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Les compteurs à gaz.

  • Session : 2007-2008
  • Année : 2007
  • N° : 177 (2007-2008) 1

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  • Question écrite du 17/12/2007
    • de KUBLA Serge
    • à ANTOINE André, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial

    Une étude néerlandaise a récemment constaté que les compteurs de gaz calculaient 6 % de plus que la consommation réelle.

    Cette différence s’expliquerait par un écart de température.

    Certaines associations en déduisent que les ménages paient trop proportionnellement à leur consommation réelle.

    Qu’en est-il réellement ?

    La CWAPE a-t-elle effectué les contrôles nécessaires afin d’éviter un tel cas de figure ?

    Enfin, si une telle différence devait être constatée, quel est le mécanisme prévu de remboursement ou de pondération ?
  • Réponse du 20/05/2008
    • de ANTOINE André

    L'étude néerlandaise en question est celle demandée par le député Halbe Zijlstra et produite le 28 mars 2007 par Anton F.P. van Putten du AnMar Research Laboratories B.V. de Eindhoven. Dès le 2 avril 2007, ce Député avait interpellé, sur base de cette étude, la Ministre des Affaires Economiques néerlandaise Maria Van der Hoeven. Celle-ci avait annoncé la réalisation d'une enquête par le régulateur de l'énergie, la DTe (Dienst uitvoering en Toezicht energie). Cette étude est toujours en cours mais des résultats provisoires ont été présentés le 17 octobre 2007 dans une communication écrite de la Ministre à la «Tweede Kamer ».

    Ces premières conclusions sont les suivantes:

    - la température du gaz peut dans certains cas différer des 7°C systématisés dans la méthode standard de correction;
    - l'imprécision des compteurs se trouve largement à l'intérieur des normes légales en la matière et est bien inférieure à celle présentée dans l'étude AnMar;
    - les éventuels profits ou pertes« sur les mesures» réalisés par les fournisseurs dans un marché désormais concurrentiel ne sont qu'une composante de leur revenu et ont une conséquence directe sur leurs prix. Tous les fournisseurs sont, par ailleurs, confrontés de manière identique au même phénomène, dans un contexte de marge brute faible;
    - aucune mesure correctrice ne saurait être actuellement envisagée;
    - l'introduction progressive des compteurs «intelligents» offrira, si besoin, des possibilités à ce propos.

    Les résultats définitifs de l'enquête DTe sont attendus au printemps 2008.

    En Région wallonne, la direction gaz de la CWaPE avait, dès la médiatisation de l'étude AnMar, procédé à une évaluation informelle de l'équivalent belge de cette problématique sur base du document de ]'ARGB: ARGB/TUC/EG3/gaz Energy Measurement/03-0l/N 2003.12.04 Groupe d'Experts GE3 - Techniques de mesure - Groupe ad hoc Gas "Energy Metering". Cet examen n'avait pas abouti à la conclusion d'une dérive significative et la nécessité de réaliser un rapport ou de formuler un avis d'autorité n'était pas apparue en cette occasion.

    Par ailleurs, tant la Métrologie que la Normalisation, dont relèvent ces questions, sont des compétences fédérales.

    Les différences relevées trouvent simplement leur origine dans l'application de la loi des gaz parfaits qui exprime que le produit de la pression d'un gaz par son volume est une constante (« PV=RT »).

    Une présentation mathématique détaillée du problème peut se faire comme suit (extrait de la note ARGB susmentionnée) : la quantité d'énergie fournie est égale à la quantité de gaz naturel livrée au client par le Gestionnaire du réseau de distribution multipliée par le pouvoir calorifique supérieur du gaz distribué.

    a. Détermination du pouvoir calorifique supérieur du gaz fourni

    Conformément à la norme ISO 6976, le pouvoir calorifique supérieur est défini en Belgique comme étant la quantité de chaleur dégagée par la combustion complète du gaz dans l'air sous une pression absolue constante de 1,01325 bar et à la température constante de 25°C pour une quantité de référence du gaz considérée, toute l'eau formée pendant la combustion étant condensée à la température de 25°C.

    Selon la norme ISO, la quantité de référence peut être, soit la môle, soit la masse ou le volume. L'unité de référence retenue actuellement en Belgique est le m3 normal (m3(n)) dont les conditions de référence sont une pression absolue de 1,01325 bar et une température de 273,15° K (ou 0° C: référence du «zéro absolu» par rapport auquel tous les calculs physiques d'expansion de volumes gazeux sont effectués).

    b. Correction de volume (en fonction de la pression, de la température et de la compressibilité du gaz fourni)

    Il peut être observé que, la multiplication du nombre de m3(n) consommés par le pouvoir calorifique de ce gaz exprimé par m3(n), donne pratiquement le même résultat que celui qui est calculé lorsqu'on multiplie le nombre de m mesurés, non transformés en m3(n), par le pouvoir calorifique de ce gaz à 25°C, si le gaz est fourni à une pression effective de 25 mbar et à une température moyenne se situant à environ 7°C.

    Compte tenu de cette quasi-équivalence pour ces conditions de pression et de température, un dispositif de conversion de volume de gaz n'est en général pas justifié à basse pression. Dès lors le processus de calcul utilisé pour la facturation consiste à multiplier les m3 mesurés chez les clients par les pouvoirs calorifiques mesurés à 25°C par m'en) et, puisque la pression peut être différente de 25 mbar, par un coefficient complémentaire qui tient compte du rapport entre la pression absolue de réseau et 1,03825 bar (= 1,01325 + Peff/ 1,03825).

