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Entrepreneurs de la seconde chance.

  • Session : 2007-2008
  • Année : 2008
  • N° : 202 (2007-2008) 1

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  • Question écrite du 09/07/2008
    • de LANGENDRIES Benoît
    • à MARCOURT Jean-Claude, Ministre de l'Economie, de l'Emploi, du Commerce extérieur et du Patrimoine

    A juste titre, le Gouvernement soutient activement la création d'entreprises et la promotion, notamment auprès des jeunes, de l'esprit d'entreprendre.

    Les aides aux porteurs d'un projet d'entreprise ne manquent pas, qu'elles soient fédérales ou régionales: elles sont nombreuses: citons, par exemple, les aides à l'investissement, les aides à l'emploi, les bourses de préactivité, les chèques formation à la création de PME, les primes diverses pour le recours à des consultants, les aides fiscales, les réductions de cotisation patronale ... et je suis loin d'être exhaustif.

    Dans ce contexte, mon attention a été attirée par une petite brochure publiée par la Fondation FREE sous le titre « Entrepreneurs de la seconde chance». En exergue, cet opuscule porte une citation de ce grand brasseur d'affaires américain que fut Jack Welch, qui disait: «Punir l'échec est le plus sûr moyen pour que personne n'ose. ».

    La Fondation FREE a organisé à ce sujet un Iaboratoire d'idées. Il en ressort qu'un intérêt mineur pour ne pas dire un désintérêt total est à constater à l'égard des entrepreneurs ayant connu l'échec. Les experts estiment qu'une réflexion portant sur les incitants à la reprise d'une activité suite à un échec mériterait plus d'attention de la part des décideurs.

    Or, dans nos pays, on considère encore trop souvent que l'échec d'une entreprise est anormal, voire infamant d'où il s'ensuit que le pourcentage d'entrepreneurs ayant connu l'échec qui redémarrent une nouvelle entreprise est relativement faible, notamment parce qu'on ne leur fait plus confiance, que les banques ne veulent prendre aucun risque et refusent de consentir de nouveaux prêts.

    Certaines études tendent pourtant à montrer que les « re-créateurs» d'entreprise tirent un apprentissage de leur échec et que la croissance de leur nouvelle entreprise est généralement plus rapide.

    Sans donner de prime à la mauvaise gestion. il y a selon la Fondation Free "des choses à faire " à l'égard des « re-créateurs».

    La première question que je voudrais vous poser est celle de savoir si des actions spécifiques sont mises en œuvre par la Région wallonne à l'égard de ce public-cible particulier.

    Il semble qu'un excellent service à rendre à des «re-créateurs» serait de les accompagner et de les conseiller. A ma connaissance, rien de spécifique n'existe en la matière.

    Il serait heureux aussi de travailler à la modification de l'image sociale que véhicule l'échec d'une entreprise et de soutenir les dirigeants qui ont connu l'échec plutôt que de les stigmatiser. Ce sont là des moyens de les aider à trouver en eux et autour d'eux les ressources pour prendre un nouveau départ.

    La seconde question que je soumets donc à votre examen est celle de savoir comment Monsieur le Ministre se positionne par rapport à ce besoin d'accompagnement et de conseil et par rapport à la nécessité de favoriser un regard plus positif sur l'échec des entreprises. Une initiative ne devrait-elle pas être prise en la matière?
  • Réponse du 25/08/2008
    • de MARCOURT Jean-Claude

    La question posée consiste à savoir si des actions spécifiques sont mises en œuvre en Région wallonne à l'égard du public cible des «re-créateurs» d'entreprises c'est-à-dire les entrepreneurs qui ont connu l'échec et qui redémarrent une activité. Cette question prend ancrage dans le contexte de la publication récente (mai 2008) des conclusions d'un Think Tank portant sur « l'entrepreneuriat de la seconde chance», coordonné par FREE, et qui émet quelques recommandations à l'égard des pouvoirs publics et des acteurs du financement de l'entreprise.

    En résumé, les recommandations du Think Tank sont les suivantes:

    - « recommandation 1 - qualifier les faillites» : FREE propose qu'un projet de loi qualifiant les faillites selon leur caractère frauduleux ou non, soit déposé auprès du législateur. L'objectif qui sous-tend cette proposition concerne le failli en personne physique et consiste à accélérer la procédure actuelle, c'est-à-dire qu'ait lieu une proclamation «d'échec honorable» sur base du mémoire que le curateur est censé remettre au juge commissaire dans les deux mois de son entrée en fonction, et ce sans attendre que soit déclarée «l'excusabilité» du failli au terme de la procédure de curatelle, beaucoup plus longue. De cette manière, le failli est délivré de la pression de ses créanciers. Par ailleurs, pour les dirigeants de sociétés, l'objectif est de rendre la loi-programme du 20 juillet 2006 plus précise en la restreignant uniquement aux faillites qualifiées par les Tribunaux de Commerce de «frauduleuses». Pour rappel, cette loi permet à l'ONSS de tenir les administrateurs solidairement responsables des cotisations sociales dues au moment de la faillite si un administrateur de cette société a déjà été impliquée dans au moins deux faillites entraînant des dettes à l'égard de l'ONSS;
    - « recommandation 2 - diminution de la méfiance des bailleurs de fonds» : FREE propose d'examiner la possibilité de créer des sources de financement alternatives s'adressant aux entrepreneurs ayant connu l'échec, ainsi qu'un système de garanties à l'égard de ce public cible. Des mesures concrètes au niveau des banques devraient embrasser également la problématique;
    - « recommandation 3 - offrir un meilleur accompagnement en cas de faillite » : FREE propose la mise en place d'un accompagnement spécifique de ce public cible par les acteurs de l'animation économique ainsi que la création d'un réseau d'entrepreneurs ayant connu l'échec, de manière à stimuler les partages d'expériences entre personnes ayant traversé les mêmes difficultés;
    - «recommandation 4 - changer les mentalités au travers des médias» : il s'agit de dédramatiser la faillite économique en mettant en évidence des cas de rebonds réussis à travers les médias et les initiatives qui font l'objet d'une communication grand public, tels les concours de l'entrepreneuriat par exemple.

