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Tests de munitions sur le domaine militaire d'Elsenborn.

  • Session : 2006-2007
  • Année : 2007
  • N° : 110 (2006-2007) 1

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  • Question écrite du 06/03/2007
    • de STOFFELS Edmund
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Monsieur le Ministre a, à plusieurs reprises, été interrogé à propos des tests de munition réalisés par MECAR, une entreprise à but commercial. J'insiste sur le caractère commercial parce que certains prétendent même que les tests répondent à un intérêt général et public.

    Aujourd'hui, ce n'est pas de cela que je souhaite parler à Monsieur le Ministre, mais de certaines découvertes faites par les riverains du camp d'Elsenborn qui m'ont informé des résultats et des analyses.

    En effet, les riverains - qui n'agissent pas contre l'activité militaire dans le camp, mais contre son utilisation à des fins commerciales - m'ont fourni les résultats d'une analyse chimique d'un projectile qu'ils ont trouvé et qui aurait été testé par l'entreprise en question. L'analyse chimique date du 28 août dernier et a été faite par un laboratoire réputé et reconnu sur le plan international, en l'occurrence par AIB-Vinçotte. Il ne s'agit donc pas d'un ouï-dire ni de critiques amateuristes.

    Il résulte de l'analyse chimique que le projectile contient - contrairement aux déclarations de certaines autorités militaires - du tungstène (un métal lourd), du cuivre et du cobalt - le dernier produisant au moment de l'impact du projectile, donc au moment où les températures sont élevées, des isotopes radioactifs dispersés dans l'environnement et exposant l'air, le sol, l'eau et finalement l'homme au risque d'une contamination problématique.

    Je tiens à remercier Monsieur le Ministre pour avoir soumis les tests de munitions à la procédure du permis d'environnement de catégorie II. Actuellement, l'entreprise en question dispose-t-elle d'un permis valable ? On me dit que non. Si ceci se confirme, comment Monsieur le Ministre va-t-il réagir en sachant que l'entreprise continue à tester des munitions ? Et il m'intéresse de savoir si les éléments du tungstène et du cobalt avaient été mentionnés dans les demandes de permis telles qu'introduites par l'entreprise ?

    Ensuite, je demande à Monsieur le Ministre que sa « Police de l'environnement » aille vérifier sur place si effectivement des munitions à composante tungstène et cobalt ont été testés. Il me semble que la transparence nous impose de voir clair. Un rapport circonstancié de la DPE aura le mérite de lever le doute sur la question. Nous avons le droit de connaître la vérité.

    Dans l'hypothèse où la DPE confirme les constats faits par les riverains, que va entreprendre Monsieur le Ministre à l'égard de l'entreprise en question ? La réglementation en matière de permis d'environnement, classe I, impose des enquêtes d'incidence sur la santé et sur l'environnement pour des motifs bien moins graves que le risque d'une contamination par des isotopes radioactifs. Je ne vois pas pourquoi une entreprise de ce type de munition ne doit pas se soumettre aux procédures et aux règles qui existent pourtant pour tout le monde.

    Pour conclure, je n'envie pas Monsieur le Ministre pour le travail délicat que qu'il aura à faire mais je compte sur lui pour que la vérité ait ses droits.
  • Réponse du 29/03/2007
    • de LUTGEN Benoît

    En ce qui concerne l'activité de MECAR et les obligations en matière de déclaration et/ou de permis environnement

    La société MECAR effectue des tirs d'essais de munitions à Elsenborn depuis 6 ans. Pour ce faire, MECAR achemine chaque jour son matériel jusqu'à Elsenborn, le monte, effectue les essais de tirs, démonte le matériel et repart.

    Au printemps 2006, MECAR envisage d'installer sur le site d'Elsenborn un stand de tir fixe et introduit une demande de permis global. La commune refuse d'octroyer le permis et il en sera de même pour le recours.

    MECAR décide donc de poursuivre ses activités comme auparavant. Cependant, vu le matériel utilisé (générateur d'électricité et groupe de froid) et l'activité (laboratoire d'essais de moins de cinq personnes), MECAR a été enjoint par la DPE d'introduire une déclaration auprès de l'administration communale.

    Cette déclaration pour des activités et installations de classe 3 a été à deux reprises déclarée irrecevable. La seconde fois, l'irrecevabilité a été justifiée par le fait que les documents n'étaient pas signés en original et que toutes les positions de tirs ne figuraient pas dans la déclaration, comme cela avait été demandé.

    Entre-temps, la législation a changé (Moniteur belge du 30 janvier 2007) : elle classe désormais l'activité de MECAR en classe 2 (rubrique 74.30.04 « Centre d'essais et d'analyses de munitions et d'armes »).

