à TELLIER Céline, Ministre de l'Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal
Ce mardi 27 février, le Parlement européen a entériné la loi dite de restauration de la nature. Elle est passée sur le fil alors que beaucoup avaient perdu espoir. Fortement édulcoré lors des négociations, ce texte vise à mettre en place des mesures de réparation sur 20 % des terres et des espaces marins et tous les écosystèmes dégradés de l'Union européenne d'ici 2030.
Comment Madame la Ministre accueille-t-elle le vote de ce texte ?
Comment peut-elle rassurer le monde agricole et l'industrie qui ont exprimé leurs craintes à son égard ?
Parmi les mesures édictées par ce texte, quelles sont celles pour lesquelles la Wallonie a déjà de l'avance et quelles sont celles qui restent à fondre dans de nouveaux décrets ?
A-t-elle des exemples concrets de choses déjà mises en place ? 2030 est-elle un objectif respectable à l'échelon de notre région ?
Est-ce que cela nécessitera une coordination avec les autres régions ?
Ne craint-elle pas un fiasco similaire à celui du Plan national Énergie Climat ?
Réponse du 28/05/2024
de TELLIER Céline
Comme j’ai déjà eu l’occasion d’en informer l’honorable membre à l’occasion d’une précédente question écrite sur le sujet, en novembre 2023, l’accord obtenu à l’issue des négociations en trilogue (Commission européenne - États membres et Parlement européen) a reçu l’assentiment d’une majorité qualifiée d’États membres au sein du COREPER, instance préparatoire du Conseil de l’Union européenne.
Préalablement à cet accord, de nombreux échanges ont eu lieu entre les entités fédérées et le fédéral au sein de la DGE, organe de concertation intrabelge piloté par le SPF Affaires étrangères en charge de la préparation, la définition, la représentation, la gestion et du suivi de la politique européenne de la Belgique. La DGE rassemble des représentants des gouvernements régionaux et fédéral, des experts des administrations ainsi que l’attaché de la Représentation permanente en charge du suivi du dossier.
En dépit d’une position de soutien du projet exprimée par la Wallonie, la Flandre n’a pas souhaité soutenir le projet. Pour justifier cette position, elle s’est appuyée sur une analyse socio-économique très prudente, basée sur une première version du texte. Comme mes représentants l’ont fait valoir lors des discussions, de nombreux assouplissements ont été apportés au projet de texte, pour, notamment, tenir compte de la diversité des situations socio-économiques. Ces assouplissements sont de nature à limiter à plusieurs égards la portée contraignante du texte. Malgré ces assouplissements répondant à des demandes exprimées par la Flandre, celle-ci n’a pas revu sa position, ce qui a donné lieu à un vote d’abstention de la part de la Belgique. Je le déplore vivement dans la mesure où un vote d’abstention est comptabilisé avec les votes d’opposition, ce qui, additionné à un revirement de position de la part de la Hongrie, rend la validation finale du projet par l’Union européenne incertaine.
Si cette loi devait malgré tout voir le jour, sa future mise en œuvre au niveau régional nécessiterait de commencer par un examen détaillé du règlement au regard des mesures existantes en Wallonie. Le projet de loi européen précise que les futures mesures mises en place par les États membres pour atteindre ses objectifs seront décrites dans des plans de restauration nationaux, qui consigneront les priorités en termes de restauration ainsi qu’une localisation des opportunités de restauration pour une partie de ces objectifs. Une collaboration avec les autres régions sera dès lors indispensable.
La structure même de ces plans nationaux de restauration est en discussion dans un groupe de travail ad hoc au niveau de l’Union européenne, piloté par la Commission. Mon administration suit et participe à l’ensemble des travaux et fera une analyse complète de la Loi pour envisager sa mise en œuvre en Wallonie dès son adoption finale et la publication au JOUE du texte définitif et du canevas attendu pour les plans de restauration. Mon administration sera alors en mesure d’évaluer les nouveaux outils nécessaires en matière de restauration, au regard des nombreux instruments existants. Je pense par exemple au Réseau Natura 2000 et aux autres aires protégées, à la protection des espèces sur l’ensemble du territoire wallon, aux nombreuses fiches du Plan de Relance de la Wallonie qui visent à protéger la nature (création de parcs nationaux, renforcement du réseau d’aires protégées, restauration des milieux et habitats dégradés, et cetera), aux projets LIFE ou encore aux subventions BiodiverCité et au projet YesWePlant. L’analyse approfondie de la situation et des objectifs permettra d’évaluer concrètement l’ampleur des efforts à fournir par la Wallonie.
Enfin, le succès de la mise en œuvre de cette loi en Wallonie dépendra de la volonté politique du prochain Gouvernement en la matière et pas uniquement du ou de la Ministre de la Nature. En effet, la nature est un bien commun et donc l’affaire du Gouvernement dans son ensemble.