    De l'examen de ces propositions, il ressort que la première recommandation est porteuse de sens. La plupart des faillites concernent en effet des indépendants en personne physique. De plus, le délai est souvent long entre la déclaration de la faillite et la clôture de la faillite devant le Tribunal de Commerce, terme au moment duquel «l'excusabilité» du failli peut enfin être demandée par le curateur. Cette proposition doit tenir compte toutefois du fait que chaque cas de faillite est particulier; elle nécessite d'être approfondie par des contacts avec le monde de la magistrature et le Ministre fédéral en charge de la Justice, Monsieur Jo Vandeurzen.

    Pour ce qui relève de l'attitude des bailleurs de fonds, développer des produits financiers spécifiques dédicacés aux entrepreneurs faillis consisterait à stigmatiser davantage l'entrepreneur ayant connu l'échec. La proposition de créer des groupes de travail avec les acteurs du financement doit cependant être encouragée dans un perspective culturelle de changement d'attitude à l'égard du public cible des «re-créateurs».

    Enfin, en réponse aux deux dernières recommandations, il est juste d'insister sur la nécessité de travailler à un niveau fondamental, culturel afin d'impacter sur l'attitude de différents acteurs à l'égard de l'entrepreneuriat. Les mentalités doivent évoluer; la mentalité des acteurs financiers d'une part qui manqueraient de souplesse à l'égard d'un bon projet porté par une personne ayant connu l'échec, mais plus largement la mentalité de la population et son approche à l'égard de la faillite et donc du risque.

    Ce travail sur les mentalités doit s'opérer dès l'enseignement, à tous les stades de la formation continue mais également via d'autres vecteurs tels la famille, les médias ...

    Il s'agit là d'une des missions de l'Agence de Stimulation économique créée dans le cadre de l'«Axe 2 - Soutenir la création d'activités» du Plan d'Actions prioritaires pour l'Avenir wallon. C'est une véritable culture de l'initiative, de l'esprit d'entreprendre que l'Agence a pour mission de développer, que ce soit auprès des jeunes, des enseignants, des formateurs, des femmes (moins présentes dans la structure entrepreneuriale que les hommes), des demandeurs d'emploi, des seniors, mais également dans l'entreprise à travers l'action des opérateurs d'animation économique.

    Dans cet esprit, l'Agence, avec le conseil de FREE, a coordonné le programme de l'esprit d'entreprendre auprès des jeunes en âge scolaire, opérationnel depuis 2007 : 10 opérateurs ont été labellisés et des synergies ont été établies entre eux, 14 actions ont été agréées, 52 établissements scolaires ont reçu une bourse pour développer des initiatives dans le sens de la pédagogie du projet, 5 agents de l'esprit d'entreprendre portent ce programme auprès des établissements, le budget de l'esprit d'entreprendre a été doublé!

    L'Agence a également pour mission de développer un climat propice à la création d'activités, à travers diverses initiatives. A titre d'exemple, elle est coordinatrice du Grand prix wallon de l'entrepreneuriat qui vise à mettre en lumière nos indépendants et entrepreneurs. Elle est initiatrice de certaines actions d'animation économique qui ne sont pas à ce jour couvertes par les opérateurs de terrain; elle coordonne les programmes d'animation économique des structures locales de coordination... Enfin, partant du constat qu'il est important de diffuser la culture entrepreneuriale à une large échelle touchant le grand public, l'Agence lancera un ambitieux plan de communication visant à diffuser à travers les médias, la culture de l'esprit d'entreprendre et ce, dès la rentrée scolaire 2009.

    Il est capital d'encourager le succès et de ne pas stigmatiser l'échec. C'est dans ce sens que tous les organismes wallons publics ou privés sont invités dans une dynamique de bonnes synergies avec l'Agence et les pouvoirs publics, à orienter leur analyse sur les qualités des projets qui leur sont présentés plus que sur les éventuelles difficultés passées du porteur de projet.

    Plus que d'accompagnement spécifique, c'est d'une nouvelle mentalité de leurs accompagnateurs et partenaires dont les entrepreneurs ont besoin pour transformer leur échec en expérience et en succès futur.