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Légèreté de certaines communes dans le cadre de la délivrance de permis - Conséquences.

  • Session : 2007-2008
  • Année : 2008
  • N° : 355 (2007-2008) 1

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  • Question écrite du 19/03/2008
    • de BERTOUILLE Chantal
    • à ANTOINE André, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial

    Depuis la réforme du CWATUPE, il existe ce que l'on qualifie communément des « petits permis ». Ceux-ci ne nécessitent pas d'enquête publique ou encore d'information des voisins et riverains. La commune fonde donc sa décision sur base des éléments qui lui ont uniquement été fournis par le demandeur du permis d'urbanisme.

    Je viens ainsi d'être interpellée par les concitoyens sur les dangers de cette procédure unilatérale surtout lorsque la commune agit avec une certaine légèreté.

    Des concitoyens habitant une maison de rangée ont de la sorte été avertis oralement par leur voisin qui venait d'obtenir un permis d'urbanisme l'autorisant a construire un mur de plus de 5 mètres de haut, mur qui serait mitoyen de leur arrière-cuisine et qui les priverait de toute lumière dans celle-ci.

    Bien entendu, ces concitoyens se sont immédiatement adressés a la commune pour savoir si celle-ci avait bien conscience de l'existence d'une cuisine dans cette arrière-cour, cuisine qui serait privée de toute luminosité par la nouvelle construction.

    Dans un premier temps, cette commune en question s'est contentée de rétorquer qu'aucun plan ne faisant mention de l'existence de cette cuisine, celle-ci était totalement illégale et qu'en conséquence le permis pouvait parfaitement être délivré.

    Néanmoins, après un réexamen attentif dudit dossier, la commune s'est bien vite rendue compte de ses erreurs: cette arrière-cuisine était totalement légale et existait sur les plans. Le permis du voisin n'aurait donc jamais dû être délivré. Cependant, ce permis d'urbanisme ayant été délivré, nos concitoyens qui sont lésés par ce permis n'ont plus comme seule possibilité que d'introduire, à leurs frais, un recours au Conseil d'Etat.

    Que pense Monsieur le Ministre, dans le cas d'espèce, de la légèreté et de la gestion de ce dossier par l'administration communale ? En cas d'erreur manifeste qui ne peut être connue des voisins qu'au moment où le permis est mis en exécution, ne conviendrait-il pas d'ouvrir une éventuelle possibilité de révision ?

    Il y a ici manifestement erreur de la commune, erreur qui a été admise. Le citoyen est-il en droit de réclamer des dommages à celle-ci, voire une prise en charge des frais de recours au Conseil d'Etat?

    Ne faudrait-il pas également que Monsieur le Ministre rappelle à certaines communes qu'un examen superficiel, même dans le cadre des « petits permis », ne suffit pas et qu'il faut que tous les éléments soient examinés avec soin et attention?


  • Réponse du 30/04/2008
    • de ANTOINE André

    En réponse à la question posée par l'honorable Membre, j'ai l'honneur de lui faire part des observations suivantes.

    Selon la jurisprudence constante du Conseil d'Etat, un acte administratif peut être retiré dans certaines hypothèses.

    La théorie du retrait d'acte se fonde sur une double distinction opposant les actes créateurs de droit et les actes non créateurs de droit :

    1° en ce qui concerne les actes non créateurs de droit (par exemple: un refus de permis d'urbanisme), même réguliers, ceux-ci peuvent être retirés à tout moment, peu importe pour quel motif, notamment pour des motifs d'opportunité;

    2° quant aux actes créateurs de droit (par exemple: un octroi de permis d'urbanisme), ceux-ci sont tantôt réguliers, tantôt irréguliers:

    − les actes créateurs de droit réguliers ne peuvent faire l'objet d'un retrait ab initia;
    − les actes créateurs de droit irréguliers peuvent être retirés par l'autorité compétente, soit:

    * pendant le délai de soixante jours imparti pour l'introduction d'un recours au Conseil d'Etat, ou lorsqu'un recours est introduit, jusqu'au moment de la clôture des débats;
    * lorsque l'acte est entaché d'une irrégularité telle qu'il doit être tenu pour inexistant;
    * s'il a été obtenu par des manoeuvres frauduleuses;
    * si une disposition légale expresse autorise le retrait.

    En conclusion, en cas d'erreur manifeste de l'autorité qui a délivré le permis, je confirme à l'honorable Membre qu'une « possibilité de révision » de l'autorisation s'offre à l'autorité compétente, en l'occurrence, le retrait et la réfection de l'acte en vue de le rendre régulier.

    Cependant, si l'autorité compétente ne veut pas admettre qu'elle a commis une
    erreur manifeste dans l'appréciation de la demande de permis, le tiers lésé peut introduire un recours en annulation de l'acte incriminé devant le Conseil d'Etat.

    En cas d'annulation du permis par la Haute Juridiction administrative, l'existence d'une faute au sens de l'article 1382 du Code civil est présumée dans le chef de l'autorité qui a octroyé l'autorisation.

    Dans cette hypothèse, la personne lésée est en droit d'introduire une action en dommages et intérêts contre cette autorité fautive et si elle obtient la réparation de son préjudice, elle sera, en outre, partiellement indemnisée des frais et dépens que ces procédures lui auront occasionnés en vertu de la loi du 21 avril 2007 relative à la répétibilité des honoraires et des frais d'avocat.