    Pour une pression effective de distribution de 25 mbar, ce coefficient complémentaire vaut bien entendu 1 (la pression usuelle de distribution est de 25 mbar pour le gaz L et de 21 mbar pour le gaz H).

    Dans les cas où cela se justifie (grand débit et/ou variations significatives de la pression ou de la température de mesurage), un dispositif de conversion de volume de gaz est installé chez les clients (non résidentiels). Celui-ci a pour but de déterminer directement le nombre de m3(n), à partir des m3 livrés par le Gestionnaire du réseau de distribution. Pour ces clients, le processus de calcul consiste à multiplier les m3(n) obtenus par le pouvoir calorifique mesuré à 25°C par m3(n).

    Pour de très grosses consommations, il est possible de placer un système de mesure direct de la quantité d'énergie fournie. Pour les autres, ces systèmes ne sont aujourd'hui pas justifiés compte tenu de leurs coûts élevés.

    A la lecture de l'étude AnMar, il convient de relever que certains échantillons statistiques sont de dimensions assez faibles et que certaines approches méthodologiques qu'il est difficile de détailler ici (notamment des généralisations annuelles de relevés estivaux) posent question.

    Tout est donc basé sur l'hypothèse que, pour la fourniture de gaz en distribution publique, le gaz est supposé avoir, au compteur, une température de 7°C. Si sa température est inférieure, vraisemblablement en hiver, la même unité de volume relevé par le compteur aura un contenu énergétique supérieur. On pourrait considérer qu'il y a sous-comptage, à l'avantage du client. A l'inverse, vraisemblablement en été, il se pourrait qu'il y ait surcomptage, A cela s'ajoute que la consommation est, statistiquement pour la distribution publique résidentielle, 10 fois moins importante en été qu'en hiver.

    L'étude néerlandaise entend établir que la température du gaz au compteur est en permanence largement supérieure à cette valeur de 7°C.

    Une approche rapide quoique assez précise peut être faite sur base des chiffres moyens de température du sol émanant du KNMI (Institut Météorologique Néerlandais) mentionnés dans l'étude, en les considérant à la lumière du profil belge de la distribution publique résidentielle de gaz (tel que décrit par la SLP41 en usage). On peut ainsi estimer la température moyenne du gaz fourni à son entrée dans les habitations:
    ____________________________________________________________________
    Température moyenne % volume DP annuelle
    sol °C résidentielle selon SLSP 41
    _______________________________________________________
    Janvier 5,9 16,0 %
    Février 5,3 14,0 %
    Mars 5,9 13,0 %
    Avril 8,0 9,6 %
    Mai 11,1 5,2 %
    Juin 14,0 1,9 %
    Juillet 16,3 1,3 %
    Août 17,4 1,3 %
    Septembre 16,2 2,2 %
    Octobre 13,9 7,9 %
    Novembre 10,8 11,8 %
    Décembre 7,8 15,7 %
    ____________________________________________________________________


    Ce calcul conduit à une moyenne applicable au volume annuel de 8,47°C au lieu des 7,0°C de la méthode, soit un surcomptage de 0,61 % .

    Il reste à établir l'évolution de cette température entre la limite de l'habitation et le compteur.

    l'étude estime que c'est presque la température interne des habitations qui définit la température du gaz au compteur et présente donc la température de 19,0°C, ce qui entraînerait dès lors un surcomptage de 4,38 %. Cette hypothèse pourrait parfois se vérifier en été lorsque le temps de séjour du gaz dans les conduites est élevé; elle apparaît moins réaliste dans les conditions de consommation hivernale: ce temps de séjour est statistiquement 10 fois plus court et le volume de gaz appelé pour une remise à température d'une chaudière est largement plus grand que le volume de tuyauterie exposé à la température interne de l'habitation, 1:' enquête en cours apportera sans doute une réponse intermédiaire à cette question, mais les surcomptages cités dans l'étude sont vraisemblablement très exagérés.

    Il semble d'ailleurs exister certaines différences quant au placement des compteurs entre les Pays-Bas et la Belgique: au lieu d'être installés majoritairement dans des coffrets au sein de l'habitation comme mentionné dans l'étude néerlandaise, les compteurs sont, en Belgique, bien davantage situés dans des locaux peu ou pas chauffés (caves, garages..) ou a distance très faible de l'entrée de l'habitation et même dans des coffrets « à rue ».

    D'autre part, le rôle de restitution des profits joué par la concurrence, pressenti dans les conclusions provisoires aux Pays-Bas, est probable, De plus, même à défaut de celui-ci, la méthode d'allocation - réconciliation des quantités entre les fournisseurs engendre une mutualisation du phénomène et peut contribuer à la diminution du « rest-term » final supporté par les GRDs.

    En conclusion:

    - les conclusions provisoires de la Ministre néerlandaise peuvent être partagées;
    - les surcomptages mentionnés semblent exagérés, surtout pour la situation rencontrée en Belgique;
    - la méthode d'allocation - réconciliation des quantités entre les fournisseurs pourrait contribuer à diminuer l'impact éventuel du phénomène;
    - plus de précision nécessiterait l'utilisation de dispositifs de comptage en énergie dont le coût serait tout à fait prohibitif pour les clients résidentiels;
    - les dispositifs et paramètres actuels ont reçu l'aval du SPF Economie, compétent pour la Métrologie légale;
    - compte tenu des différences constatées entre la Belgique et les Pays-Bas, aucune mesure immédiate ne saurait être prise avant une étude approfondie relevant de l'autorité fédérale et dont l'utilité n'est pas démontrée.