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Les camions géants et la mobilité en Wallonie

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2024
  • N° : 557 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 21/03/2024
    • de LEPINE Jean-Pierre
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie, de la Mobilité et des Infrastructures
    Très récemment, le Parlement européen a décidé d'autoriser la circulation de camions géants mesurant jusqu'à 25 mètres et pesant jusqu'à 60 tonnes selon les normes européennes.

    On évoque ici une disposition qui vise à encourager le développement des poids lourds zéro émission, en autorisant un espace supplémentaire pour installer des piles à batterie ou à hydrogène. Mais il faut ajouter que les véhicules diesel bénéficieraient aussi de ce relèvement jusqu'en 2035.

    Dans un premier temps, les États voisins consentants, qui les acceptent déjà sur leur territoire, pourront leur permettre de circuler automatiquement. Il s'agit des pays comme la Suède ou la Finlande, mais l'Allemagne est actuellement dans une phase de test.

    Mais dans un deuxième temps, des députés se sont émus de l'impact en matière d'environnement, de sécurité et de concurrence avec le fret ferroviaire. En France notamment, on craint que cette législation, qui devra désormais être négociée entre les États membres, favorise des véhicules réputés, à tort ou raison, comme « gros pollueurs » et impacte durablement la concurrence avec le fret ferroviaire.

    Pour être exhaustif, j'ajoute que le Conseil européen doit encore adopter sa position pour finaliser le texte, mais il n'empêche que cette disposition risque d'impacter durablement la mobilité en Wallonie si la Belgique devait décider d'autoriser la présence de ces camions géants sur nos routes en sachant que nous passerions, si je ne m'abuse, de camions de 44 tonnes maximum pour 18,75 mètres à des véhicules de 25,25 mètres et 60 tonnes.

    Voilà pourquoi, je souhaite connaître le point de vue de Monsieur le Ministre sur la question afin d'anticiper les débats que nous ne manquerons pas d'avoir sur le sujet.

    Quel est son point de vue sur ces camions ?

    Compte-t-il les encourager ? Pourquoi ?

    Quelle est son analyse de la décision du Parlement européen ?

    Quelles démarches concrètes compte-t-il, le cas échéant, entreprendre sur le sujet eu égard aux arguments évoqués plus avant ?

    Quel impact cela aura-t-il sur l'état de nos routes, dont l'état est déjà fort décrié ?

    De même, comment cela cela impactera-t-il la circulation et la sécurité routière ?
  • Réponse du 10/04/2024
    • de HENRY Philippe
    Ces dernières décennies, la demande en matière de transport, tant de marchandises que de personnes, a considérablement augmenté. Afin de répondre à l’augmentation de cette demande ainsi qu’aux effets négatifs qu’elle engendre, il est nécessaire de s’inscrire dans la recherche de solution sous un angle multimodal. Nous devons donc effectuer une meilleure répartition modale et optimiser les flux de marchandises et de nos infrastructures. C’est l’objet de la Stratégie régionale de Mobilité – volet marchandises (SRM-M), adoptée en 2020 par le Gouvernement et en cours d’opérationnalisation.

    La Région wallonne n’a pas attendu cette décision pour étudier l’impact de ces camions-géant. En effet, un projet-pilote initié, en janvier 2017, par le Service public de Wallonie – Mobilité et Infrastructures (SPW-MI) a permis de récolter des informations sur ces méga-camions et leurs impacts en matière de mobilité. Dans ce cadre, le SPW-MI a délivré des autorisations de circulation pour ces méga-camions en fixant les itinéraires afin de diminuer les risques tant pour les usagers de la route que pour nos infrastructures.

    Il ressort des premiers résultats deux choses. Premièrement, sur le plan de la sécurité routière, les risques existants pour les camions classiques doivent être pris en compte pour les camions géants. Étant donné les caractéristiques techniques très spécifiques de ces combinés poids lourds et afin de garantir la sécurité de tous, des mesures devront être prises, notamment en matière de formation des conducteurs, d’imposition de prescriptions de circulation, de vérification du respect des exigences techniques des camions, ou par des actions portées sur l’aménagement routier.

    Deuxièmement, concernant les infrastructures, il ressort que les méga-camions n’ont pas ou du moins pas plus d’impact que les poids lourds standard. Toutefois, si le réseau n’est pas décongestionné, l’impact des poids lourds, déjà conséquent, continuera à se faire ressentir sur nos ouvrages d’art. Il est donc primordial de maintenir les efforts en matière de report modale et de favoriser l’usage des transports par la voie d’eau et la voie ferrée afin de diminuer le nombre de camions sur nos routes peu importe leur taille et l’énergie qu’ils consomment. Par conséquent, nous devons poursuivre les investissements dans les modes de transports alternatifs afin de les rendre plus attrayants et donc compétitifs par rapport au transport par route.

    Enfin, comme il a été souligné, la décision du Parlement européen doit encore faire l’objet d’une prise de position des États membres dont certains se sont déjà exprimés en défaveur puisque des préoccupations légitimes en matière d’environnement et de concurrence existent.

    La prise de position de la Région en la matière doit se faire en conformité avec la mise en œuvre de la SRM-M qui favorise le report modal et vise à diminuer la part du transport de marchandises par la route afin d’augmenter le transport par les moyens alternatifs. Une position belge devra être adoptée en concertation avec les autres entités.