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Le risque sanitaire pour la Wallonie du fentanyl de rue

  • Session : 2023-2024
  • Année : 2024
  • N° : 330 (2023-2024) 1

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  • Question écrite du 27/03/2024
    • de BELLOT François
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale et de l'Economie sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    L'arrivée du fentanyl en Belgique depuis l'Amérique du Nord doit retenir notre attention. Ses capacités euphorisantes surpassent de 100 fois celles de la morphine.

    Il s'agit d'une drogue de synthèse, puissant analgésique aux effets anesthésiants se trouvant en rue sous forme de poudre ; elle est avalée, fumée, sniffée, injectée, parfois mâchée lorsqu'elle provient de patches détournés de leur usage médical.

    Les opioïdes peuvent provoquer une dépression respiratoire et une overdose mortelle. En 2022 aux USA, ils ont engendré plus de 120 000 décès.

    Un stock de naloxone serait une réponse aux risques de cette drogue. La naloxone s'administre sous diverses formes : injection intraveineuse ou intramusculaire, voie sous-cutanée, spray nasal.

    Initialement, le fentanyl est un médicament délivré sur ordonnance.

    Ine Van Wymersch, du Commissariat national aux drogues, a indiqué que « la question n'est plus de savoir si, mais quand le fentanyl va arriver sur le territoire ».

    À quelles préparations Madame la Ministre travaille-t-elle pour faire face au fentanyl, hautement addictif ?

    Informe-t-elle les secteurs médicaux qui y seront confrontés et les arme-t-elle à suffisance ?

    Associe-t-elle l'AViQ ?

    En 2022, le CSS recommandait que la naloxone « soit disponible sur le marché belge » et de préférence sous forme d'administration nasale pour sa facilité d'utilisation. Ces sprays intranasaux ne sont actuellement pas commercialisés en Belgique.

    Considère-t-elle ces recommandations ?

    Pourquoi les sprays ne sont-ils pas disponibles comme préconisé ?

    Selon Eurotox, la consommation légale de fentanyl a explosé en 15 ans en Belgique. En 2021, 67 146 patients ont reçu au moins une prescription de fentanyl contre 39 367 en 2005.

    Madame la Ministre est-elle attentive à ces chiffres inquiétants ? Comment explique-t-elle cette évolution de consommation sans réaction suffisante ?

    Jauge-t-elle le risque du fentanyl de rue au vu de la hausse de consommation prescrite ? Initie-t-elle des collaborations aux échelles régionale et nationale ?
  • Réponse du 10/04/2024
    • de MORREALE Christie
    Le discours de la Commissaire nationale aux drogues, Ine Van Wymersch, doit également nous alerter sur l’importance de prendre des mesures pour que le phénomène qui se passe aux États-Unis ne touche pas nos populations.

    Le fentanyl utilisé comme puissant antidouleur, entraîne par surdosage, la mort par détresse respiratoire. En Belgique, on est pour l’instant épargné par ce type de drogues d’après une étude de Sciensano menée entre février et juin 2023 auprès de consommateurs d’héroïne (un autre opioïde). Toutefois, les chiffres liés à l’usage d’opioïdes dans le cadre médical sont interpellant.

    Selon un rapport d’Eurotox, « le nombre de Belges ayant reçu une prescription remboursée (hors pharmacies hospitalières) d’un opioïde antalgique a quasiment doublé entre 2005 et 2021, passant de 573 104 patients à 1 126 167. […] Le nombre de patient·e·s ayant reçu une prescription de fentanyl est quant à lui passé de 39 367 en 2005 à 67 146 en 2021, soit près du double. Mais l’augmentation la plus spectaculaire se situe au niveau du nombre de patient·e·s ayant reçu une prescription d’oxycodone, qui est passé de 2 713 en 2007 à 81 911 en 2021 (soit 30 fois plus). »

    Face à ces constats, il faut prendre différentes mesures. Le Fédéral a mené une campagne de sensibilisation à l’usage abusif d’opioïdes, que nous avons relayée en Wallonie via l’AViQ.

    L’AViQ suit les travaux relatifs à la prévention de la coalition sur les drogues de synthèse initiée par les USA dans le but d’unir les forces au niveau mondial dans la lutte contre les drogues de synthèse. Dans le courant de ce mois de mars, la question sera, par ailleurs, discutée au sein de la Commission sur les stupéfiants des Nations Unies.

    Durant cet événement, la Belgique organisera un événement parallèle de haut niveau sur l'accès et la disponibilité des substances contrôlées en partenariat avec l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime.

    Par ailleurs, il est nécessaire que la Belgique avance sur les législations relatives à la Naloxone. Concrètement, en Belgique, la Naloxone n’est disponible que sous forme injectable et seulement en hôpital. Pourtant, les recommandations internationales, notamment de l’EMCDDA (European Monitoring Centre for Drugs and Drug Addiction), appellent à la généralisation de la disponibilité de ce produit et à la formation et à la sensibilisation des usagers de drogues et des professionnelles susceptibles d’être en contact avec des consommateurs de drogues.

    En Belgique, le Conseil supérieur de la santé dans son avis n°9695 d’octobre 2022, recommande de former les professionnels susceptibles de délivrer de la Naloxone et de mettre à disposition des kits de formation et du matériel pédagogique à utiliser ou à donner aux usagers.

    La Commission européenne a autorisé en novembre 2017 la commercialisation de la Naloxone sous forme d’un spray nasal (facile d’utilisation pour les cas de toxicomanie de rue) disponible actuellement dans deux pays européens, la Norvège (1 firme) et l’Allemagne (3 firmes), mais toujours pas en Belgique. Il faut travailler en collaboration avec les autorités compétentes pour examiner les moyens d’introduire en Belgique le conditionnement de ce produit en spray nasal.