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Les certificats verts.

  • Session : 2008-2009
  • Année : 2008
  • N° : 141 (2008-2009) 1

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  • Question écrite du 04/12/2008
    • de STOFFELS Edmund
    • à ANTOINE André, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial

    Dans son rapport annuel spécifique 2007, intitulé « l’évolution du marché des certificats verts », la CWAPE tire la sonnette d’alarme. Elle le fait avec des mots très pesés, mais le contenu de ses propos ne peut pas être plus clair.

    Je cite : les « certificats verts disponibles » correspondent au nombre de certificats verts (CV) présents sur le marché au moment du retour de quota. Ils proviennent de la somme des CV octroyés dans la période et du stock de CV non utilisés de la période précédente diminuée des CV utilisés pour le retour de quota de la Région Bruxelloise.

    Les « CV à rendre » correspondent au nombre de CV devant être rentrés par les fournisseurs et les gestionnaires de réseau. Pour rappel, ce montant correspond à 7 % (en 2007) des fournitures totales d’électricité, moins les réductions octroyées pour les clients finals grands consommateurs d’électricité.

    Enfin, les « CV rendus » correspondent au nombre effectif des CV rentrés pour le quota en Région wallonne. La différence entre les CV disponibles et les CV rendus correspond au stock des CV disponibles à la date du retour quota.

    La différence entre les CV à rendre et les CV rendus correspond aux amendes. On constate que le nombre de CV disponibles lors de chaque retour était suffisant en 2007 et commence à s’accroître sensiblement.

    La CWAPE constate dans son rapport analysant les bilans de 2003 à 2007 en ce qui concerne les CV, que, pour la première fois depuis l’imposition en 2003 d’un quota de CV, le nombre de CV octroyés en 2007 est supérieur au nombre de CV à rendre pour les quotas (y compris ceux rendus par le quota Bruxelles).

    Un écart qui se creusera davantage pendant les années à venir, risquant de passer inaperçu d’ici la fin de la législature mais s’amplifiant dangereusement après la fin 2009-2010.

    Dans une analyse du mécanisme, fait par l’ancien administrateur de la CWAPE, il pronostique que ce déséquilibre aboutira, sauf augmentation des quotas dans un avenir proche, à la chute des prix du marché avec appel, pour ceux qui y ont droit, aux mécanismes du prix minimal garanti de 65 euros par CV.

    Il continue en disant qu’il faut attirer l’attention sur la rupture de la logique qui avait été à la base du système mis en place par la majorité précédente, et sur le fait que ce déséquilibre aura des conséquences au niveau de la confiance des investisseurs.

    Dans ma dernière intervention, je disais à l'honorable Membre que le mécanisme du CV a été découplé du principe de réduction de quantités d’émissions de CO2 en moins. Le CV, pour ce qui concerne la technologie du photovoltaïque notamment, est un mécanisme de subventionnement de cette technologie plutôt qu’un mécanisme de réduction des GES (ceci étant plutôt le produit annexe du soutien public du PV).

    Dans une réaction par rapport aux propos de l’ex-administrateur, son successeur, Francis Ghigny, confirme les propos de M. Buysse, nuançant toutefois que la CWAPE est confiante (propos retenu par Monsieur le Ministre, en séance de commission). Que pouvons-nous lire dans sa réaction parue dans l'Echo du 29 octobre dernier ?

    « L’inquiétude de Jean-Louis Buysse face au déséquilibre entre l’offre et la demande de CV est légitime, mais les réactions sont en cours. La CWAPE examine et évalue l’évolution du marché des CV et proposera une adaptation (en termes de quota notamment) au Gouvernement wallon. » Selon M. Ghigny, la parade à l’égard de l’actuel déséquilibre consistera donc à augmenter les quotas et - j’ajoute - avec toutes les conséquences que cela aura sur le prix de l’électricité payé par le petit consommateur lambda (le grand consommateur industriel profitant d’un régime l’exonérant du coût ou d’une partie de celui-ci s’il y a accord de branche).

    M. Ghigny continue en disant que les CV ont beaucoup de succès et que le marché fonctionne bien, même si un déséquilibre est annoncé dès 2009 (voir le rapport spécifique de la CWAPE publié en juin 2008). Des décisions d’ajustement seront proposées et devront être prises. Il dit également que l’augmentation des quotas peut se justifier à cause des obligations européennes demandant à la Région wallonne de respecter les objectifs en matière d’électricité renouvelable.

    Je souhaite entendre Monsieur le Ministre,sur ce sujet. Je souhaite connaître sa politique à mettre en place pour rétablir l’équilibre en matière de CV.

    Car, en effet, je crains que nous serons confrontés à l’avenir à une explosion du nombre de CV disponibles (octroyés de façon très généreuse dans le cadre du soutien du photovoltaïque) pour un résultat en termes d’émissions de CO2 effectivement réduits tout à fait disproportionné par rapport au coût répercuté sur la facture individuelle de chaque consommateur – notamment de celui qui n’a pas les sous pour s’offrir une installation photovoltaïque. Mon souhait est que toute augmentation du quota, si on doit passer par là, corresponde à un résultat réel en termes de réduction d’émissions de CO2.

    Alors, Monsieur le Ministre,peut-il me dire ce qu'il en pense ? Quel est son point de vue sur le mécanisme des certificats verts ?
  • Réponse du 14/01/2009
    • de ANTOINE André

    Il est clair que mettre en place une politique URE est moins cher qu'implémenter une politique de production d'électricité renouvelable en considérant le critère des tonnes de CO2 économisés/euros d'argent public investi, et ce, qu'il s'agisse du photovoltaïque ou des autres filières.

