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Noyau dur du chômage.

  • Session : 2006-2007
  • Année : 2007
  • N° : 92 (2006-2007) 1

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  • Question écrite du 26/04/2007
    • de STOFFELS Edmund
    • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, de l'Emploi et du Commerce extérieur

    A l’heure à laquelle l’UWE se félicite d’une progression probable du PIB wallon de 3 %, on devrait s’attendre à ce que cette progression se répercute aussi sur le taux de chômage ou plutôt sur le taux d’emploi.

    D’un autre côté, nous constatons qu’il y a des inadéquations entre le profil des demandeurs d’emploi et les emplois disponibles, par exemple dans les secteurs de la construction, du bois, de l’alimentaire etc. Ne faut-il pas dire la vérité aux jeunes quand ils sont encore en formation ? Ne faut-il pas leur dire clairement quels sont les métiers pour lesquels on recherche des travailleurs et quels sont les débouchés qui mènent à l’impasse ?

    Ne faut-il pas plaider pour encourager davantage de jeunes à suivre une formation professionnelle dans l’entreprise ? Et encourager les patrons de contribuer à la formation des jeunes en les engageant comme apprentis plutôt que de se lamenter sans arrêt sur les inadéquations constatées ?

    Est-ce une piste que de doubler la prime à l’embauche par une prime à l’embauche d’un apprenti (qui compensera en partie l’effort du patron lorsque celui-ci s’engage à former un jeune) ?

    Reste après tout le noyau dur du chômage composé de personnes dont le manque de qualification est tel qu’il est extrêmement pénible de trouver un emploi pour eux.

    A combien de personnes Monsieur le Ministre estime-t-il ce noyau dur ? Y a-t-il des concentrations de ce noyau dans les villes ? Lesquelles ? Quel est le profil type de ce noyau ? Est-ce que les PRC ne devraient-ils pas se focaliser sur eux ?
  • Réponse du 07/06/2007
    • de MARCOURT Jean-Claude


    En ce qui concerne le lien entre les évolutions du PIB et du taux de chômage, il n’existe pas de corrélation systématique entre la croissance du PIB et les variations de l’emploi. Toutefois, selon les experts, quand elle existe, il n’y a pas nécessairement de rapport de proportionnalité. Ainsi, une augmentation de 1% du PIB n’entraîne pas une augmentation de 1% du nombre d’emplois créés. De plus, un même volume de croissance n’a pas le même effet sur l’emploi. Aussi, les économistes disent que la croissance est plus ou moins riche en emplois. A titre d’exemple, les Etats-Unis avec une croissance moindre créent 3 fois plus d’emplois que la France.

    Le lien entre croissance et emploi est également complexe. En effet, la croissance économique peut s’opérer de manière intensive ou extensive. Autrement dit, en utilisant davantage de capital et de travail ou en utilisant plus efficacement le capital et le travail. Ainsi, si le PIB s’accroît et que la productivité se maintient l’emploi progresse. Par contre, si le PIB s’accroît et que la productivité globale du travail s’améliore, l’économie emploiera le même volume d’emplois et ne créera pas d’emplois supplémentaires.

    Une autre relation interpelle aussi les économistes, c’est celle entre la croissance du PIB et le niveau de chômage. Si la croissance crée de l’emploi, on peut s’attendre à ce que le chômage diminue. Malheureusement, 1.000 emplois créés ne correspondent pas à 1.000 chômeurs de moins. Cela s’explique, d’une part par le fait que la relation entre croissance et chômage dépend des variations de la population active (durée de la scolarité, accroissement naturel, âge de la retraite, etc.) et d’autre part, par le fait que, lorsque l’économie crée de nouveaux emplois, on assiste à un retour sur le marché du travail de personnes qui jusque là étaient inactives. Enfin, une partie des demandeurs d’emplois sont inemployables directement sur le marché du travail (manque de qualifications par rapport aux nouveaux emplois). Il n’existe donc pas de lien mécanique entre croissance, création d’emplois et diminution du chômage.

