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Législations fédérales et régionales en matière de salubrité dans le secteur locatif.

  • Session : 2007-2008
  • Année : 2007
  • N° : 78 (2007-2008) 1

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  • Question écrite du 09/11/2007
    • de STOFFELS Edmund
    • à ANTOINE André, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial


    Avant de développer la question, je tiens à citer la source qui est l’article sur les baux à loyer paru dans le dernier Echos du Logement et rédigé par M. Tholome. Un excellent article que j’ai lu avec beaucoup d’intérêt.

    En matière de fixation des critères de salubrité des logements, la compétence est régionale. La norme régionale est le Code wallon du logement. Le bourgmestre reste, aux côtés de la Région, l’acteur central de la lutte contre l’insalubrité.

    Dans un arrêté royal du 8 juillet 1997, le Gouvernement fédéral définit les exigences élémentaires de sécurité, de salubrité et d’habitabilité auxquelles doivent répondre les logements de résidence principale. A défaut, le Juge de Paix peut résilier un bail aux torts du propriétaire soit le condamner aux travaux de remise en état nécessaires.

    Les dispositifs régional et fédéral coexistent et produisent leurs effets de façon indépendante l’un par rapport à l’autre, bien que la loi fédérale du 18 juillet 1997 renvoie expressément aux législations régionales quant à l’appréciation des critères minimaux de salubrité.

    Les effets des deux règlements sont quelque peu différents : le non-respect de la norme régionale, norme d’ordre public, débouche sur la nullité du contrat de bail tandis que le non-respect de la norme fédérale, norme impérative, débouche sur la résiliation du contrat de bail aux torts du bailleur, le chargeant éventuellement de l’exécution de travaux.

    Le juge, appelé à trancher en cas de conflit ou d’arbitrage, devra respecter simultanément les deux normes. Ce qui peut l’amener dans des situations difficiles lorsqu’il devra trancher.

    L’auteur de l’article cite un exemple concret que je me permets de reproduire ici : « Quelle sera l’attitude du Juge de Paix qui constaterait, par exemple, qu’une chambre meublée ne fait pas l’objet d’un permis de location ou ne répond pas aux normes de qualité ?

    Tranchera-t-il en fonction de la norme régionale - ce qui l’amènerait à se prononcer en faveur de la nullité du bail ? Ou tranchera-t-il en fonction de la norme fédérale qui est beaucoup moins précise en la matière, nécessitant probablement une expertise préalable ? ».

    Autant de questions qui nécessitent, il me semble, une concertation entre les deux niveaux de pouvoir. Vu l’état de bon nombre de logements loués, nous ne pouvons pas accepter qu’il y ait un doute quant au choix de la norme à appliquer.

    De ce fait, je demande donc que ce point soit mis par les soins de Monsieur le Ministre à l’ordre du jour d’une future conférence interministérielle du logement - à condition de réactiver cet instrument de coordination.

    Quelle est la position de Monsieur le Ministre dans une matière qui concerne bon nombre de nos concitoyens dans leur quotidien ?
  • Réponse du 13/05/2008
    • de ANTOINE André

    L'article 2 de la loi relative au bail de résidence principale impose au propriétaire que le bien loué réponde aux exigences élémentaires de sécurité, de salubrité et d'habitabilité, lesquelles ont été définies par l'arrêté royal du 8 juillet 1997.

    Le respect de ces exigences s'apprécie au moment de l'entrée du locataire dans les lieux loués.

    De son côté, la Région wallonne a adopté un Code du logement, dont un des axes majeurs est la promotion de la qualité de l'habitat, à travers deux outils,

    - d'une part, l'instauration d'un permis de location pour les petits logements individuels ou les logements collectifs;
    - et, d'autre part, le respect de critères minimaux de salubrité, éventuellement suite à une intervention du bourgmestre.

    Un logement loué doit dès lors satisfaire à un enchevêtrement de normes parfois contradictoires, émanant de niveaux de pouvoirs différents.

    Par ailleurs, il est communément admis par la jurisprudence et la doctrine que les normes régionales affichent un caractère d'ordre public. Ainsi l'absence d'un permis de location pourrait entraîner la nullité du bail qui a été convenu.

    Par contre, les exigences fédérales en matière de sécurité, de salubrité et d'habitabilité sont d'ordre impératif. II appartient au locataire de s'en prévaloir et de demander au juge de paix, soit la résiliation du bail aux torts du bailleur, avec des dommages et intérêts, soit la condamnation du propriétaire à effectuer les travaux qui s'imposent, dans un délai déterminé, avec le cas échéant, une diminution du loyer.

    Si le bien loué doit toujours répondre aux exigences élémentaires de sécurité, de salubrité et d'habitabilité, la loi du 25 avril 2007 a précisé que cette obligation doit désormais « se faire sans préjudice des normes relatives aux logements établies par les Régions dans l'exercice de leurs compétences », en ajoutant que « ces conditions minimales sont impératives » et obligatoirement annexées au bail.

    Quelle est dès lors la portée véritable de l'insertion dans le Code civil d'une référence aux critères régionaux de qualité, débat qui faisait partie des travaux de la conférence interministérielle du logement (CIM) ?

    Je me rallierai à la position défendue par M. Nicolas Bernard dans son analyse des nouvelles dispositions en matière de bail à loyer.

    « La nouvelle loi sert surtout à faire prendre conscience aux juges chargés de mettre en oeuvre la loi sur les baux de résidence principale que la qualité du bien loué ne s'apprécie plus à l'aune exclusive des standards fédéraux. La loi du 25 avril 2007 sert de "piqûre de rappel", Cette évocation est d'autant plus importante que les normes fédérales, qualifiées d'élémentaires par la loi sur le bail de résidence principale elle-même, se contentent délibérément de fixer un seuil minimal de qualité (et ce, afin de ne point trop empiéter sur les compétences des entités régionales), à charge pour les Régions de relever ce seuil. ce qu'elles ont d'ailleurs fait. Il ne serait pas illogique que les juges suivent le mouvement (quitte, vu la complexité de la matière, à ce qu'ils recourent aux services régionaux d'inspection de la qualité des biens pour disposer d'une appréciation éclairée sur l'état du logement pris en location). Mais ici aussi, il faudra se garder d'une application trop stricte, de crainte de devoir procéder à l'anéantissement de quantité de contrats de location» (N. Bernard, « La loi du 25 avril 2007 et les nouvelles dispositions en matière de bail à loyer », Journal des Tribunaux, 2007, pp. 516 et 517).

    Ce débat s'inscrit désormais dans le transfert de la matière des baux à loyer, compétence fédérale jusqu'alors, vers chaque Région.