière ou le paiement d'un prix au propriétaire en titre ?
  • Réponse du 12/02/2024
    • de BORSUS Willy
    Pour répondre à la première question de l’honorable membre, le décret du 6 février 2014 relatif à la voirie communale prévoit, par le biais de ses articles 17 et 50, que le collège communal transmette spontanément et sans délai sa décision au Gouvernement ou à son délégué.

    Mon administration répertorie les décisions prises sur la base de ce même décret qui lui sont communiquées. Je suis donc en mesure de l’informer que 246 décisions, prises entre les 2 janvier 2023 et 20 décembre 2023, par 103 Conseils communaux différents, lui sont parvenues. Néanmoins, ce listing ne permet pas de déterminer le nombre de créations de voiries par prescription acquisitive. En outre, la simple addition de ces informations ne semble pas pertinente, car il est plus que probable que certaines communes effectuent les deux démarches, à savoir, intégrer leurs décisions dans l’Inventaire centralisé des adresses et des rues de Wallonie (ICAR) et les envoyer à la Direction juridique des recours et du contentieux.

    En ce qui concerne l’intégration de ces décisions dans les dispositifs cartographiques de la Région comme, notamment, WalOnMap, je me permets de le renvoyer aux réponses apportées aux questions parlementaires n°427 de Monsieur Stéphane Hazée, du 29 avril 2021, mais également n°225, de Monsieur Rodrigue Demeuse, du 14 décembre 2022 et enfin n°106, de Madame Anne-Catherine Goffinet, du 20 novembre 2023.

    Un acte constatant la création d’une voirie communale pas prescription acquisitive est adopté par le Conseil communal, à l’initiative de la commune ou sur demande des personnes visées à l’article 8, à savoir, toute personne physique ou morale justifiant d’un intérêt, le Gouvernement, le fonctionnaire délégué ou, conjointement, ce dernier et le fonctionnaire technique et/ou le fonctionnaire des implantations commerciales.

    Cet acte de constat ne crée pas de droit, mais permet au Conseil communal d’exprimer le fait qu’il constate la création ou la modification d’une voirie communale et d’en informer les personnes intéressées.

    Celles-ci disposent alors de la possibilité de contester la modification ou création de voiries constatée par les autorités communales, en saisissant le Juge de Paix territorialement compétent.

    Le décret prévoit, en son article 36, entre autres, que l’acquisition des terrains visés par la création de voiries communales se fait, autant que possible, à l’amiable. Il précise toutefois que, bien que la décision d’achat ou d’échange incombe au Conseil communal, les conditions de l’acquisition sont débattues entre le Collège communal et les propriétaires intéressés.

    En ce qui concerne les actes d’appropriation visés par l’article 28, alinéa 2, du décret, selon les explications fournies dans le cadre des travaux parlementaires, à propos de l’acquisition de la propriété de l’assiette de la voirie, il ne s’agit que d’une application classique du principe juridique d’acquisition de la propriété d’un bien par l’écoulement du temps, c'est-à-dire par prescription.

    Il ressort de ces travaux que « si, en outre, la commune pose des actes animo domini, c'est-à-dire qu’elle se comporte en propriétaire en posant des actes que seul le propriétaire peut faire, elle en acquerra aussi l’assiette en pleine propriété. C’est l’effet de la prescription. »

    Peuvent notamment être retenus, à titre d’actes que seul le propriétaire peut faire, lesquels sont effectivement cités comme tels par le Professeur Dominique Lagasse, dans son ouvrage « droit de la voirie – droit de la domanialité publique », « les travaux d’égouttage, travaux de canalisation ou ouvrages d’art ».

    Le principe de la prescription acquisitive de la propriété s’applique sans qu’une décision doive être prise. Il s’agit du transfert d’un droit qui s’opère par l’écoulement d’un certain délai lorsque les conditions requises sont respectées.

    Ce principe n’implique le paiement d’aucun prix quelconque aux anciens propriétaires.

    Un acte de constat similaire à celui utilisé par le Conseil communal pour rendre publique la création d’une voirie par l’usage du public, voire un unique acte de constat, lorsque les conditions de la création de la voirie et de l’acquisition de la propriété sont toutes deux remplies, pourrait être pris par le conseil communal.

    Celui-ci permettrait aux « anciens propriétaires » de faire valoir leurs contestations, lesquelles devraient être formulées devant les cours et tribunaux de l’ordre judiciaire.

    Ce transfert de propriété implique cependant une inscription hypothécaire au service de publicité foncière, pour laquelle un acte authentique sera nécessaire, lequel constituera, soit un acte notarié, si les « anciens propriétaires » marquent accord sur l’usucapion, soit un jugement constatant le transfert de propriété, dans les autres cas de figure.