    Pour ce qui est de l’inadéquation entre le profil des demandeurs d’emploi et les emplois disponibles, il est clair que ce phénomène interpelle. C’est pourquoi, notamment en collaboration avec la Ministre Marie Arena, en charge de la Formation au sein du Gouvernement wallon et de l’Enseignement obligatoire au sein du Gouvernement de la Communauté française, qui pourrait donner des informations complémentaires en ces domaines, il a été décidé, dans le cadre de l’axe 5.1. du Plan Marshall, de confier au Forem la mise en place d’un Plan de lutte contre les pénuries.

    C’est ainsi que, depuis le début de l’année 2006, quatorze métiers ont fait l’objet d’une analyse approfondie, immédiatement suivie par la mise en place d’actions subséquentes, dont l’information du public et le lancement de formations supplémentaires ou complémentaires, etc.

    Par ailleurs, les différents conseillers du Forem sont invités à prendre en compte la dimension « marché de l’emploi » au moment de prescrire leurs actions. Il en est de même pour les opérateurs, notamment dans le cadre des appels à projets lancés par l’Office, ou encore lorsqu’il s’agit, dans le cadre du Dispositif intégré d’insertion socioprofessionnelle (DIISP), de mettre en place des filières et des passerelles.

    En outre, un focus particulier, relatif à la problématique de l’inadéquation et des pénuries figure en bonne place dans les conventions-cadres de collaboration signées, par la Région wallonne, avec les partenaires sociaux des principaux secteurs professionnels, invitant ces derniers tant à accentuer leur connaissance de la problématique et à partager leurs informations, qu’à collaborer avec le Forem, l’IFAPME ou l’enseignement en cette matière.

    Enfin, un portail d’information sur le marché du travail, provisoirement dénommé IMT (Information sur le marché du travail), est en cours d’élaboration au sein du Forem. Ce portail, qui sera lancé dans les prochain mois, a pour ambition, à l’image du site éponyme développé par Emploi-Québec, de permettre la consultation d’informations détaillées sur le marché de l’emploi, les principaux secteurs et métiers, en ce compris des données relatives à leur évolution. De même, une réflexion visant à professionnaliser le secteur de l’orientation, qu’il s’agisse d’aider des jeunes à faire un choix de filière d’étude ou des demandeurs d’emploi, est en cours. Son résultat devrait faire l’objet d’une validation par les Gouvernements wallon et de la Communauté française dans les prochaines semaines.

    En ce qui concerne la formation professionnelle des jeunes, une information complète à ce sujet, portant notamment sur la formation en alternance et les éventuelles évolutions envisagées en cette matière, peut être obtenue auprès de la Ministre de la Formation. Il faut souligner toutefois qu’un arrêté modificatif relatif au Plan formation insertion (PFI) a été adopté, en première lecture, à l’occasion du Gouvernement wallon du 26 avril 2007.

    Pour rappel, le PFI vise à permettre à une entreprise de former un nouveau collaborateur à son propre métier pour ensuite engager le demandeur d’emploi sous contrat de travail, et ce, en allégeant considérablement les coûts salariaux pendant la période de « formation-insertion ».

    La principale modification intégrée à l’arrêté concerne les jeunes de moins de 25 ans disposant, au maximum, d’un diplôme inférieur au diplôme du troisième degré de l'enseignement secondaire, soit des peu qualifiés dont il est prouvé qu’une majorité a des difficultés à s’insérer dans l’emploi. Pour ces jeunes, le texte habilite le Forem à porter la durée du PFI à un maximum de 52 semaines (contre 26 actuellement). Bien entendu, conformément aux termes du décret, la durée d’engagement subséquente, sous contrat de travail, devra, elle aussi, être allongée dans les mêmes proportions.