    Par avertissement du 21 mars 2007, MECAR a été enjoint d'introduire pour le 31 mai 2007 au plus tard, une demande de permis d'environnement pour ses activités au camp militaire d'Elsenborn.

    Lors de l'introduction par MECAR de la demande de permis classe 2, l'autorité devra s'assurer que les incidences environnementales sont correctement évaluées au travers de la notice. Le cas échéant, l'autorité demandera un complément d'information sur certains aspects bien précis de l'activité ou de ses conséquences sur l'environnement (par exemple : le bruit, la pollution du sol,…) ; si nécessaire, l'autorité prescrira une étude d'incidences.

    En ce qui concerne les tirs et leurs effets sur l'homme et l'environnement

    Analyses chimiques réalisées sur initiative des riverains.

    Il n'est pas possible à la DPE de se prononcer sur des résultats d'analyses qu'elle ne connaît pas et pour lesquels il n'est précisé ni où, ni quand, ni comment a été prélevé l'échantillon.

    Tirs de projectiles au tungstène - cuivre - cobalt.

    Il est établi qu'il y a eu dans le passé des tirs de munitions contenant du tungstène. MECAR reconnaît avoir tiré pendant environ 2 séances de telles munitions tout en précisant qu'il y a eu des accords avec les représentants de la commune de Bütgenbach, suite auxquels MECAR s'est engagé à ne plus tirer de munitions au tungstène à Elsenborn.

    Questionné sur la présence de cobalt dans les munitions, MECAR signale que le tungstène n'est jamais pur à 100% et qu'il se peut qu'il y ait du cobalt en traces dans les têtes de munitions. La DPE ne dispose pas actuellement d'informations plus précises sur la composition exacte des munitions tirées par MECAR.

    A la question précise de l'honorable Membre, de savoir si la déclaration introduite par MECAR mentionne l'utilisation de munitions contenant du tungstène ou du cobalt, la réponse est négative : la déclaration introduite ne contenait pas d'informations sur la composition chimique des munitions utilisées.

    Toxicité et écotoxicité.

    La question fait allusion à la production d'isotopes radioactifs du cobalt pendant les tirs. Cette crainte peut être écartée car l'isotope radioactif du cobalt (Co60) n'existe pas de manière naturelle. Il n'est pas non plus produit par exposition à une température élevée. L'isotope radioactif Co60 est produit synthétiquement dans des réacteurs nucléaires en bombardant de neutrons du Cobalt sous forme naturelle (Co59). Ce Co60 est utilisé dans des applications, notamment médicales.

    En ce qui concerne la question générale de toxicité et d'écotoxicité, il faut rappeler que la présence à elle seule d'une substance ne permet pas nécessairement de conclure quant au caractère toxique ou écotoxique. D'autres paramètres interviennent : la concentration, la solubilité, le mode de contact (inhalation, ingestion, contact cutané,…), la forme chimique sous laquelle on la trouve,…


    En ce qui concerne une intervention de la DPE

    L'intervention de la DPE dans le camp militaire doit se faire en collaboration avec la Défense.

    Il existe déjà des rapports relatifs à certains aspects environnementaux du domaine militaire d'Elsenborn :

    - des rapports d'analyses des eaux de surface du « Perlbach », qui sont utilisées comme eaux potables au barrage de Montjoie ;
    - des rapports des eaux souterraines utilisées comme eaux potables au camp militaire ;
    - des résultats d'analyses de carottages réalisés récemment par l'Armée au camp militaire d'Elsenborn suite aux problèmes MECAR.

    Pour répondre à la question des risques environnementaux liés aux activités sur le domaine militaire (MECAR + les différentes composantes de la Défense), il faut des informations (résultats d'analyses) claires, précises et représentatives (nature des polluants, concentrations, forme de contact - inhalation, ingestion, contact cutané,…).

    A l'heure actuelle, avec les informations dont nous disposons, toute conclusion au niveau toxicité et écotoxicité serait prématurée.

    Les investigations sur les zones d'impact liées plus particulièrement aux tirs de MECAR pourraient porter sur la pollution du sol par une analyse chimique de la composition du sol, d'une part, et sur les problèmes que pourrait entraîner cette pollution par des tests de lixiviation, d'autre part.

    En ce qui concerne une étude environnementale éventuelle au domaine militaire d'Elsenborn, la question première qui se poserait est celle de l'objectif d'une telle étude.

    Si l'objectif est de savoir s'il y a eu des tirs avec des munitions contenant du tungstène, une étude est inutile, puisqu'on sait qu'ils ont eu lieu et il est donc très probable que l'on retrouve des traces de tungstène dans les zones d'impact.

    Si la question est : « Quelles en sont les conséquences environnementales pour l'homme, pour la faune, pour la flore ? », il faudra effectuer des investigations multidisciplinaires très approfondies avant de pouvoir y répondre.