/

Les émissions cancérigènes pour les travailleurs de Liege Airport

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2024
  • N° : 113 (2023-2024) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 21/03/2024
    • de BIERIN Olivier
    • à DOLIMONT Adrien, Ministre du Budget et des Finances, des Aéroports et des Infrastructures sportives
    Le Netherland Labour Authority a publié un rapport dans lequel il alerte sur les risques sanitaires encourus par les travailleurs de l'aéroport de Schipol Amsterdam. En effet, les travailleurs seraient exposés à des émissions cancérigènes liées à la combustion du kérosène des avions et à la pollution des véhicules de transport au sol. Ces risques concernent essentiellement les travailleurs sur le tarmac de l'aéroport de Schipol qui sont exposés à des concentrations trop fortes et trop longtemps.

    Ce rapport est inquiétant et les émissions cancérigènes ne sont probablement pas très différentes entre Amsterdam et Liège ou Charleroi.

    Monsieur le Ministre, une telle étude a-t-elle déjà été menée à Liege Airport ?

    Le rapport mentionné parle surtout du personnel « au sol ». Vu les activités de type « cargo » à Liège, on peut émettre l'hypothèse que davantage de personnes sont concernées par rapport à un aéroport touristique.

    Quelles campagnes de mesures ont été réalisées sur le tarmac des deux aéroports wallons ?
    Le cas échéant, avec quels résultats ?

    Quels dispositifs Monsieur le Ministre a-t-il mis en place pour protéger ces travailleurs des risques sanitaires encourus ?
  • Réponse du 26/04/2024
    • de DOLIMONT Adrien
    L’étude évoquée par l’honorable membre dans sa question porte sur l’aéroport d’Amsterdam et il y a lieu de relativiser les situations et d’éviter la comparaison entre des aéroports de taille et de volume d’activités totalement différents. Amsterdam-Schiphol a enregistré 441 969 mouvements aériens en 2023 contre 33 562 mouvements pour Liege Airport.

    Il n’existe manifestement pas non plus de raisons d’affirmer qu’un aéroport cargo serait plus concerné par la problématique qu’un aéroport passagers.

    Il est reconnu que la combustion des moteurs, qu’ils soient d’avions, de navires ou de véhicules au sens large, libère divers composés toxiques, mais les études indiquent peu de différences majeures dans la composition des composés organiques émis par les moteurs à réaction et les moteurs thermiques au sens large.

    Comme tout employeur, Liege Airport est responsable du bien-être de ses travailleurs et cet élément lui tient très à cœur. En 2005, une étude détaillée avait ainsi été menée par l’ISSeP pour surveiller l’exposition des travailleurs, en particulier les avitailleurs qui peuvent être exposés aux vapeurs de kérosène.

    Les paramètres analysés lors de cette étude ont été les composés organiques volatils (COV) et en particulier les BTEX , le CO, les NOx et les particules fines.

    Les résultats ont montré des valeurs inférieures aux seuils réglementaires.

    Ils ont été analysés par la médecine du travail et aucune mesure corrective n’a été jugée nécessaire vu les faibles concentrations à l’exposition.

    Depuis le permis d’environnement de 2005, Liege Airport est équipé d’une station de mesure de la qualité de l’air gérée par l’ISSeP qui n’a pas relevé de résultats dépassant les normes en vigueur. La conclusion de l’ISSeP est d’ailleurs que les résultats des mesures sont typiques d’un environnement urbain.

    Plus récemment, dans le cadre de l’étude d’incidences sur l’environnement menée dans le cadre du renouvellement du permis d’environnement de l’aéroport, des mesures de la qualité de l’air sur l’aéroport ont été menées en situation actuelle et en situation projetée pour l’ensemble des gaz à effet de serre.

    L’AWAC a repris ces mesures dans le cadre de son analyse de la demande de permis et conclut que les valeurs limites pour la protection de la santé humaine de la directive européenne 2008/50/CE sont respectées.

    Le « nouveau » permis de l’aéroport impose la réalisation de campagne de mesures plus larges de la qualité de l’air via des campagnes fixes et mobiles. La première vague est en cours et s’étalera, conformément au permis, sur les années 2024 et 2025.

    À noter aussi que Liege Airport a adopté une politique environnementale volontariste avec la mise en œuvre de plusieurs initiatives visant à réduire la pollution due à la combustion, telles que l’électrification des flottes de véhicules, l’adoption de carburants durables comme le HVO100 et le SAF sans oublier l’intégration, conformément aux nouvelles normes européennes, de l’utilisation d’eGPU ou de prises 400 Hz pour diminuer l’utilisation des APU thermiques utilisés par les opérateurs d’assistance en escale, réduisant ainsi la combustion de carburants fossiles.

    À noter aussi que les flottes d’avions se modernisent et vont vers des avions qui consomment moins et donc polluent moins.

    Les mêmes inquiétudes et précautions se sont posées au niveau de l’aéroport de Charleroi où plusieurs départements (handling-piste et fuel) travaillant autour des avions ont interpellé les membres du CPPT et la Médecine du Travail de l’époque pour voir s’il existait réellement des risques pour la santé liés aux odeurs de carburant et des fumées qui sortent des réacteurs.

