/

Biocarburant produit au départ d'aliments en contradiction avec les Droits de l'Homme.

  • Session : 2007-2008
  • Année : 2008
  • N° : 249 (2007-2008) 1

3 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 14/03/2008
    • de STOFFELS Edmund
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    M. Jan Ziegler, d’origine suisse, juriste, sociologue et expert de l’ONU, est clair : celui qui produit du biocarburant au départ d’aliments viole les droits élémentaires des hommes de se nourrir. Il demande un moratoire de 5 ans, mais l’industrie ne veut rien en savoir.

    Il critique le fait que les objectifs des USA et de l’U.E. en cette matière ne pourront jamais être atteints par des efforts en matière de production agricole autochtone. Très probablement, les pays industrialisés devront se tourner vers les pays de l’hémisphère sud. Il ne nie pas les effets positifs sur le climat, mais estime que la production du biocarburant va aggraver la faim dans le monde. Notons au passage que les effets positifs sur le climat ne sont pas partagés par tous les scientifiques.

    L’industrie répond par du scepticisme et refuse la demande d’un moratoire. L’industrie explique que même si l’Europe ne produit pas assez de betteraves ou de colza afin de satisfaire la demande en biocarburant, cela n’aura pas pour effet que les populations qui souffrent de faim pourront être servies. Au contraire, l’industrie pense que la production de biocarburant offre des perspectives économiques, d’emploi et de lutte contre la faim pour les pays en voie de développement.

    C’est donc un sujet qui ne manque pas d’actualité, et ce, d’autant moins que nous ne pouvons pas faire abstraction de la dimension éthique dans le débat sur l’énergie et le climat. De ce fait, j'invite Monsieur le Ministre à se positionner par rapport aux propos de M. Ziegler.
  • Réponse provisoire du 09/04/2008
    • de LUTGEN Benoît

    A l'heure actuelle, l'ensemble des renseignements nécessaires pour répondre de manière précise et circonstanciée à la question de l'honorable Membre ne m'ont pas encore été complètement communiqués.

    Je ne manquerai pas de les lui transmettre dès que j'en aurai pris possession.
  • Réponse du 10/04/2008
    • de LUTGEN Benoît

    Après 2010, la Commission européenne vise à atteindre une production de 10 % de biocarburants à l’horizon 2020. Cet objectif est contesté, notamment par ceux qui considèrent qu’il est inacceptable de mettre en concurrence la filière énergétique et la filière alimentaire, en particulier lorsque cela se fait au détriment des populations les plus démunies.

    Parmi ceux-ci, Monsieur Ziegler a toujours reproché à l’Europe d’envoyer ses excédents, notamment de céréales, dans les pays en voie de développement et de tuer les marchés locaux en empêchant les producteurs locaux de valoriser leur production.

    La production européenne de céréales est légèrement excédentaire et leur transformation en biocarburants est une des possibilités existantes pour ne pas envoyer nos excédents sur les marchés des pays en voie de développement.

    Ceci n’est vrai qu’à une condition : utiliser exclusivement, pour la production de biocarburants, des matières premières de proximité et non des matières premières produites dans les pays lointains, au détriment de populations sans protection sociale, détruisant des superficies de forêts aux sols fragilisés et déstabilisant ainsi brutalement des régions entières de la planète.

    Ce choix, la Région wallonne l’a fait en conditionnant son soutien à Biowanze. En effet, l’octroi des certificats verts est lié à l’utilisation de betteraves et de céréales locales.

    Si le prix des produits alimentaires a fortement crû ces derniers mois, cette augmentation est due essentiellement à de fortes baisses des volumes produits dans certains pays gros producteurs, à une demande renforcée de certains pays émergents comme l’Inde ou la Chine et à un fort renchérissement du coût de l’énergie. La responsabilité des biocarburants est peu importante. Nous nous trouvons dans une situation alimentaire et énergétique qui évolue rapidement et qui est bien différente de ce que nous avons connu ces dernières années.

    Nous ne reviendrons pas à la situation antérieure. Tant les productions agricoles que les habitudes de consommation alimentaire et énergétique évoluent pour s’adapter aux nouveaux fondamentaux : des énergies fossiles à un prix de plus en plus élevé et de nouvelles exigences alimentaires de la part des populations nombreuses des pays émergents.

    Les biocarburants ne sont pas l’unique solution au problème énergétique. Cependant, du point de vue environnemental, les carburants sont une piste qu’on ne peut mettre de côté, surtout dans une perspective à long terme.

    Cela implique des investissements importants en recherche afin de mieux valoriser la biomasse, et particulièrement la biomasse non alimentaire. Il s’agit d’une voie à améliorer pour réduire la concurrence entre utilisation alimentaire et non alimentaire. Les carburants de seconde génération, qui se feront au départ de lignocellulose, tels les déchets verts ou la paille, présentent ainsi un potentiel intéressant.

    En Région wallonne, les Facultés d’agronomie de Louvain-la-Neuve et de Gembloux développent des méthodes visant à exploiter au mieux la lignocellulose. Plusieurs méthodes physicochimiques et biochimiques sont explorées. Ces travaux s’intègrent dans un programme européen, soutenu par la Région.

    Pour des raisons évidentes de lutte contre le réchauffement climatique, je suis donc favorable à une utilisation plus importante des biocarburants. Toutefois leur production doit répondre aux exigences d’un vrai développement durable.