    J'ai toujours prôné et agi de manière à ce que le premier réflexe soit de mener une vigoureuse politique d'amélioration de l'efficience énergétique dans tous les secteurs de la consommation. Par delà les paroles et les plans, il y a les moyens et les résultats, plusieurs centaines de millions d'euros tant pour les pouvoirs publics et les écoles via le programme UREBA classique renforcé par un appel d'offre exceptionnel de 125 millions d'euros, que pour le financement d'investissements chez le simple citoyen via le Fonds énergie (+ 45 millions d'euros) ou encore pour les entreprises avec notamment les accords de branche et le programme AMURE.

    Avec de tels moyens les résultats ont été au rendez-vous comme le démontre le tout récent bilan énergétique de l'ICEDD(1) pour l'année 2007, dernière année connue. Ce rapport confirme que la consommation finale d'énergie (toutes énergies confondues) diminue: depuis 2004, c'est près de 10 % de réduction qui a été enregistrée, dont - 3.4 % de 2006 à 2007. Cette baisse significative et récurrente est d'autant plus remarquable quand on sait qu'entre 1999 et 2003, l'augmentation de cette même consommation avait été majeure sauf en 2002.

    Je voudrais cependant attirer l'attention de l'honorable Membre sur le fait que, qu'elles que soient nos économies d'énergie, l'Europe s'assigne à atteindre 20 % d'énergie renouvelable en 2020. En Wallonie, participer à cet objectif ne pourra se faire que si nous utilisons tout notre potentiel renouvelable, y compris le potentiel solaire photovoltaïque. Encore faut-il rendre sa mise en œuvre économiquement possible et, pour cela, comme l'écrivait elle-même la CWaPE dans un de ses avis en novembre 2007 : « On constate qu'un soutien sous forme de certificats verts avec coefficients multiplicateurs (k1= 7 et k2 = 5) et de réduction d'impôt fédérale (40 % de l'investissement avec un plafond de 3.380 euros) est insuffisant pour compenser les surcoûts de production. Un soutien renforcé semble par conséquent nécessaire et justifie la mise en place d'une prime régionale. ».

    Donc, ceux qui opposent l'utilisation rationnelle de l'énergie et les énergies renouvelables ou encore les différentes sources d'énergies renouvelables entre elles se trompent lourdement. Le défi énergétique et climatique qui est aujourd'hui le nôtre, nous impose de continuer à la fois une vigoureuse politique d'amélioration de r efficience énergétique dans tous les secteurs de la consommation ainsi qu'un développement de toutes nos filières renouvelables sans exception.

    Le mécanisme des certificats verts n'a pas pour but ultime et unique les économies de CO2, sinon, il faudrait abandonner les aides à la production que perçoivent ceux qui en bénéficient. Cela concerne même les filières les plus rentables puisque la tonne de CO2 se négocie entre 20 et 30 euros la tonne alors que les filières les moins soutenues de production d'électricité verte en reçoivent 197 euros en considérant un CV à 90 euros. En conséquence, la campagne politicienne que certains ont lancée risque à terme de nuire fortement au développement de la production d'électricité à partir des énergies renouvelables. Essayer de convaincre le citoyen et le chef d'entreprise aujourd'hui qu'il paie des certificats verts uniquement pour faire des économies de CO2, c'est le convaincre à coup sûr demain qu'il paie beaucoup trop pour les certificats verts. Il est regrettable de créer des mythes à des fins politiques, surtout lorsque ces mythes in fine nuiront à une filière économique dont notre Région ne peut se passer à terme.

    Le mécanisme des certificats verts en Wallonie, contrairement à ce qui se fait dans d'autres Régions. veille à ce que des certificats verts ne soient attribués que si une économie de CO2 suffisante est réalisée. Je trouve déplorable et dangereuse la simplification que certains font aujourd'hui transformant la condition nécessaire que la Wallonie a mise à juste titre pour en faire le but ultime d'un mécanisme.

    Il m'apparaît indispensable de rétablir la vérité même si les messages complexes sont souvent plus difficiles à faire passer que des messages simplistes et réducteurs.

    Le mécanisme de soutien à la production d'électricité verte mis en place en Région wallonne s'inscrit dans le cadre des deux directives européennes suivantes:

    - la directive 200l/77/CE du 27 septembre 2001 relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité;
    - la directive 2004/8/CE du II février 2004 relative à la promotion de la cogénération sur la base de la demande de chaleur utile dans le marché intérieur de l'énergie.

    Ces directives visent certes à promouvoir l'électricité verte dans un but environnemental mais aussi dans un but d'indépendance, de diversification et de sécurité de l'approvisionnement en énergie et surtout d'émancipation par rapport à notre forte dépendance aux énergies fossiles. D'autres objectifs sont également poursuivis tels que la cohésion économique et sociale puisque le développement de l'électricité verte est une opportunité de création d'activité économique et d'emplois au niveau local (cfr les 550 emplois créés dans la filière photovoltaïque en moins d'un an).

    Les soutiens de différentes formes que la Wallonie apporte à la production d'électricité renouvelable en ce compris ceux accordés à la filière photovoltaïque, s'intègrent parfaitement dans cette philosophie et sont indispensables pour atteindre l'objectif que nous assigne l'Europe en 2020.


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    (1) Institut de conseil et d'études en développement durable