    Dès lors, des études ont été menées en 2010, 2016 et 2017 à ce niveau.

    Ces études avaient comme objectif de mesurer les concentrations de certains polluants dans l’air et de réaliser un biomonitoring urinaire pour voir s’il y avait des traces de Benzène et Toluènes dans le corps.

    La dernière étude a révélé que les différents résultats d’exposition contrôlés étaient tous inférieurs aux normes en vigueur.

    Voici les conclusions qui ont pu être dégagées :
    - les agents travaillant à proximité des avions sont peu exposés aux composés organiques volatils et aux particules fines ;
    - il est convenu de réaliser une analyse des risques tous les 5 ans (biomonitoring urinaire + mesurages des agents chimiques) et non plus tous les ans ;
    - concernant les NOX, des analyses seront programmées via un détecteur à lecture directe en 2024.

    En somme, toutes les concentrations trouvées sont inférieures à 1 mg/m3 et largement inférieures à leurs valeurs limites d’exposition professionnelle respectives.

    Il y a toutefois une exception à ce constat qui concerne le xylène pour lequel la concentration du mélange des isomères est égale à 1,013 7 mg/m3.

    Cette valeur reste néanmoins largement inférieure aux valeurs limites d’exposition professionnelle du xylène, qui est fixée à 220 mg/m3.

    Les résultats obtenus à l’aéroport de Charleroi sont similaires à ceux obtenus par l’Institut National de Recherche en Santé et Sécurité sur les 9 plus importants aéroports français.

    Le rapport de cet Institut est donc rassurant, ce qui n’empêche que BSCA doit rester vigilante aux particules fines.

    La SOWAER a quant à elle, dans le cadre d’une convention signée avec l’ISSeP, mis en place un dispositif permanent de mesures de la qualité de l’air autour des deux aéroports wallons.

    Cette convention rencontrait une demande de la déclaration de politique wallonne (DPR) 2019-2024 qui précise que : « Le Gouvernement réalisera également une étude au niveau de la qualité de l’air aux alentours des aéroports. Cette étude intégrera l’ensemble des résidus présents dans les gaz de combustion du kérosène des avions. ».

    La convention porte sur l’installation de deux stations de mesures par aéroport et quatre jauges de retombées des hydrocarbures par aéroport.

    La convention prévoit de mesurer les principaux polluants susceptibles d’être émis par les avions et toutes les autres activités aéroportuaires.

    Les rapports annuels et/ou semestriels sur la qualité de l’air dans les zones des deux aéroports régionaux sont disponibles sur le site internet de l’ISSep.

    Les conclusions du dernier rapport de l’ISSep portant sur les analyses effectuées en 2023 sur l’aéroport de Liège sont rassurantes.

    Il en ressort en effet que :
    * « Les résultats de l’année 2023 pour le dioxyde d’azote (NO2) et les particules fines (PM10) montrent que les valeurs limites définies par la directive européenne 2008/50/CE sont respectées au niveau du site de mesure de Liege Airport, ceci tant au niveau des valeurs limites horaires (NO2), que des valeurs journalières (PM10) et annuelles (NO2 et PM10). En effet, 7 dépassements de la valeur limite journalière de 50 µg/m3 ont été observés en PM10 (sur les 35 tolérés par la Directive) et aucun dépassement de la valeur limite horaire de 200 µg/m3 n’a été observé en NO2. »

    * « Le profil de “pollution” de cette station ne présente pas de particularités singulières et est semblable à ceux observés pour les autres stations de l’agglomération liégeoise. Concernant les oxydes d’azote, on peut observer sur la rose de pollution que les concentrations moyennes sont plus importantes pour les secteurs de vents orientés Est et Nord-Est. Le profil journalier ainsi que le profil hebdomadaire du NO et du NO2 traduisent typiquement l’influence du trafic routier situé à proximité. »

    * « Par rapport aux critères d’intervention définis par l’Agence wallonne de l’Air et du Climat (AwAC) et l’Université de Liège (ULiège), ceux-ci seraient largement respectés pour le benzène, le toluène, l’éthylbenzène, le naphtalène et le formaldéhyde. Comparées aux stations permanentes du réseau de surveillance de la qualité de l’air en Wallonie, les mesures autour de l’aéroport sont semblables, voire inférieures, à celles obtenues dans les stations des agglomérations urbaines comme Charleroi et Liège. Aucune retombée en hydrocarbures (fractions C5-C11 et C10-C40) n’a pu être mise en évidence aux quatre points de mesure installés autour de l’aéroport. Tous les résultats sont inférieurs à la limite de quantification. »

    Si les conclusions des différentes recherches réalisées jusqu’ici sont rassurantes, il convient toutefois évidemment que nous restions attentifs à la santé des milliers de travailleurs de nos deux aéroports.

    Pour le surplus, j’invite à interroger également mes collègues Ministres de la Santé et de l’Environnement, compétentes également sur cet aspect.