    A côté de cette mesure, d’autres propositions ont été entérinées par le Gouvernement. Ainsi, on relèvera en particulier les décisions relatives à l’amplification et à l’intensification du processus d’accompagnement des jeunes par le Forem, lequel devra leur proposer la conclusion d’un contrat DIISP dès le jour de leur inscription comme demandeur d’emploi ou encore la mise en place de quatre initiatives pilotes visant l’insertion des jeunes issus de quartiers en difficulté qui sont lancées sur base d’un large partenariat public-privé.

    Enfin, concernant le « noyau dur du chômage », ce concept doit bien entendu être abordé avec prudence et, à tout le moins, en prenant en considération quatre dimensions principales. A savoir :

    - la qualification : les personnes les plus qualifiées quittent plus rapidement la demande d’emploi que celles peu ou pas qualifiées. Remarquons cependant que les jeunes issus de l’apprentissage ou de certaines filières professionnelles ou techniques trouvent aussi rapidement du travail. Cette seule dimension ne permet donc pas de définir le « noyau dur » ;

    - la durée d’inoccupation : les demandeurs d’emploi inoccupés (DEI) depuis plus de deux ans, tendent à s’enliser dans le chômage. Ces personnes sont qualifiées de chômeurs de longue durée ;

    - l’âge : on observe que les demandeurs d’emploi les plus âgés présentent une durée d’inoccupation plus élevée et sortent moins vite de la demande d’emploi ;

    - il est également nécessaire de prendre en considération la dynamique de la demande d’emploi. En effet, si certaines personnes passent la majorité de leur temps dans la demande d’emploi, d’autres font de réguliers aller-retour entre le travail et le chômage.

    Sur cette base, suivant en cela l’analyse réalisée par le service d’Analyse du marché de l’emploi et de la formation (AMEF) du Forem, deux approches sont possibles. D’une part, une analyse transversale de la demande d’emploi et, d’autre part, une analyse longitudinale basée sur le suivi d’une cohorte de demandeurs d’emploi, les principaux éléments émanant de ces analyses étant repris, en synthèse, ci-après.

    Approche 1 : analyse transversale de la demande d’emploi en Région wallonne de langue française :

    Considérant ces différentes dimensions et sur base de la statistique sur la demande d’emploi (cf. tableaux 1 à 3), en avril 2007, la Région wallonne de langue française comptait :

    - 259.833 DEI dont 215.128 demandeurs d’emploi demandeurs d’allocations et 20.026 jeunes en stage d’attente ;
    - 117.225 DEI présentent une durée d’inoccupation supérieure à 2 ans ;
    - 75.731 DEI inoccupés depuis plus de deux ans ont un niveau d’études qui ne dépasse pas le secondaire du 2ème degré (peu qualifiés) ;
    - 6.661 DEI inoccupés depuis plus de deux ans et peu qualifiés ont moins de 25 ans.

    Approche 2 : Analyse longitudinale de la demande d’emploi (suivi d’une cohorte)

    Un premier travail a été réalisé par l’AMEF en 2006. A cette occasion, un groupe de 251.761 DEI inscrits entre le 1er janvier 2000 et le 30 avril 2001 a été suivi sur une période de 4 ans. Le tableau ci-après indique que 9 % de ces personnes (soit 22.156 DEI, tous âges et qualifications confondus), les « DEI stables rarement occupés », ont, en moyenne sur 4 ans, passé 96 % de leur temps dans la demande d’emploi.

    Les « DEI mobiles faiblement occupés » ont également passé une large partie de leur temps dans la demande d’emploi (86 %), mais enregistrent plus de 7 mouvements administratifs (7,48), bien que de courte durée, vers l’emploi, la formation ou en radiation. Les situations de ces personnes paraissent dès lors déjà plus dynamiques que celles de la première catégorie citée.

    Enfin, quant à l’utilisation des PRC pour aider ces personnes à réintégrer le marché de l’emploi, il convient de rappeler que le dispositif APE a été récemment modifié, notamment pour mieux cibler ses effets sur les publics très éloignés du marché du travail, tels que les jeunes très peu qualifiés.